Numérique : le nouveau monde de l’emploi en Afrique

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Washington (© 2023 Afriquinfos)- L’Afrique connaît actuellement une croissance démographique sans précédent, la région subsaharienne devant abriter une population estimée à 2,4 milliards d’habitants d’ici 2050. Dans moins de 30 ans, près de 40 % de la population mondiale de moins de 18 ans sera née sur le continent africain.

Le marché de l’emploi en Afrique est actuellement confronté à des défis, notamment avec seulement 3 millions d’emplois créés chaque année pour 10 à 12 millions de jeunes entrant sur le marché du travail. Il est donc impératif de générer de nouvelles opportunités d’emplois de qualité pour répondre aux besoins et aspirations de ces millions de jeunes qui intègrent le marché de l’emploi, ainsi que pour les travailleurs actuels. Dans ce contexte, une plus large adoption et une utilisation croissante des technologies numériques offre des opportunités de développement économique et de création d’emplois. Grâce à cette transformation numérique, l’Afrique a le potentiel de devenir un acteur clé de l’économie mondiale.

Transition numérique : une promesse vers un marché de l’emploi plus inclusif en Afrique

Le continent connaît actuellement une croissance numérique exponentielle qui joue un rôle actif dans la transformation structurelle de son économie, donnant ainsi les moyens d’impulser un certain nombre de changements positifs. Une étude de l’Union Internationale des Télécommunications (UIT) publiée en 2020 révèle qu’une augmentation de la pénétration du haut débit mobile en Afrique de 10 % entraînerait un gain de 2,5 % du PIB par habitant. Cette digitalisation présente des avantages considérables pour les populations et a le potentiel de générer des externalités positives pour l’économie dans son ensemble, favorisant la création de nouveaux secteurs d’activité et accroissant la productivité des secteurs déjà existant, tels que l’agriculture, la santé et le commerce.

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Dans la région subsaharienne plus précisément, l’introduction de l’Internet haut débit a eu un impact significatif sur les opportunités d’emploi, comme l’ont démontré les Enquêtes Démographiques et de Santé (EDS) et l’Afrobaromètre en 2019. Selon les EDS menées sur un échantillon de huit pays, la probabilité qu’une personne trouve un emploi a augmenté de 6,9%. Parallèlement, l’étude de l’Afrobaromètre réalisée dans neuf pays a quant à elle révélé une augmentation de 13,2% de cette probabilité.

La transformation technologique des économies africaines se présente donc comme une promesse où l’amélioration de la compétitivité et de la productivité vont de pair, permettant de facto de stimuler le marché de l’emploi. Comme le souligne le rapport « Afrique numérique : Transformation technologique pour l’emploi » de la Banque mondiale, l’accès à Internet a un impact hautement positif sur la création d’emplois et la réduction de la pauvreté en Afrique. Ainsi, au Nigeria par exemple, dans les zones connectées depuis trois ans ou plus, la participation à la vie active et l’emploi salarié ont respectivement augmenté de 3 points de pourcentage et de 1 point de pourcentage.

Quelles opportunités pour favoriser l’inclusion et élargir les horizons professionnels ?

Si la digitalisation de l’économie africaine a un potentiel considérable pour stimuler la croissance économique, créer des emplois et réduire la pauvreté, son impact dépendra tout particulièrement des politiques publiques mises en place pour accompagner cette transition. Celle-ci sera conditionnée par l’accès de tout un chacun à une meilleure couverture réseau. Dans ce contexte, les acteurs des secteurs public et privé doivent donc travailler main dans la main pour prendre des mesures permettant de soutenir et d’améliorer le développement d’infrastructures de télécommunication – et de facto, de connectivité.

Au cours de la dernière décennie, l’Afrique a réalisé d’importants progrès en matière de connectivité, passant d’un taux de pénétration d’Internet de seulement 10% à environ 40% de la population actuellement[7]. Cependant, malgré cette croissance, la couverture numérique reste inégale à travers le continent. Pourtant, il est impératif de réduire cette fracture numérique qui empêche les populations d’accéder aux opportunités offertes par les Technologies de l’Information et de la Communication (TIC). Pour surmonter ces obstacles, des mesures doivent être prises pour étendre l’accès à Internet et ainsi améliorer la couverture numérique. Cela nécessite des investissements ciblés dans le déploiement et l’amélioration des infrastructures de télécommunication, notamment dans les régions mal desservies. De plus, des politiques et des réglementations favorables doivent être mises en place pour encourager les investissements dans le secteur des télécommunications et faciliter l’accès aux services numériques abordables.

Former une main-d’œuvre qualifiée aux compétences numériques et encourager l’entrepreneuriat numérique est un second impératif. En effet, la formation d’ingénieurs est un défi majeur pour le continent. Selon l’UNESCO, l’Afrique est le continent qui connaît le plus grand déficit d’ingénieurs au monde, avec seulement 55 000 ingénieurs pour près de 4,3 millions de demandes sur le marché du travail[8]. Le manque de professionnels qualifiés dans le domaine des TIC limite la capacité des entreprises à innover et à se développer, ainsi que leur capacité à créer des emplois. Si le numérique se développe de manière exponentielle, la formation des ingénieurs ne permet pas aujourd’hui de répondre aux besoins croissants des industries africaines en matière de technologies avancées.

Il est donc important pour chaque acteur d’investir massivement dans la formation, d’encourager le développement des compétences ainsi que la rétention des talents sur le continent. Ainsi, nombreux sont ceux qui accordent une priorité absolue à l’éducation, celle-ci étant un pilier de tout développement socio-économique. Des multinationales telles que Google, Orange ou Huawei ont déployé de nombreux programmes de formation, offrant ainsi aux jeunes talents l’opportunité d’acquérir les compétences nécessaires pour intégrer avec succès le marché du travail. L’opérateur français Orange a ainsi lancé sa Digital Academy en Côte d’Ivoire, présentée comme l’école du code de l’Orange Digital Center. A travers celle-ci, l’objectif est de dispenser des formations de haut niveau aux métiers du numérique à des jeunes âgés de 18 à 35 ans et ainsi de garantir que 75% des jeunes disposent d’opportunités professionnelles à l’issue.

Cette ambition est également celle de Huawei, comme en témoigne le lancement de la « ICT Competition » dans la région Northern Africa depuis 2016. Visant à encourager l’apprentissage à travers des concours, ce programme a déjà rassemblé plus de 76 000 étudiants issus de 12 pays de la région. Lors de la 7e édition qui s’est déroulée cette année, six équipes africaines ont été récompensées. Les équipes algériennes se sont tout particulièrement distinguées en remportant le 26 mai 2023, lors de la finale mondiale organisée à Shenzhen, le premier prix dans les catégories « Cloud » et « Network ». Cette victoire témoigne du talent, de la détermination et de la compétence des jeunes entrepreneurs africains. Elle démontre également la capacité de l’Afrique à jouer un rôle majeur sur la scène internationale dans le secteur des nouvelles technologies.

Les multinationales ne sont pas les seules à mettre l’éducation au cœur de leurs actions. De nombreuses start-ups, les EdTech, jouent également un rôle crucial. Parmi celles-ci se démarquent notamment MJangale, une jeune pousse sénégalaise créée en 2016 qui s’est fixée comme objectif de former 10 000 jeunes Africains aux nouvelles technologies. Une autre start-up inspirante est Kabako, basée au Mali, qui vise à démocratiser l’accès aux connaissances dans le domaine des technologies, permettant ainsi aux apprenants de devenir rapidement des professionnels qualifiés. Leur engagement envers la formation des populations, en particulier dans le domaine des nouvelles technologies, s’inscrit dans une politique globale visant à développer les compétences et à favoriser l’accès à l’emploi.

Comme le soulignent ces exemples, le rôle clé des start-ups dans le développement de solutions innovantes et dans la croissance socio-économique du continent n’est plus à démontrer. Consciente de leur réel potentiel en termes de création d’emplois et d’impact, Huawei a lancé le Huawei Cloud Startup program dans la région Northern Africa à l’été 2022. Développé en collaboration avec plus de 15 partenaires locaux, issus de différents secteurs – publics et privés -, l’objectif de celui-ci est de participer activement à la construction de ce nouvel écosystème qui se développe. Plus de 700 jeunes pousses s’y sont inscrites en 2022, témoignant ainsi de la demande entrepreneuriale croissante sur le continent. L’ambition étant de soutenir 300 start-ups parmi les plus prometteuses au cours des trois prochaines années et ainsi favoriser l’éclosion de futures licornes.

Le numérique peut être un outil puissant pour améliorer la vie des Africains et répondre à l’objectif n°4 de l’Agenda 2063 de l’Union africaine qui vise à créer des économies transformées et créatrices d’emplois. Mais cela ne se fera pas sans un engagement fort de l’ensemble des parties prenantes. L’offre de technologies innovantes et les investissements dans le développement des compétences et des talents africains de la part d’investisseurs internationaux, jouent un rôle majeur dans l’édification de l’Afrique de demain, sur la base d’un avenir numérique durable, inclusif et créateur d’emploi.

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