Gabon: Le projet de révision constitutionnelle adopté malgré les cris d’orfraie des opposants 

Afriquinfos Editeur
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Le Président gabonais Ali Bongo le 16 août 2019 à Libreville.

Libreville (© 2020 Afriquinfos)- Très contesté par l’opposition, le projet de révision de la Constitution au Gabon a été voté à une importante majorité à l’Assemblée nationale le jeudi 24 décembre. Le texte, adopté en Conseil des ministres a été approuvé par 120 députés, alors que 15 autres ont voté contre.

En réaction à ce vote parlementaire sur la Constitution, Jean Ping, ex-challenger d’Ali Bongo lors de la présidentielle de 2016, l’a «condamné». «Devant le peuple gabonais et la communauté internationale, je condamne fermement, sans ambages et en bloc, le principe même de cette révision constitutionnelle, qui est pour moi, du point de vue de la crise politique institutionnelle, nulle et non avenue», a-t-il déclaré.

Il réclame notamment la vacance du pouvoir à cause de l’AVC subi il y a 2 ans par le président Ali Bongo Ondimba : «Cette révision est totalement sans objet et contre-productive dans le contexte actuel, car l’attente pressante du peuple gabonais est ouvertement, sinon unanimement, la déclaration de la vacance du pouvoir pour une issue définitive de la crise». Allusion à son bras de fer post-électoral avec le pouvoir gabonais depuis 2016. «La vérité est que désormais Ali Bongo est définitivement inapte et hors course, vérité qui ne peut plus être ni masquée, ni esquivée. Ainsi donc, la vérité des urnes s’impose. Oui ! La vérité des urnes s’est imposée. C’est incontournable !», a-t-il rajouté.

L’opposant Jean Gaspard Ntoutoume Ayi du parti Union nationale et du «Collectif Appel  à agir» est aussi critique sur ce sujet. «Déjà, quand le chef de l’État initie une révision constitutionnelle, qui plus est, qui touche à ses pouvoirs, la moindre des choses, c’est qu’il s’exprime devant la nation pour l’annoncer et pour la justifier. Là, on constate que monsieur Ali Bongo n’est même pas capable de cet exercice», a-t-il dénoncé.

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Ali Bongo «inapte pour diriger le Gabon depuis deux ans»

Jean Gaspard Ntoutoume Ayi estime que depuis deux ans, M. Ali Bongo n’est plus en capacité d’exercer la fonction de chef de l’Etat, en raison de son AVC (Accident vasculaire cérébral). «Et la révision constitutionnelle, qui, de notre point de vue, semble avoir été montée dans son dos, confirme le cynisme, en fait, des responsables de notre pays, qui nous annoncent là, qu’ils sont en train d’écarter monsieur Ali Bongo du pouvoir et de s’organiser pour conserver le pouvoir quand même».

L’opposant estime par ailleurs que la santé d’Ali Bongo est une préoccupation pour sa famille et pour les Gabonais. Et depuis deux ans, le pays est pris en otage, parce qu’ils ne veulent pas admettre que l’état de santé d’Ali Bongo impose la vacance du pouvoir au Gabon.

Sur la question de l’intérim, stipulant qu’en cas de vacance du pouvoir, la gestion du pays reviendra à un collège de trois personnes, à savoir les présidents des deux Chambres et le ministre de la Défense,  M. Ntoutoume Ayi, souligne «qu’en réalité, ce qui est dit dans la modification constitutionnelle, c’est que toutes les décisions qui seront prises par ce triumvirat, devront être validées par la Cour constitutionnelle. Donc en réalité, l’intérimaire, ou le régent du Gabon, désormais, c’est la Cour constitutionnelle. Et l’intérimaire réelle, c’est madame Marie-Madeleine Mborantsuo.

«Ceux qui gouverneront au quotidien sauront à l’avance que, si les décisions qu’ils prennent ne conviennent pas à la Cour, ces décisions ne seront pas validées par elle. En réalité, c’est la Cour qui dirigera», s’est-il offusqué.

Une révision polémique

 Ce projet de loi de la révision de la Constitution porte sur 26 articles de la Constitution et vise entre autres, officiellement, «à combler le vide juridique lié à certains évènements majeurs qui ont impacté le fonctionnement régulier des institutions et des pouvoirs public». La principale modification du texte prévue et largement commentée consiste en l’instauration d’un intérim assuré par trois personnalités en cas de vacance du pouvoir.

Mardi dernier, le porte-parole de la présidence gabonaise, Jessye Ella Ekogha avait souligné que ce texte procède d’une volonté du président de la République de combler les insuffisances du texte existant, en tirant toutes les leçons de ses ennuis de santé qu’il a rencontrés fin 2018.

V. A.