Mayotte (© 2024 Afriquinfos)- Le passage ravageur et meurtrier du cyclone Chido à Mayotte amplifie un peu plus la situation délétère dans laquelle se trouve le Département français comptant le plus de jeunes, mais aussi le plus pauvre de France.
Les 321.000 habitants de Mayotte risquent de voir leurs conditions de vie s’empirer après le passage de Chido. Le cyclone a fait des centaines morts et d’importants dégâts matériels. Chido laisse un archipel défiguré avec de nombreux problèmes. Le ministre démissionnaire des Outre-mer, François-Noël Buffet, a annoncé l’activation de l’état de calamité naturelle exceptionnelle à Mayotte.
Ce dispositif qui n’a donc jamais été utilisée auparavant doit permettre une «gestion plus rapide et efficace de la crise et faciliter la mise en place de mesures d’urgence». «Face à cette situation exceptionnelle, des moyens exceptionnels doivent être déployés pour rétablir rapidement les services vitaux et mettre en place un plan de reconstruction durable pour Mayotte», défend le ministre.
Sur le terrain, la situation est catastrophique. L’alimentation en eau «fonctionne à 50%», a précisé mercredi 18 décembre 2024 François-Noël Buffet, mais elle présente un risque de « mauvaise qualité ». L’électricité, elle, n’est que « partiellement remise en route ». Les routes, elles, sont majoritairement déblayées. Le système éducatif est aussi très touché: les 221 écoles, 22 collèges et 11 lycées de l’archipel « sont tous impactés. 40% du bâti scolaire est endommagé donc pas utilisable pour l’instant », indique-t-on au ministère de l’Éducation nationale. Quelque 27 établissements accueillent par ailleurs 9.000 sinistrés.
Ce drame vient en effet accentuer la situation peu enviable dans laquelle se trouvait déjà le 101ème Département français. Avec la plus forte démographie et une population dont plus de la moitié est mineure sans perspective d’emplois, Mayotte est le Département français le plus pauvre. En 2022, seuls 30% des 15-64 ans avaient un emploi à Mayotte! Selon l’INSEE (Institut National de la Statistique et des Etudes Economiques), 42% de la population y vit avec moins de 160 euros par mois.
Plus de trois quarts des habitants sont sous le seuil de pauvreté national. Et environ un tiers de l’habitat est « informel », souvent composé de bidonvilles insalubres. Ce sont, en partie, ces bidonvilles qui expliquent le bilan redouté par les autorités. En effet, ces abris de fortune souvent construits avec de la tôle n’ont pas résisté au cyclone et ses rafales à plus de 220 km/h.
Une vie avant et après Chido à Mayotte
Avant Chido, les services sociaux dans l’archipel étaient déjà en décrépitude. Depuis le début d’année, les habitants sont soumis à de sévères restrictions en eau potable. L’eau du robinet était coupée deux jours sur trois. La situation s’est même aggravée en novembre 2024: jusqu’alors coupée pendant 26 heures consécutives tous les deux jours, l’eau du robinet était, avant le passage du cyclone, inaccessible pendant 30 heures, selon le planning publié par la Société mahoraise des eaux (SMAE).
Pour l’heure, avec l’activation de ‘l’état de calamité naturelle exceptionnelle’, les secours devront être déployés et de l’assistance apportée aux populations. Plus de 100 tonnes de vivres devaient être distribuées mercredi 18 décembre 2024, selon le ministre de l’Intérieur démissionnaire Bruno Retailleau.
Les autorités ont lancé un « pont maritime civil » démarré dans la nuit du 18 décembre 2024 avec le départ de quelque 200 conteneurs attendus dimanche 22 décembre 2024 sur l’archipel. Parmi ce chargement, l’équivalent de « millions de litres d’eau ». Grâce à ces envois, « aucune pénurie d’eau en bouteilles n’est prévue », se sont félicitées les autorités. Pendant ce temps, les habitants excédés, indiquent ne rien voir du travail réalisé jusqu’à présent sur le terrain: de la distribution de vivres et d’eau à la « mission de recherche de morts ». De nombreuses voix s’élèvent déjà pour dénoncer la gestion de la crise.
Boniface T.