Maroc : Un pédophile gracié par le Roi, qui est responsable ?

Afriquinfos Editeur
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A qui la faute pour l’impardonnable bourde diplomatique qui enflamme actuellement le Maroc ? C’est la question que chacun se pose, maintenant que ce ‘DanielGate’ commence à faire le tour de toute la presse internationale. Et face au silence des autorités, qui tentent tant bien que mal d’endiguer le flot de protestations généré par la nouvelle, il s’avère très difficile de trouver un coupable.
 

Daniel Galvan, 64 ans, est arrivé à Kenitra au Maroc en 2005 pour y être professeur d’université. Ses voisins l’appréciaient, il organisait aimablement des fêtes d’anniversaire pour leurs enfants quand les familles n’avaient pas beaucoup de moyens.
 

Sauf qu’en 2011, il est accusé d’avoir abusé sexuellement de 11 garçons et filles entre 4 et 15 ans, ainsi que d’en avoir filmé plusieurs dans les positions obscènes. Le pédophile est condamné à 30 ans de prison, ainsi qu’à verser des amendes aux familles des victimes, maigre consolation après un tel outrage.
 

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L’affaire est pourtant loin d’être finie. Cette semaine, à l’occasion de la Fête du Trône, le roi du Maroc a gracié 1.044 prisonniers, parmi lesquels 48 espagnols. Sur la liste figurait le nom de Daniel Galvan. Etait-ce une erreur, un malentendu, un manque d’information ? Toujours est-il que l’homme, après 2 ans seulement d’incarcération, a été libéré et serait même déjà rentré en Espagne hier.
 

Les réactions ne se sont pas fait attendre : en un rien de temps, les réseaux sociaux s’enflamment, la presse nationale puis internationale gronde, le peuple marocain tout entier proteste à hauts cris. De nombreuses organisations comme l’Association Marocaine pour les Droits de l’Homme (AMDH) ou ‘Touche pas à mon enfant’ ont appelé à une grande manifestation ce soir même à Rabat devant le Parlement.
 

Et en face de cet assourdissant scandale ? Les autorités restent prudemment muettes. Bien évidemment, on cherche un responsable. Est-ce le Ministère de la Justice et des Libertés, via la Direction des Affaires pénales et des Grâces ? Le Palais royal de Rabat ? Le Roi Mohammed VI lui-même, qui est celui de qui émane le pouvoir d’accorder un tel pardon ? Ou bien du roi d’Espagne Juan Carlos 1er, le premier à avoir demandé à son homologue marocain de faire un geste pour les prisonniers espagnols ?
 

L’Espagne est la première à réagir, se dédouanant de toute responsabilité en affirmant n’avoir donné aucune liste de noms au Maroc. Elle explique avoir effectivement fait la demande de grâce aux autorités marocaines, mais en leur laissant le soin de choisir qui en bénéficierait.
Du côté du Maroc, les choses sont moins claires. Mustapha Ramid, ministre de la Justice, a refusé de faire le moindre commentaire, laissant seulement entendre que « l’administration a pour mission d’exécuter ». Remarque qui sous-entendrait que l’élaboration de la liste ne vient pas de ce côté.
 

Pour sa part, le Palais royal n’aurait pas eu connaissance de la présence d’un pédophile sur la liste des graciés. L’information serait sortie au grand jour après le pardon officiel, mardi dernier, c’est-à-dire trop tard.
 

Car il y a une chose à savoir à propos du droit du Roi de gracier des prisonniers : c’est une décision totalement irréversible, quelles que soient les circonstances. Aussi fort que gronde la protestation, les autorités sont donc impuissantes face à cette erreur ineffaçable.
 

Ce qui est certain, c’est que la révolte ne se calmera pas de sitôt. Dès ce soir, nombreux devraient être les manifestants à crier leur indignation sous les fenêtres du Parlement. Une affaire à suivre de près.

 

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