L’éclectique Vera Songwe prive la CEA de sa riche expertise

Afriquinfos Editeur
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Vera Songwe poses for a portrait in Budapest, Hungary on 2017. June 20. Photo: Akos Stiller

Addis-Abeba (© 2022 Afriquinfos)- Après cinq années passées à la tête de la CEA (Commission économique des Nations Unies pour l’Afrique), la Camerounaise Vera Songwe a présenté sa démission du poste de Secrétaire exécutive de cette institution ce 23 août 2022. Un poste qui lui conférait aussi le statut de Secrétaire générale adjointe des Nations Unies.

Cette décision intervient après que la dirigeante a été la cible de critiques, à compter d’octobre 2021. Selon ‘Investir au Cameroun’, tout est parti du soutien de Vera Songwe à la nomination de Matt Hancock au poste de représentant spécial chargé de l’innovation financière et du changement climatique auprès de la CEA. Dans une pétition, 62 personnalités ont exprimé leur indignation face à la nomination de l’ancien Secrétaire d’État britannique à la Santé, contraint à la démission au sein du gouvernement britannique quelques mois plus tôt. Ces universitaires et des travailleurs humanitaires africains considéraient que la débâcle «dépassait la parodie» et portait atteinte à la crédibilité de la CEA et de Vera Songwe.

Il est vrai que l’homme politique britannique avait été filmé par des caméras de sécurité dans son bureau en train de violer les règles gouvernementales de distanciation liées à la pandémie de la Covid-19, en étreignant une assistante avec qui il entretenait une liaison. «La nomination de M. Hancock est une honte et un mépris pour tous les Africains. Cette nomination a été une grave erreur de jugement de la part de Mme Vera Songwe et l’annulation de cette nomination est un sévère blâme pour elle», expliquaient les pétitionnaires.

En effet, après quatre jours de polémiques, le Secrétaire général des Nations unies, Antonio Guterres, avait été contraint d’annuler cette nomination, désavouant ainsi son adjointe, Vera Songwe.

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Un brillant parcours

Vera Songwe avait été nommée le 13 avril 2017 au poste de Secrétaire exécutive de la CEA, en remplacement de l’économiste bissau-guinéen Carlos Lopes. Avant sa nomination aux Nations Unies, elle avait été Directrice des opérations de la Banque mondiale pour des pays de l’Afrique de l’Ouest: Sénégal, Cap-Vert, Gambie, Guinée-Bissau et Mauritanie, entre 2011 et 2015.

Une fois à la tête de la CEA, elle s’est illustrée avec des réformes organisationnelles entreprises au sein de l’institution qui ont permis d’orienter la réflexion sur des sujets macroéconomiques comme l’industrialisation de l’Afrique, l’impact des changements climatiques sur le développement, la résilience de l’Afrique face aux pandémies comme la Covid-19, la participation du secteur privé.

Économiste de formation, Vera Songwe était la 9ème Secrétaire exécutif de la CEA. Elle  avait en bandoulière les «idées pour une Afrique prospère». Elle avait aussi à son actif l’initiative de la Zone de libre-échange continental africaine (Zlecaf) dont elle a défendu la ratification de même que l’idée d’avoir une meilleure compétitivité en Afrique.

Ses priorités étaient également les problématiques liées aux Objectifs de développement durable (ODD), les données statistiques, l’autonomisation économique des jeunes et des femmes, la dette et la viabilité budgétaires.

Dans un éditorial publié le 22 août, l’économiste saluait le travail des Nations unies qui ont contribué à la négociation d’un accord entre la Russie et l’Ukraine visant à débloquer les exportations de céréales depuis les ports de la Mer Noire, et à atténuer une crise alimentaire internationale.

Ses équipes confient que Vera Songwe a redynamisé la CEA pour produire des résultats significatifs qui ont conduit à des politiques révolutionnaires pour le programme de développement de l’Afrique. Entre autres réalisations figurent le Centre numérique d’excellence, une source à la demande de conseils techniques pour les pays sur leur identité numérique et leur économie numérique,  le Fonds à l’appui au leadership de la femme africaine (Awlf) qui est un fonds d’impact qui vise à accélérer la croissance des fonds gérés par des femmes en Afrique.

La désormais ex-patronne de la CEA a été nommée l’une des «100 Africains les plus influents» par Jeune Afrique en 2019 puis désignée, en mars 2020, l’une des «50 femmes les plus puissantes en Afrique» par Forbes.

En 2017, Vera Songwe avait également été classée parmi les «100 Africains les plus influents» par New African Magazine et l’une des «20 jeunes femmes puissantes en Afrique». En 2018, elle a été choisie en outre par ‘l’Institut Choiseul’ pour la politique internationale et la géoéconomie (France) comme l’un de ses «Leaders africains de demain». En 2015, elle avait également été classée parmi les «25 Africains à suivre» par le Financial Times, et en 2014, elle a été classée dans le «Top 10 des femmes chefs d’entreprise en Afrique» par l’African Business Review.

Vignikpo Akpéné