Algérie : 50 ans après l’indépendance, les relations algéro-françaises ont encore besoin d’un nouvel élan vers la normalisation

Afriquinfos Editeur
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"En dépit de l' essor que connaissent les relations économiques entre l' Algérie et la France, ces derniers ne parviennent pas à aller de l' avant en dégelant leurs relations bilatérales qui nécessitent un nouvel élan et une véritable volonté de part et d' autre", a fait savoir Rabah Refai, un politologue en relations algéro- françaises, dans une interview à Xinhua.

LA RECONNAISSANCE DES CRIMES, ELEMENT DECLENCHEUR DE LA NORMALISATION

La France demeure un partenaire économique important pour l' Algérie. Selon des chiffres officiels,

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l'Hexagone est le premier fournisseur de l' Algérie en 2011, avec un montant de 5,75 milliards d'euros. Aussi, la France est le quatrième client de l' Algérie avec un montant de  4,4 milliards d'euros. Pourtant, contrairement aux liens économiques étroits qu' entretiennent les deux pays, leurs relations politiques sont marquées par les stigmates de la guerre qui a conduit à l'indépendance de l'Algérie.

"Au cours des 50 dernières années du recouvrement de l'indépendance de l'Algérie, les relations bilatérales entre Alger et Paris ont été marquées par une série de questionnements concernant

l'époque coloniale, mais qui restent en suspens. Des sujets qui entravent le processus qui mène vers la normalisation, comme le vœu de l' Algerie qui attend à ce que la France reconnaisse ses crimes coloniaux", a noté l'expert.

En fait, les observateurs estiment que la reconnaissance de la France des crimes perpétrés en Algérie pendant l'ère coloniale sera l' élément déclencheur de cette normalisation tant attendue. Sur cette question, Alger ne cesse de demander à Paris de reconnaître les crimes que la France coloniale avait commis pendant 132 ans d'occupation (1830-1962).

"Si la France reconnaît puis s' excuse pour ses crimes commis en Algérie, les autres questions en suspens, dont  l'indemnisation des victimes algériennes des essais nucléaires effectués par la France dans le désert algérien entre 1957 et 1967 , ainsi que le dossier des archives de l'époque coloniale détenus par la France et que l'Algérie souhaite récupérer, seront aussitôt réglées", a mentionné l'expert.

Les relations bilatérales entre Alger et Paris se sont détériorées au cours de l'ère de l'ex-président français Nicolas Sarkozy (2007-2012), qui a catégoriquement rejeté de présenter des excuses pour les crimes commis par la France coloniale en Algérie. "Je n' ai pas fait la guerre d' Algérie. Je ne suis pas de cette génération sur laquelle pèse l' Histoire. Je viens ici ni pour blesser ni pour m' excuser", a-t-il déclaré lors de sa visite dans ce pays de l'Afrique du nord en 2007.

CONTROVERSE SUR LA LOI INCRIMINANT LE COLONIALISME

Le parlement algérien issu de la sixième législature (2007-2012) n'a pas réussi à trouver un compromis pour adopter une loi proposée en janvier 2010 par un groupe de députés de différents partis politiques visant à incriminer le colonialisme français.

Cette loi, si elle avait été adoptée, constituerait une riposte à la loi du Parlement français datant du 23 février 2005, qui glorifiait la présence française en Algérie, en affirmant que le colonialisme a été un vecteur de civilisation profitable aux peuples.

"Le Parlement précédent était, d'une manière ou d' une autre, en faveur de la France en bloquant le processus d'adoption du projet de loi incriminant le colonialisme français", a noté l'analyste.

"J' en doute que le nouveau parlement élu (à l'issue du scrutin du 10 mai) n' adopte ladite loi tant que l' ancien système et les mêmes personnalités politiques sont toujours en place", a-t-il poursuivi.

Début mars, le Secrétaire général de l'Organisation nationale algérienne des vétérans de la guerre (Organisation Nationale des Moudjahidine, ONM), Saïd Abadou, a déclaré que "Nous souhaitons vivement que le prochain parlement puisse adopter une loi qui incrimine le colonialisme français", ajoutant qu' un tel projet de loi est "un acte patriotique et une réponse à la loi glorifiant le colonialisme, adoptée par le Parlement français en 2005".

VOLONTE ENVERS LA NORMALISATION

Les deux pays ont manifesté leur intention d'aller de l'avant dans la normalisation totale de leurs relations.

Dans un entretien accordé mardi au journal Le Monde, le président algérien Abdelaziz Bouteflika a déclaré que "l'Algérie se réjouit de voir que, malgré certaines vicissitudes et turbulences enregistrées, parfois de manière récurrente, dans la conduite des rapports algéro-français, une nouvelle dynamique marque aujourd'hui les relations bilatérales".

Pourtant, le président Bouteflika n'a fait aucune référence à la demande d' excuses de la France sur la période coloniale.

Quant à l'avenir des relations bilatérales, l'Algérie président a appelé les deux pays à "transcender les difficultés du passé pour donner à notre démarche un ancrage solide qui résiste aux péripéties du temps et aux turbulences de l' Histoire, et ne jamais se détourner de l' objectif prioritaire qui consiste à inscrire le développement de nos relations", a-t-il ajouté.

"Nous avons bon espoir que, dans un avenir très proche, l' Algérie et la France trouveront le moyen de faire en sorte que leurs relations soient hissées, conformément à la volonté exprimée par les plus hautes autorités de deux pays, au niveau souhaité par les deux peuple", a-t-il souligné.

Pendant ce temps, l'arrivée au pouvoir de l'aile gauche française semble donner une autre chance aux deux pays pour atteindre la normalisation tant attendue, estiment dles observateurs.

Au cours de la campagne présidentielle, François Hollande ont rendu hommage aux Algériens tués par la police française à Paris au cours de manifestations du 17 octobre 1961 visant à sauvegarder la guerre d'indépendance en Algérie. Cette initiative est considérée comme un geste positif du nouveau président français pour faire évoluer les relations bilatérales.