C’est une armée redoutable et anonyme ; quand elle perd des éléments, des renforts arrivent aussitôt ; et jamais elle ne s’arrête. Son champ de bataille ? Twitter, l’un des réseaux sociaux les plus influents du moment. Sa cible ? L’opinion publique du pays, via les internautes. Ses soldats ? Les ‘robots’, ces comptes fantômes qui, dernièrement, se sont démultipliés comme jamais auparavant.
Egalement appelés ‘Twitter bots’ ou ‘œufs’ en raison de l’image par défaut sur Twitter, ce sont des comptes fictifs noyant les internautes sous un flot de messages. Leur but est simple : empêcher la circulation de l’information sur un sujet en particulier en la noyant dans la masse.
Or dernièrement au Maroc, les robots sont devenus fous. Après les aléas qu’a connus le pouvoir marocain, surtout avec l’affaire très gênante de la libération du pédophile espagnol, ces comptes parasites se sont démultipliés de manière exponentielle, noyant le Danielgate sous un flot de messages d’une ampleur jamais observée.
Qui, quoi et comment
Les robots n’ont aucun ami sur Twitter, n’ont parfois même pas de nom, rarement de photo de profil. Coquilles vides, ils déversent continuellement leurs messages pour noyer le poisson.
Les messages, une ligne maximum, ont figure de propagande : dans le cas présent, une phrase en faveur du roi Mohammed VI ou critiquant les manifestations qui ont eu lieu à Casablanca.
« gestion du daniel gate : mohammed6 10/10 » ;
« Monarchie réactive et proche des gens » ;
« le roi a déjà tout arrangé… manif sans importance #Danielgate »
Ces robots sont un des casse-tête de Twitter depuis 2011 au Maroc. Le site peut les supprimer, mais ils ont développé des techniques pour le moins vicieuses : publiant jusqu’à 100 fois le même message en quelques heures, ils modifient un espace entre deux lettres à chaque fois, de sorte à ne pas se faire repérer par le service de détection des spams de Twitter.
Pour lutter contre cette invasion pour le moins encombrante, les internautes se sont mis eux-mêmes en chasse de ces bots clonés à l’infini en les notifiant comme spams. Après quelques notifications, Twitter les supprime.
Malheureusement, cette guerre semble ne jamais aboutir, car rien n’est plus simple pour ceux qui sont derrière les ‘œufs’ de recréer 10 nouveaux comptes quand un seul est supprimé.
La menace fantôme
La question gênante demeure : qui est derrière cette armée de robots ? Car il faut bien quelqu’un pour gérer ces comptes ; seulement, remonter à la source est quasiment impossible. Gouvernement, agence de relations publiques, particuliers… ?
Ce qui est sûr, c’est que leur utilisation poursuit un but précis. En l’occurrence, leur intervention semble vouloir servir à redorer le blason d’une personne en particulier, qui n’est nulle autre que le roi du pays, Mohammed VI.
Mais le palais royal est-il vraiment derrière tout cela, directement ou indirectement ? Rien ne l’indique de manière avérée, bien que la ‘propagande’ des bots aille clairement dans son sens.
Cependant, le recours à une telle technique de communication – ou de désinformation – est risqué également pour celui qui l’utilise, pour ne pas dire anti-productif. Les messages des ‘œufs’ ne font qu’agacer les internautes, ne trompant personne. Plus grave, la crédibilité du responsable s’en trouve grandement diminuée…
Le Danielgate remontant à un mois déjà, le phénomène a commencé à se calmer, mais il est susceptible de s’enflammer à nouveau au prochain scandale. En attendant, on ne peut qu’être d’accord avec @Afrinomad quand il dit :
« J’espère que les bots qui floodent #Danielgate sont l’initiative privée d’un débile & que personne n’est payé pour aussi mauvaise propagande »
Mais rien n’est moins sûr…