Gabon : hausse à 5,2% de la part de la filière bois au PIB après l’interdiction d’exportation

Afriquinfos Editeur
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A en croire le responsable administratif, cette mesure inédite a rendu stables les produits industriels de ce domaine économique dans un pays qui, jusque-là, se contentait de commercialiser vers le marché international ses ressources naturelles à l'état brut et aujourd'hui privilégie la transformation locale pour accroître sa croissance économique.

Question : Quelle est l'incidence de suspension décidée en 2010 par le président Ali Bongo Ondimba des exportations de bois en grumes sur les recettes de l'Etat gabonais et l'économie nationale?

 Réponse : D'abord, il faut situer cette décision dans une perspective historique. Depuis 500 ans, parce que les Portugais sont arrivés au Gabon en 1472, l'économie gabonaise n'est faite que de chasse et de cueillette. On exporte des ressources naturelles non valorisées, sans valeur ajoutée. C'est un système économique qui enrichit, mais ce n'est pas de manière optimale. Donc, nous avons interdit les exportations de bois en grumes pour qu'il y ait plus de valeur ajoutée au niveau domestique, créer plus d'emplois et distribuer plus de revenus. Pour les opérateurs économiques eux-mêmes, il y a beaucoup à gagner dans l'industrialisation de la filière. Ce que nous avons pu obtenir par cette mesure, c'est que la part du secteur bois dans le produit intérieur brut est passée de 4,5% à 5,2%. Donc, en deux ans seulement, les opérateurs économiques ont fini par adhérer à cette vision de l'industrialisation de la filière bois. Et même l'emploi a connu une augmentation substantielle. Donc, c'est tout le monde qui est gagnant dans cette affaire, les produits industriels sont plus stables dans leur demande que les matières premières. Parce que le bois grume chômait au Gabon lorsque nos clients à l'étranger n'avaient pas fini de déstocker. Alors que là ce que nous avons fait, c'est garantir un débouché local à tous ceux qui occupent le bois, puisque la demande locale est forte, les unités de transformation qui ont été créées absorbent très bien le bois coupé.

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Q : Quel est le nombre de ces unités de transformation locale et quel en est le chiffre d'affaires?

 R : Nous ne pouvons pas aujourd'hui donner un chiffre d'affaires isolé des nouvelles unités industrielles, puisque les anciens coupeurs avaient quand même des unités industrielles. Donc, les chiffres que nous donnons sur l'amélioration de la part du secteur dans le produit intérieur brut qui va à 5,2% du produit intérieur brut est une donnée globale. Nous sommes en train de faire des études pour isoler la part des nouvelles unités industrielles nées de l'interdiction de l'exportation de bois en grumes. Nous avons pu recenser globalement une trentaine d'unités de transformation sur toute l'étendue du territoire, y compris chez ceux qui étaient spécialisés dans la coupe. Mais chacun a pu faire une intégration en aval dans sa filière en ayant une petite unité de transformation.

 Q : Quelle est la part des nationaux et celle des expatriés?

R : La filière bois est essentiellement aux mains des expatriés. Donc, on peut dire que 20% des effectifs de ces opérateurs sont des nationaux et 80% d'expatriés.

Q : Le Gabon est par ailleurs le deuxième producteur de manganèse. Qu'est-ce que l'exploitation de ce minerai rapporte au budget de l'Etat gabonais?

R : Le manganèse apporte beaucoup au budget de l'Etat. Pour le pétrole, nous sommes à peu près à 49%, le manganèse se situerait à 25% du produit intérieur brut du Gabon.

Q : Quelles sont les sources de financement des grands chantiers infrastructurels entrepris en ce moment par le gouvernement : essentiellement le budget de l'Etat ou bien en grande partie des financements extérieurs ?

 R : Tous les chantiers d'aménagement du territoire, de mise en place des facilités pour encourager l'investissement direct étranger, tous ces chantiers sont financés à partir de 40% du budget de l'Etat. Avant, on ne réservait que 15% de ce budget au développement. Ces ressources proviennent essentiellement des recettes propres de l'Etat. Nous avons aménagé la fiscalité : la pression fiscale a baissé, l'assiette a été élargie et donc il y a une collecte optimale des recettes publiques. Mais comme un Etat ne pas peut vivre sans s'endetter, bien sûr nous nous endettons et nous avons limité l'endettement à 100 milliards de francs CFA par an, pour que la dette soit soutenable. Nous avons également résolu la question de la dette intérieure, des banques se sont syndiquées pour aider l'Etat à racheter la dette intérieure, soulager la trésorerie des entreprises et sauver les emplois.

 Q : Dans ce chantier, quel est le niveau de participation du secteur privé gabonais?

R : Le secteur privé gabonais participe par le biais des bâtiments et des travaux publics. Les marchés publics sont ouverts à des entreprises locales et à des entreprises internationales qui concourent à égalité, et je suis heureux de voir que c'est souvent des entreprises locales qui ont les meilleurs dossiers et qui, aujourd'hui, sont sur le terrain en train de réaliser ces chantiers-là. Il faut également noter qu'il y a une entente presque tacite entre les majors et les PME gabonaises dans le cadre de la sous-traitance. Cela donne un certain professionnalisme et une certaine expérience.

Q : Pour la première fois, à l'instar du Cameroun et par la suite du Congo, l'Etat gabonais a levé en 2011 un emprunt obligataire de 100 milliards de francs CFA sur le marché régional d'Afrique centrale. C'est un mécanisme que vous comptez mettre à profit pour le financement de ce programme d'investissement ambitieux?

R : Nous sommes étonnés de la confiance placée en nos Etats par les épargnants. Contrairement aux notations souveraines, on nous fat confiance. Et ça a été un succès, au Cameroun, au Gabon, on a vu que c'était plus souple de se financer sur le marché par les méthodes traditionnelles qui nous ont endettés à partir des années 70.