LAGOS (Afriquinfos 2016) – C’est la conséquence immédiate des dérives sectaires de Boko Haram. Dans le nord-est du Nigeria où le groupe jihadiste a établi ses quartiers, une grave crise humanitaire sévit ! Trois (03) millions de personnes sont en proie à une famine tandis que la mortalité infantile est alarmante…
La situation humanitaire au Nigeria rappelle celle de l’Ethiopie frappée par une grande disette dans les années 80. Mais selon les observateurs, celle que vit actuellement le Nigeria «est la plus grave en Afrique», selon l’Organisation des Nations Unies. Pour d’autres, le nord-est du Nigeria est le remake des conséquences de la guerre de Biaffra (1967-1970) qui a ravagé le pays et au cours de laquelle plus d’un million de Nigérians sont morts à cause de la famine.
«La dernière fois où nous avons été confrontés à des cas aussi graves, c’était pendant la guerre civile», affirme Dr Bamidele Omotola, nutritioniste au Fonds des Nations Unies pour l’Enfance (UNICEF). Dans l’Etat de Borno, fief de Boko Haram, la famine est à son paroxysme. Trois (03) millions de personnes et 250.000 enfants sont menacés de faim. Et si rien n’est fait, 50.000 enfants périront. D’où l’urgence des actions.
«L’urgence absolue, c’est la nourriture. L’aide apportée jusqu’ici est totalement insuffisante et elle n’a pas été coordonnée», plaide Natalie Roberts, Coordinatrice d’urgence de l’ONG française Médecins sans frontières (MSF).
«Dans les camps improvisés où nous nous sommes rendus, nous avons vu très peu d’enfants de moins de cinq ans. Ces enfants sont les plus vulnérables et ce sont eux qui sont les premières victimes. Leur taux de mortalité est extrêmement fort», s’alarme-t-elle. Selon la Coordination d’urgence au MSF, la situation se complique avec le retour «prématuré» des réfugiés. «Ce qui nous inquiète aussi beaucoup, c’est que le gouvernement encourage les réfugiés à rentrer chez eux (ils sont 1,5 million dans la seule ville de Maiduguri, capitale du Borno, NDLR). Mais c’est beaucoup trop dangereux, la situation n’est pas du tout stabilisée. Nous aurons encore plus de difficultés à leur venir en aide», déplore Natalie Roberts.
«Les besoins sont actuellement plus élevés que la capacité de la réponse et nous devons nous assurer que nous avons à la fois l’accès et les ressources pour intensifier notre soutien humanitaire dans les mois à venir », diagnostique Peter Lundberg, le Coordonnateur humanitaire par intérim des Nations unies au Nigeria. En effet, dans la ville de Naga par exemple, où un camp est érigé et qui accueille 80.000 déplacés, la nourriture ainsi que les soins médicaux sont une quête d’eau dans le désert. On relève 2.000 enfants malnutris de moins de cinq (05) ans. Le comble, les moyens d’approvisionnement sont très limités.
Boko Haram, responsable de la grave crise humanitaire
La secte islamiste (qui a proclamé le nord du Nigeria «Califat» en 2014 et prêté allégeance à l’Etat islamique) est pointée du doigt d’être à l’origine de la famine avec ses morts au nord-est du Nigeria. Dans cette partie où Boko Haram a bâti sa base, elle mène la vie dure aux populations qui sont sous son contrôle. Leurs terres et récoltes sont fréquemment la cible des pillages et des assauts des jihadistes. 20.000 personnes sont déjà mortes. Mais, le massacre est loin d’être terminé puisque Boko Haram a disséminé des mines anti-personnelles et contaminé les points d’eau des pauvres populations. A cela s’ajoute l’enlèvement de 200 lycéennes de Chibok parmi lesquelles, une vingtaine a été libérée le mois dernier.
Anani GALLEY