Urgence d’une neutralité carbone pour soutenir le développement économique durable du continent africain

Afriquinfos Editeur 20 Vues
7 Min de Lecture
Bassin du Congo (photo, AFD).

Glasgow (© 2021 Afriquinfos)- Plus de 600 millions de personnes en Afrique n’ont pas accès à l’électricité. La demande en énergie est grandissante mais les infrastructures adéquates peinent à voir le jour. Pourtant, le continent dispose d’un important potentiel non exploité d’énergies renouvelables. Selon l’IRENA (Agence internationale pour les énergies renouvelables), il urge pour le continent d’accélérer la transition énergétique avec le déploiement des énergies renouvelables.

Continuer sur notre trajectoire climatique actuelle pourrait plonger 100 millions de personnes dans l’extrême pauvreté d’ici 2030 (Stephen Hallegatte et al., Shock Waves : Managing the Impacts of Climate Change on Poverty (Washington D.C.: World Bank, 2016). Paradoxalement, l’Afrique est la région la plus exposée aux effets néfastes du changement climatique, bien qu’elle y contribue le moins avec «seulement» 4% des émissions carbone à l’échelle mondiale.

À l’horizon 2030, le besoin de financement annuel des pays en développement pourrait atteindre 140 à 300 milliards de dollars. Selon les conclusions d’un rapport multi-agences coordonnée par l’Organisation météorologique mondiale (OMM) consacré exclusivement au continent africain, la hausse des températures et l’élévation du niveau des mers ainsi que la multiplication des phénomènes météo extrême menacent la santé et le développement socio-économique de l’Afrique.

Face à ce bilan, les énergies renouvelables apparaissent comme une alternative prometteuse pour se diriger vers une neutralité carbone. Cette dernière implique un équilibre entre les émissions de carbone et l’absorption du carbone de l’atmosphère par les puits de carbone. Pour atteindre des émissions nettes nulles, toutes les émissions de gaz à effet de serre dans le monde devraient être compensées par la séquestration du carbone.

Or, l’Afrique, et particulièrement l’Afrique Subsaharienne, dispose d’un fort potentiel en énergies renouvelables estimé à 1475 GW, soit près de dix fois la production totale d’électricité actuelle (selon Vera Songwe, économiste camerounaise).  Selon un rapport de l’Agence internationale de l’énergie, au cours des 26 prochaines années, l’Afrique Subsaharienne commencera à libérer ses «vastes ressources énergétiques renouvelables» et l’énergie solaire sera le moteur de la croissance des énergies renouvelables dans la région. En outre, une grande partie de l’Afrique a un «excellent potentiel solaire», et les régions côtières sont favorables au développement de l’énergie éolienne.

De plus, ces nouvelles économies vertes pourraient grandement participer au développement économique du continent, à commencer par la création d’emplois. La croissance alimentée par la décarbonisation pourrait créer 3,8 millions de nouveaux emplois nets en Afrique au cours des 30 prochaines années, selon le rapport McKinsey & Company «Vers une économie verte en Afrique : Des choix pour un avenir industriel à faible émission de carbone» (2021). En plus de créer de nouveaux emplois, ces nouvelles opportunités vertes pourraient générer des revenus allant jusqu’à 2 milliards de dollars par an d’ici 2030.

Selon un rapport de l’IRENA (2016), certaines actions clé pourraient contribuer à la croissance de l’économie énergétique de l’Afrique. Ceux-ci comprennent notamment un investissement de 450 milliards de dollars dans le secteur électrique de la région, une plus grande coopération sur des projets énergétiques, ainsi qu’une meilleure gestion des ressources et des revenus basés sur l’énergie. Si ces trois suggestions sont prises au sérieux par les investisseurs et les gouvernements africains, l’économie de la région pourrait être stimulée de 30 % supplémentaires en 2040.

Solutions vertes face à des maux mondiaux

C’est dans cette veine que Huawei a décidé d’investir dans le secteur électrique pour proposer son projet ‘Rural Solar Power’ (panneaux solaires hors réseau), avec le Ministère de l’Eau et l’Énergie du Cameroun. Cette initiative a bénéficié à plus de 350 villages et 40.000 ménages, qui ont ainsi pu avoir un accès facilité à des sources d’électricité fiables. En combinant les réseaux ruraux et l’énergie solaire, ce projet Rural Solar Power a permis de créer un écosystème complet comprenant l’agriculture, l’électricité et les applications mobiles. L’objectif final étant d’atteindre une coordination à énergie multiple et de présenter un bilan carbone neutre.

Miser sur l’énergie verte c’est aussi propulser la révolution numérique sur le devant de la scène. La pandémie de COVID-19 a entraîné une croissance rapide de l’utilisation des plateformes et des applications numériques dans tous les secteurs et à tous les niveaux. La digitalisation apparaît alors comme un moyen performant d’assurer la résilience du continent africain face à cette crise tout en créant une économie durable pour ses habitants.

Ces développements sont encore plus pertinents pour le secteur de l’énergie, où la numérisation peut jouer un rôle crucial pour garantir que des millions de personnes qui n’ont pas aujourd’hui accès à l’électricité passent directement aux énergies renouvelables et entrent directement dans un avenir proche qui est déjà décarboné, tout à fait des prix plus bas et sans avoir besoin d’investir dans des infrastructures qui ne sont pas économiquement ou logistiquement viables. En Éthiopie, Huawei a combiné digitalisation et énergie verte pour déployer plus de 400 sites solaires utilisant la solution Advanced Hybrid Power.

L’énergie solaire est utilisée pour approvisionner de l’énergie aux stations de bases assurant la connexion entre les téléphones mobiles et le réseau téléphonique ou le réseau Internet de communication. Cette solution innovante a permis d’économiser plus de 12 millions de litres de carburant diesel par an et a réduit les émissions de carbone de 2,850 de tonnes chaque année.

Pour prendre le tournant stratégique de la neutralité carbone et atteindre le niveau zéro d’ici 2050, trois actions essentielles doivent être appliquées : sensibiliser le public et mener des campagnes d’éducation sur le sujet du changement climatique, débloquer le financement vert, former une main d’œuvre sur les énergies vertes et accélérer la recherche et développement.

Avec une abondance de ressources solaires, éoliennes et géothermiques, les pays africains ont déjà un avantage comparatif dans les énergies renouvelables qu’il ne manque plus qu’à exploiter de manière intelligente et durable.

Afriquinfos