Juger le génocide rwandais en France: Suite des déballages judiciaires…

Afriquinfos
3 Min de Lecture

Le verdict final du procès est tombé le mercredi 6 juillet à Paris. Tito Barahira et Octavien Ngenzi ont été reconnus coupables de «crimes contre l’humanité» et de «génocide» pour «une pratique massive et systématique d’exécutions sommaires» en application d’un «plan concerté tendant à la destruction» du groupe ethnique tutsi, a jugé la Cour d’assises.

A l’issue de deux mois de procès devant la Cour d’assises de Paris, Philippe Courroye a désigné Octavien Ngenzi, 58 ans, et Tito Barahira, 65 ans, comme des rouages essentiels du génocide dans leur commune de Kabarondo, qualifiant le premier de «dirigeant» et le second d’«officiant de la machette».

Les deux hommes, qui nient toute participation au génocide, ont écouté, impassibles, le lourd réquisitoire: un Ngenzi «Judas» qui n’a non seulement «rien entrepris pour empêcher les massacres» mais les a «supervisés». Un Barahira «actif», qui «donne des instructions» et se mêle aux tueurs, la lance à la main. «A la fois les bourreaux et les valets des planificateurs du génocide», ils ont, selon l’accusation, «manqué leur rendez-vous avec l’Humanité, avec le pardon», en niant jusqu’au bout.

Un film sinistre

- Advertisement -

Plus de huit semaines de débats ont donné à voir un génocide entre voisins, au village, sur les collines où l’on participait autrefois ensemble aux travaux communautaires. Un crime de proximité loin des centres du pouvoir, contrairement au premier procès en France, celui de l’ex-capitaine Pascal Simbikangwa en 2014.

Comme ailleurs au Rwanda où les tueries débutent peu après l’attentat contre le Président hutu Juvénal Habyarimana le 6 avril 1994, massacres et exécutions sommaires vont s’enchaîner à Kabarondo. Ils firent plus de 800.000 morts en cent jours à travers le pays. Plus de 2.000 en un seul jour à l’église de Kabarondo, selon son curé, Oreste Incimatata.

Plus de sept heures d’un chaos de poudre et de sang, les lames silencieuses des machettes succédant au fracas des grenades et des mortiers postés dans les caféiers. Philippe Courroye a situé les accusés, qui se sont succédé à la tête de la commune, au cœur de la machine génocidaire : «Dans un État centralisé, dont le cerveau politique est ségrégationniste, Ngenzi est le bourgmestre, le chef d’état-major, le dirigeant, Barahira, un homme craint, granitique».

C’est la deuxième et la plus lourde condamnation en France dans le cadre des affaires relatives aux massacres de 1994 au Rwanda, après celle en 2014 de l’ex-capitaine de l’armée, Pascal Simbikangwa à 25 ans de réclusion, pour génocide et complicité de crime contre l’Humanité. Ce dernier a cependant fait appel et doit être jugé à nouveau en octobre prochain.

Innocente NICE