Le Soudan du Sud confronté à la plus sévère crise politique et humanitaire depuis sa fondation

Afriquinfos Editeur
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Depuis le déclenchement des combats, environ 500 personnes ont été tuées à Juba, la capitale sud-soudanaise. Les conflits ont entraîné une crise humanitaire, forçant les étrangers à fuir le pays et près de 20.000 civils à chercher l'asile dans le complexe des Nations Unies à Juba.

Selon le le Comité international de la Croix-Rouge, il est alarmé par les actes de violence contre des civils qui se seraient produits ces derniers jours au Soudan du Sud. "Nous sommes extrêmement préoccupés par les rapports qui font état à la fois d'assassinats ciblés de civils et de mauvais traitements", a déclaré dimanche Melker Mabeck, chef de la délégation du CICR à Juba.

Par ailleurs, quatre soldats américains ont été blessés samedi dernier lorsque leur avion a été touché par des tirs au sol, au Soudan du Sud, lors d'une mission visant à évacuer des citoyens américains à Bor, après que des attaques ont été perpétrées contre une base de la mission des Nations Unies au Soudan du Sud (MINUSS) jeudi dernier, au cours desquelles deux Casques bleus et une vingtaine de civils ont été tués.

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RAISONS PROFONDES DES TROUBLES

Les différends au sein du gouvernement sud-soudanais ont joué un rôle important dans la dégradation de la situation, cependant, selon des analystes, il existe des raisons plus profondes expliquant les troubles dans le pays.

L'analyste politique soudanais Al-Baqir Hassan a annoncé au journaliste de l'Agence de presse Xinhua que la situation au Soudan du Sud était "extrêmement dangereuse" et que les dirigeants faisaient actuellement face à "la plus sévère épreuve" depuis l'indépendance du pays en 2011.

Selon lui, l'un des problèmes majeurs provient du fait que le jeune pays manque d'expérience en termes d'administration.

Au cours de l'histoire, jusqu'au 9 juillet 2011, date à laquelle le Soudan du Sud a fait sécession avec la République du Soudan, le pays a été sous l'influence du Royaume Uni, de l'Egypte puis de la République du Soudan. En raison de ces influences et avec plus de 90% de la population analphabète, le Soudan du Sud n'a pas eu beaucoup d'occasions d'apprendre et de mettre en pratique les expériences en matière d'administration.

Un autre problème majeur à la base des conflits dans le pays est celui des groupes ethniques.

Le Soudan du Sud est un pays de communautés multiples, dont aucune n'a de majorité absolue. Les Dinka, communauté la plus peuplée, parmi laquelle figure le président Salva Kiir, compte environ 15% de la population sud-soudanaise qui comprend près de 10 millions de personnes.

Par ailleurs, l'analyste politique a indiqué que le gouvernement a un contrôle limité sur l'armée.

La rivalité politique entre les deux partis se double de la dimension ethnique. En raison des différends entre les groupes ethniques, les soldats de l'armée se retournent les uns contre les autres et s'entretuent, comme cela s'est produit le 15 décembre au sein de la garde présidentielle. Les Dinkas sont majoritaires dans les troupes déployées à Juba, tandis que dans les régions éloignées, surtout dans le nord du pays riche en pétrole, la communauté du président perd l'avantage et d'autres groupes ethniques prennent place dans les troupes de l'armée.

 

REACTIONS DE LA COMMUNAUTE INTERNATIONALE

Face aux conflits au Soudan du Sud, la communauté internationale a appelé au calme et au dialogue.

Le secrétaire général de l'ONU Ban Ki-moon a exhorté dimanche 22 décembre tous les dirigeants politiques, militaires et les leaders des milices à cesser les hostilités et à mettre un terme aux violences contre les civils. Il a convié le président Salva Kiir et les leaders de l'opposition, dont l'ancien vice-président Riek Machar, à la table des négociations pour trouver une solution politique destinée à sortir de la crise actuelle.

L'Union africaine (UA) a demandé l'instauration immédiate d'un cessez-le-feu au Soudan du Sud. La présidente de la Commission de l'UA, Nkosazana Dlamini-Zuma, qui suit ce conflit avec grande inquiétude, avertit que le conflit deviendrait une guerre civile dans ce jeune Etat africain fondé il y a deux ans et demi, tout en appelant au Conseil de paix et de sécurité de l'UA et aux parties sud-soudanaises à empêcher une telle tendance.

Le représentant permanent de la Chine aux Nations Unies, Liu Jieyi, a appelé vendredi 20 décembre toutes les parties du Soudan du Sud à prendre des mesures efficaces pour mettre un terme à la violence, protéger les civils et assurer la sécurité des employés. Il a déclaré que "la Chine est prête à faire des efforts, avec d'autres membres du Conseil de sécurité, pour promouvoir une restauration rapide de la sécurité, de la stabilité et de l'ordre au Soudan du Sud".

Le président américain Barack Obama a appelé samedi 21 décembre les différentes factions du Soudan du Sud à résoudre leurs conflits au travers des négociations pacifiques, en les avertissant que tout emploi de la force pour s'emparer du pouvoir mettrait fin au soutien des Etats-Unis et de la communauté internationale.

 

EVACUATION DU PERSONNEL ET DES RESSORTISSANTS

La Mission des Nations unies au Soudan du Sud (MINUSS) a évacué dimanche son personnel non essentiel de Juba, la capitale du Soudan du Sud, vers la ville ougandaise d'Entebbe pour économier ses ressouces limitées afin de venir en aide à plus de 20.000 civils réfugiés dans sa base pour fuir les violences, a annoncé le porte-parole de l'ONU Martin Nesirky.

Pour le moment, selon l'agence de presse AFP, les Etats-Unis, le Royaume-Uni, le Kenya, le Liban et l'Ouganda se sont engagés à évacuer leurs ressortissants se trouvant au Soudan du Sud.

Washington a déployé 45 militaires américains dans le pays en proie aux conflits pour protéger les ressortissants et les installations américains. La Maison Blanche a évacué le 19 décembre près de 130 personnes, qui ont quitté Juba à bord d'un vol charter.

Les entreprises chinoises ont également commencé le 21 décembre à évacuer les membres de leur personnel. Un total de 68 employés chinois des compagnies China National Petroleum Corp (CNPC) et China Railway Construction Corporation (CRCC) sont arrivés samedi matin à Nairobi, capitale du Kenya. Selon des informations fournies par l'ambassade de Chine en Ouganda, plus de 400 Chinois se sont évacués du Soudain du Sud pour entrer en Ouganda du 20 au 22 décembre et il y en aura plus lundi 23 décembre.