Bissau: la candidature de Carlos Gomes Junior à la présidentielle contestée par des membres de son parti

Afriquinfos Editeur
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Ainsi, Lamine Camara, membre du Comité central qui avait désigné Premier ministre, conteste la légalité de cette désignation qui a été faite la semaine dernière par le Comité central du PAIGC. Selon lui, Carlos Gomes Junior, président du PAIGC, a imposé le vote par acclamation au lieu du vote secret pour pouvoir faire passer sa candidature à la magistrature suprême au détriment de son rival, Sherifo Nhamadjo, actuel vice- président de l'Assemblée nationale.

« Carlos Gomes n'aura pas le soutien du PAIGC et ne sera jamais le président de la Guinée-Bissau », a-t-il prédit devant la presse.

Pour sa part, Francisco Benante, député du PAIGC et membre du Comité central, a décidé de se retirer provisoirement dudit comité, qualifiant de « vraie mascarade », le scrutin qui a désigné Calos Gomes Junior.

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Quant à Sherifo Nhamadjo, il a annoncé qu'il a déjà saisi le Conseil juridique du PAIGC pour une annulation de ce scrutin qui, selon lui, a violé les statuts du parti qui n'ont jamais prévu le vote par acclamation.

Face à cette situation, l'analyste politique Fernando Delfin da Silva estime que « le PAIGC est plus que jamais divisé en plusieurs ailes antagoniques qui pourraient entraîner son implosion, voire compromettre ses chances de remporter la présidentielle anticipée du 18 mars ».

Selon lui, « Carlos Gomes Junior quoique investi, va probablement aller aux présidentielles affaibli par une grande partie du PAIGC acquis à la cause de Sherifo Nhamadjo ».

« Dans cette atmosphère délétère, le PAIGC court le risque de perdre les présidentielles au profit du candidat indépendant Henrique Pereira Rosa (qui a déjà assuré l'intérim de la présidence en 1998) ou Koumba Yala, qui a été chef de l'Etat. Ce dernier dirige le Parti de la Rénovation Sociale (PRS) qui dispose d'un électorat fidèle au sein de son ethnie, les Balantes qui constituent 25% de la population.

Sherif Diakhité, l'un des conseillers de Malam Bacai Sanha et opposant de Carlos Gomes Junior au sein du PAIGC, a affirmé que Sherifo Nhamadjo, qui n'a pas encore présenté sa candidature, « est la seule personne au sein du PAIGC qui incarne les idéaux de Malam Bacai Sanha pour une paix et une stabilité durables en Guinée-Bissau ».

Pour lui, Carlos Gomes qui a réussi son pari avec son gouvernement en payant régulièrement les salaires, ferait mieux de conserver son poste de Premier ministre au lieu de briguer la magistrature suprême.

Depuis 2006, lors du congrès du PAIGC, les partisans de Malam Bacai Sanha et de Carlos Gomes Junior se livrent une bataille pour le contrôle du PAIGC. Cette bataille s'était transformée en une guéguerre institutionnelle entre la primature et la présidence de la république.

Apparemment, la bataille est loin d'être finie malgré le décès, le 8 janvier, du président Malam Bacai Sanha, car ses héritiers au sein duPAIGC, veulent vaille que vaille barrer la route de la présidence au Premier ministre.

L'Opposition démocratique, coalition regroupant 15 partis politiques, mène depuis l'année dernière un mouvement de protestation contre le Premier ministre qu'elle accuse d'avoir commandité les assassinats, en juin 2009, de Baciro Daboet de Helder Magno Proença, tous des députés du PAIGC. Elle exige que Carlos Gomes démissionne de son poste pour comparaître devant la justice.

D'autre part, Carlos Gomes Junior a maille à partir avec les chefs militaires qui l'avaient séquestré pendant des heures le 1er avril 2010.

Depuis lors, il a fait déployer à Bissau 200 militaires angolais qui assurent sa propre sécurité. Ainsi, lors d'une tentative de coup de force militaire le 26 décembre dernier, il a trouvé refuge au Palace Hôtel, quartier général des militaires angolais.

Dans ce climat de défiance, les observateurs se demandent si le Premier ministre pourra mettre en oeuvre le projet de réforme des forces de sécurité et de défense. D'ailleurs, la démobilisation de 400 militaires, prévue le 23 janvier dernier, a été reportée sine die. Et le général Antonio Injai, chef d'état-major général des armées, a réitéré la décision des chefs militaires à ne jamais accepter une démobilisation avec des pensions trop faibles.