Niger : L’aide budgétaire de 17 milliards de FCFA d’Areva fait polémique

Afriquinfos Editeur
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Pour l'opposition nigérienne regroupée au sein de l'Alliance pour la réconciliation nationale (ARN), cette aide semble à "une pratique mafieuse" tendant à régler le dossier d'Immouraren, un grand projet minier du groupe français Areva, dans la région d'Agadez (extrême nord du pays), qui semble avoir du plomb dans l'aile.

 Sur ces 17 milliards de FCFA de la société Areva au Niger, 10 milliards de FCFA seraient affectés pour l'acquisition d'un avion présidentiel, alors même que 4 milliards sont déjà inscrits au projet de budget 2013 en examen à l'Assemblée nationale. "C'est tout simplement un cadeau offert au président de la République afin d'acheter un avion pour se promener", selon M. Ousseyni Salatou, porte-parole de l'ARN

L'opposition politique nigérienne estime qu'au regard de "toutes les souffrances que le peuple nigérien endure, à travers les inondations, les maladies, l'école, la pauvreté ambiante, on ne peut pas comprendre et justifier une telle dépense, si ce n'est que de la provocation et du mépris à l'égard du peuple". En outre, l'ARN dénonce la "pratique frauduleuse" par laquelle le ministre des finances a introduit directement à l'Assemblée nationale sa proposition de modification de la loi des finances 2013 en examen, pour prendre en compte ces dernières données, alors que conformément aux dispositions réglementaires relatives aux lois des finances, les projets de lois des finances et leurs modifications doivent être délibérés en conseil des ministres et transmis au président de l'Assemblée nationale ; une disposition que le gouvernement a tout simplement violée.

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"Face à toutes ces dérives et ces dérapages déjà constatés dans le passé, et devant la forfaiture que le gouvernement s'apprête à perpétrer à l'occasion de l'adoption du budget 2013", l'ARN dénonces et fustige "ces pratique mafieuses" qui entourent la gestion des dossiers miniers notamment ceux du pétrole, de l'uranium et de l'or, "dénonce et fustige ces pratiques anticonstitutionnelles, les passe-droits" et interpelle l'ensemble des députés quant à leur responsabilité en tant représentants du peuple sur la gravité des agissements du gouvernement à l'occasion des examens des lois des finances. Pour les acteurs de la société civile, le haussement de ton du gouvernement nigérien au sortir du conseil des ministres, le vendredi 24 octobre dernier, estimant que le partenariat dans l'exploitation de l'uranium est très déséquilibré en défaveur du pays, après 41 ans d'exploitation, a été fait pour simplement pouvoir obtenir cette aide budgétaire.

En rappel, les autorités nationales avaient estimé que les recettes tirées de l'uranium qui représentent 5% des revenus du pays ne participent pas assez au développement économique et social du pays. "Nous voulons nous asseoir avec AREVA pour qu'ensembles nous trouvions les voies et moyens, pour que l'exploitation des ressources de notre sous-sol profite au développement de notre pays. Nous voulons que notre partenariat avec AREVA soit gagnant-gagnant", avait précisé le ministre d'Etat en charge des mines, Omar Hamidou Tchana.

Mais de l'avis de l'acteur de la société civile nigérienne, M. Ali Idrissa, le gouvernement a exercé cette pression sur Areva pour avoir de la liquidité, au lieu d'exiger la révision des contrats miniers et pétroliers. "Nous ne sommes pas d'accord, ils vont aller chercher leur liquidité, mais nous allons continuer à exiger cette révision pour notre pays". En introduisant, selon Ali Idrissa, une nouvelle disposition au contrat stipulant que "les impôts seront supportés par les bénéfices réalisés", Areva viole systématiquement le contrat.

"Le Niger a toutes les raisons de remettre en cause ces contrats qui le lie au groupe Areva, pour le grand bonheur de son peuple", a-t-il estimé.

Areva avait promis aux autorités nigériennes en 2009, rappelle-t-on, qu'avec l'exploitation de la mine d'Immouraren, initialement prévue à partir de 2014, le Niger se hisserait au premier rang en Afrique, et second au niveau mondial, de producteur d'uranium, après le Canada, avec une production annuelle qui passerait de 3.000 à 8.000 tonnes. Mais depuis, la promesse est loin d'être tenue. Le projet semble avoir du plomb dans l'aile.  

En décembre 2011, rappelle-t-on, la presse internationale évoquait la décision du groupe français Areva, de geler ses investissements sur le  chantier d'Immouraren. Les responsables du groupe invoquaient à l'époque l'impact du drame de Fukushima (Japon), le déclin des cours de l'uranium, la récession mondiale et les contraintes financières, pour procéder à un ralentissement de leurs investissements programmés sur ce gigantesque chantier. Impatient, le ministre d'Etat en charge des mines avait interpellé les différents acteurs impliqués dans le projet Immouraren pour non respect des engagements pris devant le président de la République Mahamadou Issoufou, et le gouvernement nigérien.

De sources bien informées, d'autres opérateurs, notamment des chinois, se sont déjà annoncés pour l'exploitation de ces minerais d'uranium dans le nord du Niger.