Vers de possibles élections générales anticipées à Maurice

Afriquinfos Editeur
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Ainsi, le dernier Country Report de The Economist Intelligence Unit Limited (EIU) qui s’attarde sur le scandale de rachat d’une clinique privée par le gouvernement mauricien fait état d’un possible retour du pays aux urnes bien avant la fin du mandat de cinq ans.

Pour l’EIU, les prochaines décisions de la Commission anticorruption indépendante (ICAC) par rapport à deux nouvelles enquêtes pourraient également peser dans la balance pour un retour du pays aux urnes plus tôt que prévu.

Pour soutenir son argument, l’EIU cite d’abord la conjoncture économique sur le front international et les éventuelles répercussions sur le plan local. Puis l’organisation européenne avance qu’en faisant cela, le Premier ministre pourrait contrecarrer les efforts de reconstruction de son ancien partenaire démissionnaire, le Mouvement Socialiste Militant (MSM).

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Selon le Think Tank britannique, le MSM a joué une mauvaise carte en démissionnant et donnant l’impression de cautionner la corruption car un de ses ministres avait été inculpé. D’autre part, la démission de son leader Pravind Jugnauth, ancien vice-Premier ministre et ministre des Finances est présentée comme un acte d’irresponsabilité par le Parti travailliste de Navin Ramgoolam.

En débauchant deux anciens députés du MSM, devenus ministres aujourd’hui, Ramgoolam a cru pouvoir obtenir une majorité pour gouverner mais il se retrouve maintenant avec une fronde intérieure de la part des frustrés de son propre parti qui lui reprochent de n’avoir pas nommé d’autres ministres en provenance de leurs rangs. Ainsi, Kalyanee Juggoo, députée de la circonscription N°4 (Port-Louis Nord/Montagne-Longue) mène une fronde contre la direction de son parti et laisse entendre qu’elle décidera bientôt de son avenir politique.

Ce qui donne du grain à moudre au principal parti d’opposition, le Mouvement Militant Mauricien (MMM), et notamment à son leader Paul Bérenger qui a déclarait lors d’une conférence de presse samedi que « le Premier ministre est sur le point de perdre sa majorité à tout moment ». Selon Bérenger, une demi-douzaine d’élus de la majorité gouvernementale serait « soit mal à l’aise, soit très mécontents » et qu’il suffirait que deux ou trois d’ entre eux seulement se dissocient de l’action gouvernementale pour que l’actuelle gouvernement se retrouve minoritaire.

 Ce qui pousse le leader du MMM à demander un rappel aux urnes « d’ici à décembre » dans l’intérêt supérieur du pays. D’autant plus que plusieurs membres du Parti Travailliste de Navin Ramgoolam se retrouvent aujourd’hui cités dans cette affaire de corruption alléguée à propos de la vente d’une clinique privée à l’Etat. Il est reproché au ministre de la Santé de l’époque, Rajesh Jeetah, d’avoir eu des contacts avec le principal propriétaire de la clinique Medpoint avant le lancement de l’appel d’offres qui aurait ainsi « été taillé sur mesure ».

D’autre part, il est désormais connu que le Premier ministre adjoint, Rashid Beebeejaun, serait un des actionnaires minoritaires de cette clinique. Mais, plus grave encore, reste l’allégation selon laquelle c’est le Premier ministre lui-même qui aurait exigé une nouvelle évaluation de la valeur immobilière de Medpoint qui devait subséquemment passée de 75 millions de roupies (2,6 millions US$) à 144 millions de roupies (4,96 millions US$). Cette affirmation qui provient d’un ancien ministre du MSM fait l’objet d’une enquête policière après une plainte du Premier ministre.

Toutefois, jusqu’ici ce dernier n’a pas encore démenti les allégations répétées de son ancien partenaire Pravind Jugnauth et de l’ancien ministre de la Santé, Maya Hanoomanjee à l’effet qu’ils auraient à maintes reprises demander au Premier ministre de na pas aller de l’avant avec de rachat. Devant la tournure des événements, l’ICAC semble perdre de sa superbe et son indépendance est de plus en plus questionnée surtout après le renvoi inexpliqué de la tant attendue déposition de l’ancien ministre des Finances. Ce qui pousse ce dernier à déclarer que cet organisme est à la botte du Premier ministre.

 Pourtant, cet organisme vient d’initier deux nouvelles enquêtes sur deux ministres de l’alliance gouvernementale. Le premier cas concerne la nomination d’un ancien conseiller municipal de la ville de  Curepipe (centre de l’île) en tant qu’Officier de liaison à l’autorité qui s’occupent des petites et moyennes entreprises (SMEDA) avec des salaires rehaussés pour pouvoir bénéficier de privilèges hors taxes.

 À ce stade, l’ICAC essaie de collecter des informations sur les procédures adoptées pour cette nomination par le conseil d’administration de la SMEDA alors que le ministre des Petites et Moyennes entreprises de l’époque, Michaeel Sik Yuen, affirme n’avoir rien à faire avec cette décision.

L’autre dossier traite de la controverse sur le projet immobilier sur la propriété sucrière de Rose-Belle. Le ministre de l’Agro-industrie, Satish Faugoo, maintient qu’il n’est pour rien dans cette affaire où la valeur des terrains aurait été revue à la hausse contre l’avis des hauts fonctionnaires du gouvernement et continue à multiplier ses explications de presse alors que l’ICAC poursuit son enquête.

 Si ces deux nouvelles enquêtes devaient aboutir à l’inculpation des ministres dont les noms sont cités, ils seraient obligés de démissionner ce qui affaiblirait encore plus le gouvernement de Ramgoolam. Dès lors, le rappel aux urnes semble un scénario bien réel pour le Premier ministre qui pourrait  bien ne pas attendre qu’il soit poussé à le faire. D’aucuns estiment qu’il serait encore plus profitable pour lui de ne pas attendre encore plus et de profiter du fait que l’opposition soit encore en ordre dispersé et que le flou sur son ancien partenaire ne s’est pas encore dissipé. La balle reste définitivement dans les pieds de Navin Ramgoolam.