Présidentielle sénégalaise : forte affluence des électeurs lors d’une "journée historique"

Afriquinfos Editeur
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Une semaine après quelque 23.000 militaires et paramilitaires, plus de 5 millions d'électeurs civils inscrits sont appelés aux urnes dans 11.904 bureaux de vote pour élire leur futur président pour les sept prochaines années parmi 14 candidats dont le sortant Abdoulaye Wade qui, à près de 86 ans, brigue un troisième mandat consécutif après 2000 et 2007.

Dans la capitale Dakar en particulier, le vote, marqué par une participation massive impressionnante dès les premières heures de la journée, se déroule dans une atmosphère de calme et de discipline où les électeurs manifestent un intérêt considérable pour la gestion des affaires politiques de leur pays.

Arrivée avant 7 heures, soit plus d'une heure avant l'ouverture officielle des opérations à 8 heures locales (même heure GMT), Mme Yaï, enseignante à la retraite, brûlait d'impatience dans un des bureaux de vote du lycée Ngalandou Diouf à Mermoz, un quartier résidentiel au nord de la capitale sénégalaise, où jusqu'à 10 heures les responsables restaient introuvables. "C'est une journée pour que les électeurs expriment leur devoir. L'organisation est défectueuse, parce qu'on devait commencer depuis 8 heures. On n'a pas commencé. Je vote depuis 1974. Je suis venue assez tôt, pour faire la queue comme tout le monde", Mme Yaï, enseignante à la retraite", a confié cette femme âgée à Xinhua. Faye Ndaye, agent de banque de 40 ans, n'a pas voulu manqué le rendez-vous. "Pour moi, c'est une journée vraiment capitale. Je suis sortie de l'hôpital hier et j'ai tenu à venir voter. Parce que je pense qu'il est temps d'apporter le changement dans ce pays et c'est nous les jeunes qui pouvons vraiment apporter ce changement-là".

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Partisane d'Abdoulaye Wade en 2000, la jeune musulmane se déclare volontiers déçue du Sopi, slogan de campagne par lequel à l'époque l'opposant historique avait faut fureur parmi l'électorat sénégalais de tous âges. "J'ai commencé à voter à 2000. En 2007, j'ai voté également et là je reviens encore voter pour une fois". En 2007, a-t-elle justifié, "on avait voté pour qu'Abdou Diouf parte, parce qu'on voulait qu'il parte. On a effectivement voté pour Abdoulaye Wade. En 2007, on a commencé à se rendre compte que ce n'était pas l'homme qu'il nous fallait. Donc en 2007, j'ai voté je ne sais plus qui d'ailleurs". Même opinion pour sa jeune soeur de 26 ans Lara Kamara Ndaye, chercheuse d'emploi. "Comme on dit, c'est le changement, c'est de passer à autre chose, retrouver espoir, parce qu'on a perdu espoir. Les choses ne se passent plus aussi bien qu'avant. On est perdu. On ne sait plus où donner de la tête. La vie est chère, on ne trouve pas de boulot. La santé maintenant coûte cher, tout coûte cher".

Electeurs de tous âges, les bureaux de vote dakarois ont fait foulé dimanche lors d'un scrutin qui, suite à une vague de violences préélectorales observées surtout depuis la validation de la candidature controversée du président sortant le 27 janvier par le Conseil constitutionnel soupçonné partisan par ses adversaires, a été présenté comme étant à hauts risques.

"C'est ma première fois, je suis venu en quelque sorte accomplir mon devoir de citoyen", a avancé Abdoul Aziz, étudiant de 19 ans à la faculté des sciences de l'Université Cheikh Anta Diop de Dakar qui a déclaré attendre du futur président "qu'il s'occupe de la question des jeunes, qu'il crée des emplois et qu'il œuvre pour une bonne ambiance dans le pays".

Pour le jeune électeur, "toutes les conditions d'une bonne élection, transparente et démocratique ne sont pas réunies. Parce que ces temps-ci on note une certaine insécurité dans le pays. Il y a une instabilité. Je ne suis pas contre Wade, mais je trouve qu'il doit partir, parce qu'ile est âgé".

Etudiant de 20 ans de première année de management à l'Institut supérieur de management (ISM) dans la capitale du pays, Youssouf Ibrahima a surtout dénoncé les conditions d'organisation du vote. "Je trouve que c'est vraiment mal organisé". Aucune crainte sur l'issue de l'élection, mais "si le régime de Wade gagne les élections, je pense que le pays va connaître des troubles. Mais, je crois que les Sénégalais sont matures et ils sauront éviter le chaos". Indécis jusqu'au moment de son vote, "aucun candidat, selon lui, n'a vraiment convaincu. Ils étaient là pour faire leurs manifestations, personne n'a déroulé un plan, aucun programme pour dire ce qu'ils comptent faire réellement. On verra, peut-être qu'il y aura un deuxième tour, tout le monde va se décider". Mis à part l'ouverture tardive de beaucoup de bureaux de vote, aucun incident majeur n'a été jusque-là signalé.

En compagnie de son épouse Viviane et son fils Karim, membre influent de son gouvernement, le président Wade a passé plus de 12 heures dans un lycée de la capitale non loin de sa résidence, dans une effervescence débordante mélangeant partisans du pouvoir et ceux de l'opposition.

Pour la plupart, ses principaux adversaires parmi lesquels ses ex-Premiers ministres Idrissa Seck et Moustapha Niasse, l'ex- président de l'Assemblée nationale Macky Sall puis le leader du Parti socialiste Ousmane Tanor Dieng se sont rendus dans leurs différents fiefs à l'intérieur du pays. Ils avaient exigé le retrait de la candidature du chef de l'Etat sortant pour certains et le report du scrutin pour d'autres, mais ce qui est rejeté par le pouvoir. Ce qui a donné lieu à une situation d'impasse laissant craindre des tensions électorales postélectorales plus accrues.