Plusieurs hauts dirigeants de la planète saluent le legs incommensurable de Mgr Tutu

Afriquinfos Editeur
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Washington (© 2021 Afriquinfos)- De toute l’Afrique, passant par les Etats-Unis, et l’Europe, les réactions en hommage se multiplient à l’archevêque anglican sud-africain, icône de la lutte contre l’apartheid et Prix Nobel de la paix, après l’annonce de sa mort, dimanche, à 90 ans.

Des hommages planétaires affluent depuis l’annonce de la mort de Desmond Tutu, prix Nobel de la paix en 1984 et figure de la lutte contre l’apartheid en Afrique du Sud, dimanche 26 décembre. « Mon père est maintenant en paix. Merci Tshezi pour tout ce que tu as été pour notre famille et le monde », a ainsi écrit Naomi Tutu, la fille de Desmond Tutu, sur Twitter.

Le « combat » de Desmond Tutu « pour la fin de l’apartheid et la réconciliation sud-africaine restera dans nos mémoires », a quant à lui salué dimanche le président français, Emmanuel Macron. Mgr Tutu « consacra sa vie aux droits de l’homme et à l’égalité des peuples », rappelle le chef de l’Etat dans un tweet, joignant sa voix au concert international d’hommages rendus à l’ancien archevêque anglican du Cap.

Disant avoir le «cœur brisé», le président américain Joe Biden et son épouse Jill ont estimé dans un communiqué que «l’exemple » de Desmond Tutu «transcende les frontières et trouvera un écho à travers les âges ». Le couple présidentiel a aussi évoqué le « pouvoir du message de justice, d’égalité, de vérité et de réconciliation » porté par l’archevêque anglican.

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Depuis le Royaume-Uni, d’abord, la reine Elizabeth II s’est dite « profondément attristée » par la mort de Mgr Tutu et a salué sa défense «inlassable» des droits de l’homme. « Toute la famille royale se joint à moi pour exprimer notre profonde tristesse à l’annonce de la mort de l’archevêque Desmond Tutu, un homme qui a défendu inlassablement les droits humains en Afrique du Sud et dans le monde entier », a déclaré la souveraine, chef du Commonwealth dont fait partie l’Afrique du Sud, dans un message de condoléances.

Le premier ministre britannique, Boris Johnson, s’est aussi dit « profondément attristé d’apprendre le décès de l’archevêque Desmond Tutu ». «Il a été une figure essentielle de la lutte contre l’apartheid et de la lutte pour la création d’une nouvelle Afrique du Sud. Nous nous souviendrons de lui pour son leadership spirituel et sa bonne humeur irrépressible», a-t-il ajouté.

«Un être humain extraordinaire»

Le président sud-africain, Cyril Ramaphosa, a également exprimé «sa profonde tristesse suite au décès » de ce « patriote sans égal». Sa mort «est un nouveau chapitre de deuil dans l’adieu de notre nation à une génération de Sud-Africains exceptionnels qui nous ont légué une Afrique du Sud libérée».

«Un homme d’une intelligence extraordinaire, intègre et invincible contre les forces de l’apartheid, il était aussi tendre et vulnérable dans sa compassion pour ceux qui avaient souffert (…) sous l’apartheid, et pour les opprimés et les oppresseurs du monde entier». La Fondation Mandela a qualifié sa perte d’«incommensurable» : «C’était un être humain extraordinaire. Un penseur. Un leader. Un berger».

Desmond Tutu «était un ami, un mentor et un phare moral pour moi et pour tant d’autres», a réagi l’ancien président américain Barack Obama. «Esprit universel, l’archevêque Tutu trouvait ses racines dans la lutte pour la liberté et la justice dans son propre pays, mais était également préoccupé par l’injustice où qu’elle se trouve», a encore écrit cet autre Prix Nobel de la paix, sur Twitter.

Le pape François s’est déclaré «attristé» par cette perte. «Conscient du service rendu à l’Evangile par la promotion de l’égalité raciale et de la réconciliation» dans son pays, le souverain pontife « recommande son âme à la miséricorde aimante de Dieu tout-puissant ».

De Moussa Faki à Uhuru Kenyatta, passant par le papa François

Le président du Conseil européen, qui représente les 27 pays de l’Union européenne, Charles Michel, a rendu hommage à «un homme qui a donné sa vie à la liberté avec un engagement profond pour la dignité humaine. Un géant qui s’est dressé contre l’apartheid». Desmond Tutu était «la voix des sans-voix et une source d’inspiration pour des générations du monde entier», a déclaré le secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres.

En Allemagne, le président de la République, Frank-Walter Steinmeier, a salué la mémoire d’un «homme merveilleux» et de «l’un des combattants anti-apartheid et pour la démocratie et les droits humains les plus éminents au monde».

Mgr Tutu était «un homme de foi convaincu du pouvoir de la réconciliation via la justice réparatrice», il était «un berger de la paix», a réagi le président de la Commission de l’Union africaine, Moussa Faki Mahamat.

« Le décès de l’archevêque Desmond Tutu est un coup dur non seulement pour la République d’Afrique du Sud, où il laisse derrière lui une empreinte immense en tant que héros de la lutte contre l’apartheid, mais aussi pour tout le continent africain, où il est profondément respecté et célébré en tant qu’artisan de la paix. », a pour sa part estimé le président de la République du Kenya, Uhuru Kenyatta.

«L’archevêque Tutu a inspiré une génération de dirigeants africains qui ont adopté ses approches non violentes dans la lutte pour la libération», a-t-il encore dit. Pour Bobi Wine, leader de l’opposition ougandaise, «la nouvelle du décès de l’archevêque Desmond Tutu est très triste». «Un géant est tombé. Nous remercions Dieu pour sa vie – une vie bien remplie, véritablement vécue au service de l’humanité», a-t-il écrit sur Twitter.

Le chef spirituel des anglicans et archevêque de Canterbury, Justin Welby, a déclaré : «Dans les yeux de Desmond Tutu, nous avons vu l’amour de Jésus. Dans sa voix, nous avons entendu la compassion de Jésus. Dans son rire, nous avons entendu la joie de Jésus. C’était beau et courageux. Son plus grand amour est maintenant réalisé alors qu’il rencontre son Seigneur face à face».

Le dalaï-lama a salué un «grand homme, qui a vécu une vie pleine de sens», «entièrement dévoué au service de ses frères et sœurs». «L’amitié et le lien spirituel entre nous étaient quelque chose que nous chérissions», a-t-il dit de son vieil ami.

Le «groupe des sages», créé en 2007 par Nelson Mandela et qui rassemble des personnalités publiques travaillant sur les grands problèmes mondiaux, a rendu hommage à l’archevêque, une «inspiration» pour le monde dont «l’engagement pour la paix, l’amour et l’égalité» continuera « d’inspirer les générations futures».

« Les “sages” ont perdu un ami cher, dont le rire contagieux et le sens de l’humour espiègle les ont tous ravis et charmés », a réagi dans un communiqué le groupe qui compte dans ses rangs Ban Ki-moon ou Jimmy Carter, et dont Desmond Tutu a été le premier président.

Ses obsèques auront lieu le samedi 1er janvier au Cap, dans la cathédrale Saint-Georges, son ancienne paroisse. Desmond Tutu était la dernière des grandes figures de la lutte contre l’apartheid, la conscience de l’Afrique du Sud mais aussi un rire espiègle et puissant. Jusqu’à récemment, le prix Nobel de la paix a imposé sa petite silhouette violette et son franc-parler légendaire pour dénoncer les injustices et écorner tous les pouvoirs.

« Nation arc-en-ciel »

Après l’avènement de la démocratie en 1994 et l’élection de son ami Nelson Mandela, Desmond Tutu avait inventé le terme de « Nation arc-en-ciel ». Il a présidé la Commission vérité et réconciliation (TRC) dont il espérait, grâce à la confrontation des bourreaux et des victimes, qu’elle permettrait de tourner la page de la haine raciale.

Né le 7 octobre 1931, Desmond Tutu s’était fait connaître aux pires heures du régime raciste de l’apartheid. Alors prêtre, il organise des marches pacifiques contre la ségrégation et plaide pour des sanctions internationales contre le régime blanc de Pretoria. Sa robe lui a épargné la prison.

Le combat non-violent de Tutu avait été couronné du prix Nobel de la paix en 1984. Après l’apartheid, fidèle à ses engagements, il avait dénoncé les dérives de l’ANC au pouvoir, des errements dans la lutte contre le sida aux scandales de corruption.

La dernière fois que le pays a eu de ses nouvelles, c’était le 1er novembre dernier. Loin des regards, il avait voté aux élections locales 2021.

V. A.