Fort engouement des jeunes pour la présidentielle de dimanche au Sénégal

Afriquinfos Editeur
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Au Sénégal, l'âge de voter est fixé à 18 ans révolus et les 18- 35 ans représentent plus de 30% de la population totale (plus de 12,4 millions d'habitants), d'après les estimations.

Conscients de l'importance de cet électorat et des effets probables des campagnes du mouvement de jeunes "Y'en a marre", qui s'est signalé par des manifestations à Dakar contre la candidature du chef de l'Etat, Wade et ses principaux challengers dont Macky Sall, Ousmane Tanor Dieng, Idrissa Seck, Moustapha Niasse et Cheikh Tidiane Gadio, se sont employés à le séduire.

"L'électorat jeune constitue un grand enjeu, parce qu'il y a beaucoup de jeunes qui se sont inscrits et il y a aussi l'effet du mouvement "Y'en a marre" qui a beaucoup contribué à l'inscription des jeunes de manière massive dans le fichier électorat", a souligné à Xinhua le politologue Abdou Rahmane Thiam.

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"Il y a beaucoup de jeunes qui vont participer au vote cette année et ces jeunes sont d'ailleurs porteurs de ce mouvement de contestation", a ajouté cet enseignant assistant de la faculté des sciences juridiques et politiques de l'Université d'Etat Cheikh Anta Diop de Dakar.

Comme dans bien d'autres pays d'Afrique, cette institution universitaire dont les murs et les environs ont été pris d'assaut par les colleurs d'affiches du pouvoir et de l'opposition, s'est transformée pour la circonstance en un cénacle de discussions entre étudiants, résumant l'état d'esprit de la jeunesse sénégalaise en démonstration de force d'un front anti-Wade.

Plus visible dans les opérations de séduction, Abdoulaye Wade se défend et se présente comme le candidat "qui rassure", annonçant la poursuite du Sopi (changement).

Face à lui, ses ex-Premiers ministres Idrissa Seck et Moustapha Niasse, l'ex-président de l'Assemblée nationale Macky Sall, son ex- ministre des Affaires étrangères Cheikh Tidiane Gadio et le leader du Parti socialiste sénégalais Ousmane Tanor Dieng sont d'attaque pour une alternance démocratique.

Pour la plupart, les jeunes de l'université, interrogés, ne font pas mystère de leurs intentions de vote. Etudiante en première année des sciences économiques, Mame Diarra Sall, 20 ans, confie : "Moi, je suis inscrite sur les listes électorales. J'ai mon mot à dire pour élire mon futur président".

Bien que son choix demeure "personnel", le jeune sénégalaise précise tout de même : "je suis opposée à Wade. C'est avec son gouvernement que la corruption s'est aggravée. La corruption ne va pas avec le développement. Au contraire, c'est une source de sous- développement. En plus, il (Wade) est trop vieux".

Pour Ibrahim Sock, étudiant au département d'anglais, le leader du Sopi (changement) "ne doit pas s'imaginer qu'une victoire lui est possible. Comment va-t-il gagner? C'est même de l'utopie de penser que Wade va gagner les élections".

Abourahmane Diao, 28 ans, master 2 en sciences économiques, est tout aussi catégorique. "S'il n'y a pas de fraude, Wade sera battu dès le premier tour. Les jeunes vont le sanctionner, c'est sûr. Mais s'il passe, il y aura des troubles". En émettant des doutes sur la transparence du scrutin, il affirme: "le fichier (électoral) n'est pas fiable. Il y a des électeurs virtuels et des bureaux de vote fictifs sur les listes".

Partisan de Moustapha Niasse, ancien Premier ministre, porté par une coalition dénommée Benno Siggil Sénégal, Abdourahmane le voit mieux placé que lors de la dernière présidentielle. "En 2007, c'était son parti seulement. Actuellement, il a mobilisé environ 33 partis derrière lui".

Les observateurs pronostiquent plutôt en faveur de Macky Sall, transfuge, au même titre d'ailleurs que Idrissa Seck, du Parti démocratique sénégalais (PDS, au pouvoir). Ousmane Tanor Dieng est aussi crédité d'un vote encourageant.

Partisan du président sortant, Mbaye Wade, 4e année de sciences économiques aussi, refuse d'y croire, clamant que "comparé aux autres présidents africains, Wade est grand. Il a fait beaucoup de choses au niveau africain, comme le NEPAD (Nouveau Partenariat pour le développement de l'Afrique, ndlr) par exemple".

Mais, sans lui laisser le temps d'aller jusqu'au bout de sa pensée, son camarade Amadou Thiam, 26 ans, rétorque aussitôt : " Wade a fait ce qu'il devait faire. Deux mandats, ça suffit".

Commerçant dans le campus, Moussa Dieng, proche de la cinquantaine, s'invite dans le débat pour trancher : "Je ne vais pas voter Wade. Il ne va pas gagner. Mais, quel que soit le résultat, le pays va sombrer dans la violence".