Niamey (© 2023 Afriquinfos)- Initié depuis 2019 avec la mise en place d’un comité d’experts, le processus de changement de l’hymne national du Niger a abouti en juin dernier avec le remplacement de ‘’La Nigérienne’’ par ‘’Pour l’honneur de la Patrie’’. Certaines paroles de l’ancien hymne reflétaient selon les Nigériens une inféodation à la France, ancienne puissance coloniale et ne mettaient pas assez en avant leur patriotisme. Voilà que quelques semaines après ce changement d’hymne, le president Bazoum jugé trop proche de la France est renversé et c’est par milliers que les Nigériens manifestent pour le depart des troupes françaises stationnées dans le pays.
En signant le 22 juin 2023 le décret actant le changement de l’hymne national, Mohamed Bazoum ne pouvait pas imaginer être déchu quelques semaines après, par sa garde présidentielle. Si on y regarde de plus près, ce sont les memes raisons qui ont motivé le changement de l’hymne qui ont poussé les putschistes à mener leur action ou du moins, les populations à soutenir le coup d’Etat.
Composé par un Français au lendemain de l’indépendance, en 1961, il était reproché à l’ancien hymne un certain nombre de messages faisant ressortir toujours un rapport de dépendance et de subordination notamment aux troisième et quatrième vers de la première strophe : « soyons fiers et reconnaissants de notre liberté nouvelle ! » -, estimant que le mot « reconnaissant » marque une inféodation à la France.
Aussi, le nouvel hymne est présenté comme un instrument qui permettra d’enraciner la promotion de l’égalité, de la liberté, de la fraternité, du patriotisme et de l’unité nationale. Il invite le peuple à défendre la “patrie” dont l’honneur est attaqué de dehors (terrorisme) comme dedans (corruption). Le mot “Niger” apparaît six fois dans le nouvel hymne – contre trois fois dans l’ancien. Mais “l’Afrique” fait son apparition trois fois dans le nouvel hymne et invite à s’ancrer dans le cadre national pour mieux le dépasser et réaliser ce vieux rêve qu’est le panafricanisme.
Un panafricanisme que les Nigériens appellent de tous leurs vœux depuis le 26 juillet dernier en multipliant les manifestations pour exiger le départ des troupes françaises et la rupture des accords coloniaux. En changeant son hymne, c’est une page de son histoire que le Niger tourne. Alors que nouvel hymne était adopté, Amadou Mailallé, président du comité de rédaction, expliquait qu’ : « il souligne les raisons qui font l’unité de notre peuple, la communauté des destins et des idéaux en partage, parce que nous voulons retrouver, créer un nouveau Niger. ». ll ne croyait pas si bien dire.
Boniface T.
