4ème Conférence scientifique du partenariat mondial du manioc : la lutte contre la striure brune, au cœur des débats

Afriquinfos
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COTONOU (© 2018 Afriquinfos) –Le programme Wave, financé par l’aide au développement britannique et la Fondation Bill et Melinda Gates,  en partenariat avec le Global Cassava Partnership for the 21st Century (GCP21) ont organisé au Bénin du 11 et ce au 15 juin 2018, la quatrième Conférence Scientifique du Partenariat Mondial du Manioc pour le 21ème siècle, axé autour du thème « Transformation du manioc en Afrique ».

Cultivé par 106 pays au monde dont 55% de la production mondiale se fait en Afrique, le manioc reste la base de l’alimentation du Gari au Bénin, attiéké en Côte d’Ivoire, Foufou en RDC, avec le Nigeria qui en est le plus grand producteur au monde avec 55 millions de tonnes en 2017 selon la FAO.

Mais la production est menacée par des maladies virales qui n’affectent pas les hommes, comme la mosaïque africaine, bien connue, et la striure brune qui se répand. D’où la rencontre de Cotonou qui a eu pour objectif de  trouver  un plan d’intervention contre la striure brune, avec l’avis des chercheurs africains de 7 pays qui ont également pris part à la conférence-ci.

En effet, la striure brune du manioc avait disparu et elle a réapparu en Afrique de l’Est il y a une quinzaine d’années. Depuis, elle a gagné l’Afrique Centrale. Elle cause des pertes de 90 à 100 %. Il faut anticiper selon le docteur Justin Pita, directeur exécutif de Wave. « Cette maladie, nous l’appelons dans notre jargon, l’Ebola du manioc », dit le docteur Justin Pita. « Parlons du Nigeria : un pays qui a 180 millions d’habitants, dont 80 % dépendent du manioc pour leur alimentation. Si ce virus arrive au Nigeria, ce sera une catastrophe humanitaire. Si ce virus arrive au Nigeria, ça voudra dire qu’il est au Bénin, au Togo et en Côte d’Ivoire. ». Cela provoquerait une grave crise alimentaire et économique en Afrique de l’ouest, a-t-il également souligné.

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La maladie se transmet par les mouches blanches et surtout par les hommes qui disséminent des boutures infectées. Pour prévenir cette propagation, les chercheurs surveillent le virus et développent des variétés plus résistantes dans les laboratoires de chaque pays membre. « Nous avons déjà identifié quelques variétés qui ne manifestent pas les symptômes de la striure brune. Nous cherchons maintenant à multiplier ces variétés, pour essayer de les distribuer à la population. Cela demande donc de gros moyens », déclare Godefroid Mondé, représentant de Wave en République démocratique du Congo, où l’est du pays est particulièrement touché.

‘’Avoir des plants sains ‘’

Pour Biendi Maganga-Moussavou, ministre de l’Agriculture du Gabon, parmi les actions à mener pour éradiquer le mal, il faut initier et permettre aux agriculteurs d’avoir des plants sains. « Traditionnellement, nous avons des pratiques qui ne sont pas suffisamment réglementées, explique le ministre. Il s’agit de vraiment changer les comportements, donc améliorer la législation, améliorer l’information, éviter que les plants ne se déplacent d’un point à l’autre du pays ou d’un point à l’autre du continent, sans en avoir les autorisations. »

A l’est du Bénin, Sénamé Dossou dirige une coopérative qui cultive et transforme le manioc. Elle regroupe 200 femmes. Il y a 2 ans, elles ont perdu plus de 4 tonnes à cause de la mosaïque africaine, c’est Wave qui les a informées. Pour elle, les dirigeants doivent prendre la nouvelle menace au sérieux. « On n’avait pas connaissance de ça, d’où ça vient, qu’est-ce que ça fait, quelles mesures appropriées on pouvait prendre vis-à-vis de cela. Si [un champ de] ton voisin est déjà attaqué, c’est mieux de prendre à temps des dispositions, pour sécuriser l’alimentation. »

Il faut souligner que le manioc est le premier vivrier africain au sud du Sahara, et nourrit chaque jour environ 350 millions de personnes. C’est le vivrier le moins cher, que peuvent se procurer toutes les couches de la population en vue de la satisfaction de leurs besoins énergétiques.

Xavier-Gilles CARDOZZO