Paris (© 2020 Afriquinfos)- Condamné mercredi dernier à Paris à quatre ans de prison, dont deux fermes (pour son implication dans un réseau de corruption destiné à cacher des cas de dopage en Russie) par la 32e chambre du Tribunal correctionnel de Paris, Lamine Diack, ancien chef de l’IAAF (instance dirigeante de l’athlétisme mondial), n’entend pas en rester là.
Lamine Diack, 87 ans, a été condamné à quatre ans de prison dont deux avec sursis et 500.000 euros d’amende (environ 329 millions de FCFA) et cinq ans de prison ont infligés à son fils Papa Massata, pour corruption par la justice française.
Il a été reconnu coupable d’avoir accepté des pots-de-vin d’athlètes soupçonnés de dopage, d’avoir dissimulé leurs résultats de tests et les avoir laissés concourir, y compris aux Jeux olympiques de Londres de 2012.
Le Tribunal a également déclaré Diack coupable d’avoir accepté de l’argent russe pour aider à financer la campagne de Macky Sall lors de l’élection présidentielle sénégalaise de 2012, en échange d’un ralentissement des procédures antidopage.Le verdict requiert aussi une interdiction d’exercer dans le sport à l’ex président de l’IAAF. La juridiction a en outre considéré que pour au moins six athlètes russes, les procédures disciplinaires avaient été retardées et que les sportifs avaient dû payer pour bénéficier d’une «protection totale». La pièce centrale de l’accusation est un virement de 300.000 euros reçu par la marathonienne Lilya Shobukhova, depuis un compte lié à Papa Massata Diack, en guise de remboursement.
Faire appel d’une décision
Ce feuilleton judiciaire est loin d’avoir connu son épilogue vu que Lamine Diack a décidé d’attaquer la décision de la 32è Chambre du Tribunal correctionnel de Paris. C’est Me Simon Ndiaye, un des avocats de Lamine Diack, qui en a fait l’annonce, au sortir du tribunal.
«Nous vous annonçons tout de suite que la défense de Monsieur Diack va faire appel de cette décision. Cette décision est injuste et inhumaine, le tribunal a cherché à faire dans le politiquement correct. Il a voulu se servir de Monsieur Diack comme un bouc-émissaire», a-t-il fulminé devant la presse française. Et cette robe noire d’ajouter : «En lisant cette décision, le tribunal nous a montré qu’il n’a fait qu’épouser, de façon entière, la thèse du parquet. Aucun élément présenté par la défense n’a été écouté. Toutes les thèses du parquet ont été épousées sans retenue».
Me Ndiaye dit d’ailleurs, avoir noté plusieurs incohérences : «Quand on nous dit qu’il y a eu financement de campagne mais dans le même temps, on reconnait qu’on n’a vu aucune trace de ce financement-là», regrette. Le Conseil de L. Diack renforce sa démonstration avec cet autre exemple : «On nous dit qu’il y a abus de confiance et que 15 millions de dollars ont été détournés par le biais de contrats. Mais ceux qui ont signé le contrat n’ont pas été mis en cause. Les bénéficiaires des contrats non plus. Ceux qui travaillent avec Monsieur Diack, il n’y en a aucun qui est poursuivi. Cela est profondément injuste».
Qu’en est-t-il des autres prévenus dans l’affaire ?
L’ancien président de l’IAAF, 1999-2015 et son fils de 55 ans étaient jugés parmi six protagonistes pour avoir permis de retarder, à partir de fin 2011, des procédures disciplinaires à l’encontre d’athlètes russes soupçonnés de dopage sanguin, et dont certains avaient été sacrés aux JO de Londres-2012, avant d’être déchus pour dopage.
Les quatre autres acteurs du procès ont tous été condamnés : l’ancien chef de l’antidopage à l’IAAF, Gabriel Dollé, a écopé de 2 ans avec sursis et 140.000 euros d’amende, tandis que l’avocat Habib Cissé, qui conseillait Lamine Diack, a été condamné à trois ans de prison dont deux avec sursis et 100.000 euros d’amende.
Deux responsables russes jugés par défaut, l’ancien président de la Fédération nationale d’athlétisme Valentin Balakhnitchev et l’ancien entraîneur Alexeï Melnikov ont été condamnés respectivement à trois et deux ans de prison ferme, avec maintien du mandat d’arrêt à leur encontre.
Depuis la Russie, Valentin Balakhnitchev a aussi annoncé son intention de contester le jugement. «Ils m’ont privé de mon droit légal de me défendre, ils ont dit que je ne coopérais pas à l’enquête, ce avec quoi je suis catégoriquement en désaccord», a-t-il dit à l’agence Ria Novosti.
Au total, les six prévenus ont aussi été condamnés à verser 10,6 millions d’euros de dommages et intérêts à l’IAAF sur le volet corruption. Mais Lamine Diack et son fils ont aussi été condamnés pour avoir capté des sommes indues sur des contrats de l’IAAF avec des sponsors. Sur ce volet, ils ont été condamnés à payer 5,2 millions d’euros à la fédération internationale.
Durant le procès Lamine Diack avait concédé avoir donné l’ordre d’étaler les sanctions contre les Russes, une version confirmée par Gabriel Dollé. Mais pour eux, il en allait de la survie financière de l’IAAF, un argument qui n’a pas convaincu le tribunal. «À aucun moment, vous n’avez remis en cause cette décision», a lancé la présidente du Tribunal à Lamine Diack.
Innocente Nice