Le mégabarrage hydroélectrique construit par l’Ethiopie sur le Nil est « maintenant terminé » et sera inauguré en septembre 2025, a annoncé ce 03 juillet le Premier ministre éthiopien Abiy Ahmed, à propos de ce projet source de tensions avec ses voisins, notamment l’Egypte.
Lancé en 2011 pour un montant de 4 milliards de dollars, le Grand barrage de la Renaissance (GERD) est présenté comme le plus grand ouvrage hydroélectrique d’Afrique. Il fait 1,8 kilomètre de large et 145 mètres de haut. Le chantier « est désormais achevé, et nous nous préparons à son inauguration officielle », a déclaré devant le Parlement M. Abiy. Avant d’ajouter: « À nos voisins en aval, l’Égypte et le Soudan, notre message est clair: le barrage de la Renaissance ne constitue pas une menace, mais une opportunité commune ».

« L’énergie et le développement qu’il générera contribueront non seulement à l’essor de l’Éthiopie, mais aussi de toute la région. Le barrage d’Assouan, en Égypte, n’a jamais perdu un seul litre d’eau à cause du GERD », a également martelé le chef de l’exécutif éthiopien. M. Abiy, au pouvoir depuis 2018, a également affirmé que ce développement ne se ferait pas « au détriment de nos frères et soeurs soudanais et égyptiens ».
L’Ethiopie, deuxième pays le plus peuplé du continent avec quelque 130 millions d’habitants et en forte croissance démographique, a des besoins croissants en électricité. Selon la Banque Mondiale, en janvier 2025, quelque 60 millions d’Ethiopiens, soit près de la moitié de la population de ce géant d’Afrique de l’Est, vivaient sans électricité, faute notamment de réseaux. A Guba, sur le site du barrage, plusieurs turbines sur les 13 prévues sont déjà en activité depuis 2022.
– Projet « unilatéral » –
Implanté sur le Nil bleu, à 30 km de la frontière avec le Soudan, le GERD doit atteindre à terme une capacité de production de 5.000 mégawatts (MW), soit le double de celle actuelle de l’Ethiopie. Situés en aval, le Soudan et l’Egypte ont à de nombreuses reprises dénoncé ce projet « unilatéral » d’Addis-Abeba qui menace, selon eux, leur approvisionnement en eau. Pour l’inauguration de l’ouvrage, Abiy Ahmed a confirmé la date de septembre 2025, et invité « les Gouvernements et les peuples d’Égypte, du Soudan et de tous les pays du bassin du Nil à se joindre à nous pour célébrer cette étape historique ».

L’Egypte, qui dépend du Nil pour 97% de ses besoins en eau, notamment pour l’agriculture, continue d’invoquer un droit historique sur le fleuve et d’affirmer que le GERD représente une menace « existentielle ». Le Caire et Khartoum ont demandé à l’Ethiopie de cesser ses opérations de remplissage, en attendant que soit conclu un accord tripartite sur le sujet et sur les modalités de fonctionnement du barrage.
Le 30 juin 2025, à la suite d’une rencontre entre Abdel Fattah al-Burhane, Chef de l’Armée et dirigeant de facto du Soudan, et le Président égyptien Abdel Fattah al-Sisi, les deux pays ont « confirmé leur engagement à renforcer la coordination et l’action conjointe pour garantir leur sécurité hydrique », dans un communiqué.
Les deux pays ont également réitéré « leur rejet de toute mesure unilatérale dans le bassin du Nil Bleu ». Plusieurs tentatives de médiation entre les différents pays au sujet du barrage ont achoppé ces dernières années. Les experts estiment également que l’ouvrage a eu pour conséquence de former autour de l’Egypte un front de voisins hostiles à l’Ethiopie. En octobre 2024, un sommet avait notamment réuni les Présidents érythréen Issaias Afeworki, somalien Hassan Sheikh Mohamud et égyptien Abdel Fattah al-Sisi.
Les relations d’Addis-Abeba se sont depuis réchauffées avec Mogadiscio, mais elles sont toujours à couteaux tirés avec Asmara qui accuse l’Ethiopie, enclavée depuis l’indépendance de l’Erythrée en 1993, de convoiter le port érythréen d’Assab.
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