La mort de Kadhafi lève un obstacle mais ne garantit nullement que tout aille sans accroc en Libye

Afriquinfos Editeur
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Selon des experts américains, bien que la mort de Kadhafi signifie la levée d'un important obstacle qui devrait permettre à la Libye d'aller de l'avant, de nombreux défis attendent encore le pays ravagé par la guerre sur son chemin vers la reconstruction et l'établissement d'un gouvernement pleinement opérationnel.

Plus tôt jeudi, de premières informations ont signalé que Kadhafi, qui a tenu les rênes du pays pendant plus de quatre décennies, avait succombé à ses blessures dans les combats à Syrte, sa ville natale.

Ces informations ont été confirmées plus tard par des responsables du Conseil national de transition (CNT) de la Libye, dont le chef du comité exécutif du CNT Mahmoud Jibril, et étayées par des images du cadavre présumé de Kadhafi diffusées par la chaîne de télévision panarabe al-Jazira.

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UN OBSTACLE EST LEVE

"Je pense que l'une des implications importantes de cet événement est que cela ouvre la voie à une Libye beaucoup plus stable", a déclaré Robert Zarate, directeur politique du "Foreign Policy Initiative", un institut de politique étrangère basé à Washington.

"Ils ont un long chemin à parcourir mais ils ont dégagé un important obstacle sur ce chemin", a dit M. Zarate à l'agence Xinhua.

David Pollock, un expert de l'Institut de Washington pour la politique au Proche-Orient, partage ce point de vue. La mort de Kadhafi est une "étape décisive" dans le sens où elle permet d'achever la prise de contrôle du pays par le nouveau gouvernement, a-t-il indiqué à Xinhua.

Des milliers de Libyens ont été tués et de nombreuses infrastructures ont été détruites durant le conflit sanglant de huit mois qui a ravagé le pays depuis que l'OTAN a lancé des opérations militaires visant à renverser l'ancien régime libyen.

C'est pourquoi aujourd'hui, l'annonce du décès de l'ex-dirigeant fait naître des espoirs de stabilité et de progrès, et c'est pourquoi l'on peut voir des images télévisées montrant des foules célébrant et laissant éclater leur joie dans les rues des villes libyennes.

Selon M. Pollock, il devrait désormais être plus facile pour le nouveau gouvernement de "se concentrer sur la reconstruction du pays et l'établissement d'une démocratie fonctionnelle en Libye".

ENCORE DE NOMBREUX DEFIS A RELEVER

Toutefois, personne n'est suffisamment optimiste pour affirmer qu'à partir de maintenant l'avenir de la Libye sera un long fleuve tranquille. En fait, presque tout le monde s'accorde à dire que le pays va être encore confronté à de nombreux défis majeurs.

La liste des tâches à accomplir est longue. Il faudra, entre autres, "réparer les infrastructures gravement endommagées, renflouer à nouveau une trésorerie exsangue, et réconcilier les tribus pro-Kadhafi (dont beaucoup se trouvent dans la partie ouest du pays) et le gouvernement par intérim (dirigé pour une grande part par des responsables venus de l'est du pays)", a indiqué Ted Carpenter, expert à l'Institut Cato.

Selon lui, il est peu probable de voir aboutir à court terme la réalisation de l'une – et encore moins de l'ensemble – de ces tâches essentielles.

M. Pollock a pointé du doigt un autre défi majeur, qui sera celui de trouver un moyen de "créer un gouvernement moderne et stable dans un pays qui a été gouverné par un dictateur imprévisible pendant plus de quatre décennies".

UN NOUVEAU GOUVERNEMENT PRO-OCCIDENTAL ?

De nombreux pays occidentaux, notamment les Etats-Unis, ont fourni un soutien important au CNT dès le début du soulèvement populaire. Lors de sa visite surprise de mardi en Libye, la secrétaire d'Etat américaine Hillary Clinton a réaffirmé que Washington travaillait actuellement sur le transfert de plusieurs milliards de dollars d'avoir libyens, qui avaient été gelés au cours du conflit, au futur gouvernement libyen.

"Du fait qu'il a terriblement besoin de l'aide financière occidentale, le nouveau gouvernement va probablement demeurer raisonnablement amical à l'égard des membres européens de l'OTAN et des Etats-Unis", a estimé M. Carpenter.

M. Pollock a également souligné que le nouveau gouvernement libyen avait tendance à se montrer plus ouvert aux pays qui l'ont aidé à renverser le régime de Kadhafi, notamment les Etats-Unis, la Grande-Bretagne, la France et certains Etats arabes.

Toutefois, les experts prévoient qu'à long terme, l'opinion publique en Libye, comme dans de nombreux pays arabes, aura certainement tendance à être plus réservée envers l'Occident, particulièrement les Etats-Unis.

Selon M. Carpenter, le nouveau gouvernement libyen cherchera à aligner sa politique étrangère avec les grandes puissances du monde arabe, particulièrement l'Arabie saoudite et l'Egypte.