Bazoum critique l’approche de la lutte anti-terroriste au Mali et au Faso

Afriquinfos Editeur
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Niamey (© 2023 Afriquinfos)- D’après le président nigérien Mohamed Bazoum, « armer les civils pour combattre les terroristes est une tragique erreur », estime-t-il, en référence aux volontaires civils engagés au Burkina.

S’exprimant dans un entretien accordé à Jeune Afrique, le dirigeant a déploré  la stratégie de lutte contre les attaques djihadistes dans le Sahel. Et selon lui, le recours au Burkina Faso aux volontaires pour la défense de la patrie, les VDP, n’est pas la bonne stratégie.

Ce n’est pas la première fois que Mohamed Bazoum critique ses voisins. En 2021 par exemple, il avait affirmé qu’il sera très difficile de combattre le groupe djihadiste État islamique au grand Sahara (EIGS) aussi longtemps que « l’État malien n’aura pas exercé la plénitude de sa souveraineté » et ajouté que « la situation actuelle au Mali a un impact direct sur la sécurité intérieure du Niger » des propos qui avaient suscités de vives critiques à Bamako.

« Les VDP ne sont pas la solution » : le président nigérien le dit sans aucune ambiguïté. Selon lui, c’est par expérience que le Niger n’a pas choisi cette option pour mener sa lutte contre le djihadisme. Il assure d’ailleurs avoir mis en garde ses homologues, burkinabè notamment, sur les dangers d’une telle stratégie.

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Selon Mohamed Bazoum, distribuer des armes à des civils pour lutter contre des terroristes les expose à de graves dangers en affrontant des combattants aguerris. Par ailleurs, le président nigérien estime qu’il y a un risque que ces VDP, recrutés et formés à la hâte, commettent des abus et des crimes.

Un point de vue que partage le politologue Mounkaïla Mossi pour qui assurer la sécurité d’un pays est la mission de l’armée et non des milices d’autodéfense.

« Faire la guerre c’est un art. Et c’est confié à l’armée. C’est une erreur d‘impliquer des civils dans une guerre qui est vraiment compliquée, même sur le plan militaire. Pour faire la guerre, il faut aussi une stratégie militaire mais là c’est comme si on exposait les civils. Les violences vont juste s’accentuer (…) Et puis c’est très compliqué ensuite de procéder au désarmement. Vous avez vu l’exemple du Niger avec la création de groupes d’autodéfense, on a des cas pratiques qui montrent que c’est une erreur« , assure-t-il.

La réponse de Ouagadougou à Bazoum

En réaction aux critiques de Mohamed Bazoum sur sa stratégie anti-terroriste, le Burkina Faso a estimé ce samedi 27 mai 2023 que le président nigérien manque de vision, en pensant que des soldats venus de l’Occident vont se sacrifier gratuitement pour sauver son pays. Des informations rapportées par l’Agence d’Information du Burkina (AI B).

« Confier cette guerre à des armées venues des contrées lointaines, c’est avoir une courte vue en pensant que des soldats vont quitter l’Occident et venir se sacrifier de façon désintéressée pour le destin de nos pays. Mais visiblement, le président nigérien a fait l’option de confier son pays et le destin de son combat engagé à des pays étrangers », a déclaré donc le porte-parole du gouvernement burkinabè, Rimtalba Jean Emmanuel Ouédraogo.

« Contrairement au président nigérien, toute la dynamique de la Transition est fondée sur notre conviction intime et profonde que nos vaillantes Forces de défense et de sécurité, que nos vaillants Volontaires pour la défense de la patrie (VDP), soutenus par le peuple burkinabè dans son ensemble et sous le leadership de son Excellence, le capitaine Ibrahim Traoré, vont relever le défi. Nous allons reconquérir notre territoire. Nous allons ramener la paix par nous-mêmes », a ajouté le ministre Rimtalba Jean Emmanuel Ouédraogo.

Aussi, l’autorité burkinabè trouve malheureuse, qu’un chef d’Etat estime que des hordes terroristes sont plus aguerries que « nos armées ».

« Nous avons le plus profond respect pour l’armée nigérienne qui est une armée vaillante, pour le peuple nigérien qui est un peuple vaillant. Nous avons ici la conviction que ce peuple, que cette armée, contrairement à ce que le président nigérien a dit, est capable par lui-même de relever ce défi historique. Mais comme je l’avais dit, tout le problème : c’est le leadership », a soutenu Rimtalba Jean Emmanuel Ouédraogo.

Il pense également que cette interview eu égard au canal utilisé, n’avait d’autres objectifs que de faire plaisir aux pays d’origine des contingents déployés au Niger.

Le 26 avril 2023, le Burkina Faso avait déjà recadré le général nigérien, Mahamadou Tarka dit Abou qui a dénigré la stratégie burkinabè de lutte contre le terrorisme.

V.A.