Justice et affaire Dulcie September en France: La famille de l’icône anti-apartheid déçue

Afriquinfos Editeur
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Johannesburg (© 2022 Afriquinfos)- L’affaire Dulcie September, du nom de la militante anti-apartheid assassinée en plein Paris en mars 1988, ne sera pas rouverte. C’est ce qu’a décidé la justice française le 14 décembre 2022, 34 ans après les faits. Une décision qui a fait des déçus en Afrique du Sud.

Déception pour les familles de Dulcie September et bien plus depuis l’annonce de la justice française. Le réalisateur sud-africain, Enver Samuel, un proche de Dulcie September, auteur du documentaire Murder in Paris (Meurtre à Paris) se dit déçu de la décision de la justice française, au micro de notre correspondant à Johannesburg, Romain Chanson.

«Après tout le travail qui a été accompli pour permettre la réouverture du dossier, on espérait obtenir une issue positive. Donc il n’est pas exagéré de dire que nous sommes extrêmement déçus par la décision du tribunal français, de ne pas aller plus loin. On espérait susciter la sympathie du tribunal pour qu’il regarde cette affaire de plus près et alors que la famille n’a toujours pas de réponses».

Mais les proches de la militante ne perdent pas espoir de faire rouvrir l’enquête en Afrique du Sud. C’est l’une des affaires criminelles les plus mystérieuses du temps de l’apartheid. Le 29 mars 1988, deux ans avant la chute du régime raciste en Afrique du Sud, Dulcie September, la représentante en France du parti ANC de Nelson Mandela, est assassinée en plein Paris de six balles dans la tête.

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Aussitôt, tous les regards se tournent vers les commandos de la mort du régime de Pretoria. Mais quatre ans plus tard, en 1992, l’enquête judiciaire française débouche sur un non-lieu et la famille de Dulcie September, qui n’a pas d’enfants, ne forme pas de recours.

En 2019, dans l’espoir de rouvrir l’enquête, la famille de la victime dépose plainte, en plaidant le fait que cet assassinat relève d’un crime d’apartheid, donc d’un crime contre l’humanité, qui est par nature imprescriptible.

Mais mercredi, le tribunal judiciaire de Paris a rejeté cette demande en affirmant qu’il y avait prescription et en relevant le fait qu’une voie de recours avait existé en 1992 et que la famille de la victime ne l’avait pas exploitée. On ne saura donc peut-être jamais qui a tué Dulcie September. Le mois dernier, lors de l’audience devant le tribunal de Paris, l’avocat de sa famille avait dénoncé une «affaire d’État» et «34 ans de déni de justice».

Exilée en France, Dulcie September a été assassinée de plusieurs balles dans la tête au mois de mars 1988 à la porte de son bureau du Xe arrondissement de Paris. Si tous les indices laissent penser à un acte prémédité et professionnel, l’enquête, à l’époque, n’a rien donné. Elle avait débouché sur un non-lieu en juillet 1992.

De forts soupçons pèsent sur le régime sud-africain, qui n’hésitait pas à éliminer ses opposants. Le rôle de la France, aussi, est trouble. Les deux pays entretenaient une relation particulière, sur les plans militaire et énergétique, malgré des accords internationaux rendant illégaux les échanges avec l’Afrique du Sud.

La militante enquêtait justement sur les liens entre ces deux pays. Son rôle était-il trop gênant.

V. A.