Le Togo, pays d’Afrique de l’ouest de près de neuf millions d’habitants, organisera samedi 15 février 2025 les premières élections sénatoriales de son histoire, marquant l’avènement de la nouvelle Constitution adoptée le 06 mai 2024 et toujours vivement critiquée par l’Opposition.
La nouvelle Constitution, adoptée par les députés en avril 2024, abolit l’élection du Chef de l’Etat au suffrage universel direct et institue un régime parlementaire. Ainsi, la fonction de Président de la République sera désormais purement honorifique, et l’exercice effectif du pouvoir sera assuré par un Président du Conseil qui doit être le chef du parti majoritaire à l’Assemblée nationale. Il s’agit en l’occurrence de l’actuel Président Faure Gnassingbé, au pouvoir depuis le 03 mai 2005 à la suite de son père resté près de 38 ans à la tête du pays.

Son parti, l’Union pour la République (Unir), a largement remporté les élections législatives d’avril 2024 avec 108 sièges sur 113. L’opposition avait dénoncé un « hold-up électoral », des « fraudes massives » et appelé à la « mobilisation » des Togolais, mais les tentatives de manifestation contre la nouvelle Constitution sont restées lettre morte, les autorités ayant empêché les leaders de l’opposition de se réunir.
Cette nouvelle Constitution est critiquée par l’opposition et la Société civile qui y voient un moyen pour Faure Gnassingbé de se maintenir indéfiniment au pouvoir tandis que l’ancienne Constitution ne lui permettait que de briguer un dernier mandat en 2025. Le camp présidentiel affirme de son côté que ce changement constitutionnel assure plus de représentativité.
« Le Sénat va contribuer à décentraliser le pouvoir public, en renforçant la participation des citoyens des collectivités à l’exercice du pouvoir politique », explique Mazamesso Wella, chercheur en Droit public à l’Université de Lomé, dans un entretien à TVT (chaîne de télévision nationale).
– « Parodie d’élections » –
89 candidats sont en lice pour les 41 sièges de sénateurs lors du scrutin de ce 15 février boycotté par certains grands partis de l’opposition dont l’Alliance nationale pour le changement (ANC), les Forces démocratiques pour la République (FDR) et la Dynamique pour la majorité du peuple (DMP, regroupement de partis politiques et d’organisations de la Société civile).
L’ANC a réitéré mercredi 12 février 2025 « sa décision de non-participation » et « son ferme rejet de ce processus anti-démocratique qui vise à installer une République illégale et illégitime », dans un courrier adressé à la CENI (Commission électorale). Lundi 10 février, les FDR avaient dénoncé « une parodie d’élections sénatoriales » dans un communiqué, estimant que le Sénat sera « une institution budgétivore (…) pendant que nos Communes et Régions manquent cruellement de moyens financiers pour faire face aux besoins vitaux des populations ».
« Les élections sénatoriales sont pipées d’avance parce que le régime (…) a réussi, grâce à des fraudes électorales massives lors des élections communales de 2019 et régionales de 2024, à s’attribuer la quasi-totalité des conseillers municipaux et régionaux qui constituent le corps électoral », ont appuyé les FDR. Le parti Alliance des démocrates pour le développement intégral (ADDI), chef de file de l’opposition, prendra part de son côté au scrutin, comme d’autres petits partis d’opposition.
Les envoyés spéciaux des médias étrangers n’ont pas obtenu d’accréditations pour couvrir ces élections, comme ce fut le cas lors des scrutins législatifs et régionaux d’avril 2024. Une fois le Sénat installé, Faure Gnassingbé pourra être officiellement désigné président du Conseil et les députés et sénateurs éliront un Président de la République sans réelle prérogative.
© Afriquinfos & Agence France-Presse