Kigali suspend sa coopération au développement avec Bruxelles et l’accuse de ‘politiser leurs relations en s’ingérant dans ses affaires intérieures’

Afriquinfos Editeur
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Olivier Nduhungirehe, ministre rwandais des Affaires étrangères (DR, Twitter Affaires étrangères du Rwanda).

Le Rwanda a annoncé mardi 18 février 2025 la suspension des programmes d’aide au développement belges dans le pays, accusant l’ex-puissance coloniale d’avoir pris fait et cause pour Kinshasa et contre lui dans le conflit en cours dans l’est de la RDC.

La Belgique, ancienne puissance coloniale à la fois de la RDC (ex-Zaïre) et du Rwanda, plaide pour une approche plus ferme contre Kigali et aurait fini par prendre des mesures ici anticipées, a réagi le chef de la diplomatie belge Maxime Prévot. Son pays avait notamment demandé fin janvier 2025 à l’Union Européenne, alors que le M23 et les troupes rwandaises venaient de s’emparer de Goma, grande ville et nœud économique du Nord-Kivu, d’envisager des sanctions.

Un soldat du groupe armé antigouvernemental M23 au milieu de civils au Port de Goma, dans l’est de la République démocratique du Congo, le 18 février 2025.

Dimanche 16 février 2025, le groupe armé et ses alliés se sont emparés de Bukavu, chef-lieu du Sud-Kivu voisin du Nord-Kivu. Kigali a accusé la Belgique d’avoir mené une « campagne agressive, aux côtés de la RDC, visant à saboter l’accès du Rwanda au financement du développement, y compris auprès des institutions multilatérales », a accusé le ministère rwandais des Affaires étrangères dans un communiqué. « Politiser le développement est fondamentalement inacceptable », a ajouté la diplomatie rwandaise en dénonçant des mesures « qui ne peuvent être perçues que comme une ingérence extérieure injustifiée ».

« En conséquence, le Rwanda suspend le reste du programme d’aide bilatérale 2024-2029 avec la Belgique », a-t-elle conclu. Le budget de ce programme bilatéral est de 120 million d’euros selon le site d’Enabel (Agence belge de développement). M. Prévot a indiqué sur X avoir pris « acte » de la décision du Rwanda, soulignant que la Belgique avait de son côté entamé une revue de l’ensemble de son programme bilatéral, qui « aurait débouché sur des mesures relatives à notre coopération que le Rwanda anticipe à présent ».

Interrogé par l’AFP sur une éventuelle rupture des relations diplomatiques entre les deux pays, le ministre rwandais des Affaires étrangères Olivier Nduhungirehe a déclaré : « Nous avons suspendu la coopération au développement. Rien d’autre ». Les appels de la communauté internationale à une désescalade se sont en vain multipliés, sur fond de crainte d’une guerre régionale. L’UE avait annoncé samedi 15 février 2025, après que le Parlement européen a appelé à suspendre un partenariat sur les matières premières avec le Rwanda, examiner « en urgence toutes les options à sa disposition ». Rien n’a été annoncé jusqu’ici.

Kinshasa accuse notamment Kigali de vouloir contrôler l’exploitation et le commerce de minerais – dont le sous-sol de l’est de la RDC est riche – utilisés dans les batteries et les équipements électroniques. Le Rwanda dément, et affirme que sa sécurité est menacée par certains groupes armés présents dans la région, notamment les Forces démocratiques de libération du Rwanda (FDLR), créées par d’anciens responsables hutu du génocide des Tutsi au Rwanda.

Au total, le Rwanda perçoit environ 1,3 milliard de dollars d’aide internationale, un revenu substantiel quand ses derniers budgets annuels avoisinaient les quatre milliards.

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