Kenya: l’opposant Raila Odinga se reconnaît « président du peuple »

Afriquinfos
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Nairobi (© Afriquinfos 2018)- L’opposant kényan Raila Odinga a prêté serment mardi comme « président du peuple » malgré sa défaite électorale en 2017, un geste aux conséquences incertaines alors que les autorités avaient averti qu’une telle investiture pourrait constituer à un acte de « trahison ».

Devant des milliers de partisans en délire rassemblés dans le centre de Nairobi, M. Odinga a prêté serment bible en main lors d’une cérémonie aussi courte que chaotique, dont la diffusion par les médias avait été interdite par le gouvernement.

« Moi, Raila Amolo Odinga (…), je prends la fonction de président du peuple de la République du Kenya », a déclaré l’opposant.

« Nous avons tenu notre promesse »

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Odinga, 72 ans, refuse de reconnaître la réélection du président sortant Uhuru Kenyatta en 2017, couplée à des mois de troubles qui ont fait 92 morts, selon des défenseurs des droits de l’Homme, principalement dans la répression de manifestations de l’opposition. M. Odinga estime que la victoire à la présidentielle lui a une nouvelle fois été volée.

L’annonce d’une prestation de serment alternative avait fait craindre des violences, mais les forces de l’ordre ont toutefois gardé leurs distances avec la foule, qui s’est rapidement dispersée une fois la cérémonie achevée.

Le procureur général Githu Muigai avait averti le mois dernier que toute « investiture » équivaudrait à un acte de « trahison », soulevant la possibilité d’une arrestation, à haut risque, de M. Odinga.

Les conséquences de l’investiture de Raila Odinga sont toutefois peu claires, relèvent les observateurs, notamment car l’opposant n’a pas prononcé le même serment que celui prévu par la Constitution pour l’investiture du chef d’Etat. Raila Odinga s’est par exemple proclamé « président du peuple » et non « président ».

Signe d’un possible désaccord au sein de la coalition d’opposition Nasa, plusieurs de ses responsables étaient absents mardi, le plus notable d’entre eux étant le colistier de M. Odinga à l’élection de 2017, Kalonzo Musyoka. Les Kényans étaient appelés en 2017 à choisir leur président, mais cet exercice démocratique s’est assimilé à une véritable saga: un premier vote avait eu lieu le 8 août, remporté par M. Kenyatta, mais le résultat avait été annulé par une décision historique de la Cour suprême et un nouveau scrutin organisé le 26 octobre.

Affirmant que l’élection ne pouvait être crédible, M. Odinga avait boycotté le vote d’octobre. M. Kenyatta l’avait dès lors emporté avec 98% des voix, avant d’être officiellement investi fin novembre. A la veille de l’investiture de M. Odinga, les patrons de presse ont publié un communiqué assurant que le président Kenyatta les avait convoqués pour menacer de « fermer et retirer les licences de tout média qui retransmettrait en direct » la cérémonie.

 

V. A.