Togo: Voix du peuple, voix de Dieu (Tribune libre d’un religieux catholique)

Afriquinfos Editeur
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Les Rues de Lomé les 5 et 6 juin (DR-Twitter Nathaniel Olympio)

PARIS (© 2025 Afriquinfos)- Trois cantiques éminemment politiques et  révolutionnaires, expressions des aspirations  de tout un peuple s’entrecroisent.

Celui de Zacharie: ‘’Il a fait surgir la force qui nous sauve dans la maison de David, son serviteur,… » ( Lc 1,69); celui de la Vierge Marie:  » Son amour s’étend d’âge en âge sur ceux qui le craignent; déployant la force de son bras, il disperse les superbes. Il renverse les puissants de leurs trônes, il élève les humbles. Il comble de biens les affamés, renvoie les riches les mains vides…. » (Lc1,50-53).

Vue générale de Lomé (DR, aLome.com)

Et celui du vieux Syméon: « Maintenant, ô Maître souverain, tu peux laisser ton serviteur s’en aller en paix, selon ta parole. Car mes yeux ont vu le salut que tu préparais à la face des peuples: lumière qui se révèle aux nations et donne gloire à ton peuple Israël… » (Lc 2, 29-32).

Ces cantiques sont prophétiques, ils annoncent de façon intemporelle, la fin des règnes, qui au lieu de faire la justice du peuple, font plutôt leur propre justice. On s’en souvient dans l’histoire profane tout comme dans celle biblique; quand les hommes forts, les tout-puissants deviennent des hommes faibles, évincés du pouvoir et se retrouvent dans les mains vindicatives de la justice populaire de la rue.

En ce jour, l’humanité découvre et expose leur fragilité, leur nature humaine ordinaire et leur vulnérabilité.

Cela n’arrive qu’aux autorités qui s’entêtent malgré les douces et calmes motions de l’Esprit Saint qui leur murmure des approches, solutions idoines et pour une sortie pacifique des crises en interne dans leurs pays.

Entre autres cas bibliques comme clichés d’un certain paradigme, c’est le roi Sédécias qui, malgré les admonestations divines par l’intermédiaire du prophète Jérémie, préféra s’entourer de faux prophètes à sa solde jusqu’à la réalisation de l’invasion babylonienne. La répression ne se fait pas attendre. Le roi Sédécias, qui a tenté de s’enfuir par une brèche de la muraille, est capturé près de Jéricho.

Arrêté, il est conduit devant Nabuchodonosor pour être aveuglé, enchaîné et déporté avec le dernier souvenir de la destruction du 1er temple salomonien de Jérusalem. Et jeté au cachot en Babylonie, pendant que ses fils sont mis à mort, comme lui-même mourra plus tard.

De même que les prophètes hébreux de l’époque, tels Jérémie et Ézéchiel, voient dans ces malheurs une punition infligée au peuple hébreu pour avoir désobéi à Dieu, de même des hommes de Dieu joueront un rôle salvifique dans le relèvement des peuples oppressés et opprimés voire embastillés par leurs propres dirigeants.

Comme à Babylone, cependant, les Juifs vont affermir leur religion et regagner en prospérité ce qu’ils ont perdu en liberté, de même les peuples privés de liberté passeront par cette étape de purification.

Ainsi, cinquante ans plus tard, lorsque Cyrus, roi de Perse, conquerra la Babylonie, une partie des Hébreux retournera en Palestine pour bâtir un deuxième Temple, tout en demeurant sous la tutelle des Perses. Avec la chute de Jérusalem, c’en est fini de l’indépendance d’Israël pour… 2500 ans, jusqu’à la résurrection de l’État hébreu au XXe siècle de notre ère (mise à part une brève période d’indépendance sous les Maccabées ou Asmonéens). Telle est l’histoire des peuples.

Vivre à son époque

Les nations peuvent toujours naître des décombres. C’est la résurrection nationale. Tôt ou tard, « le peuple qui marchait dans les ténèbres a vu se lever une grande lumière; et sur les habitants du pays de l’ombre, une lumière a resplendi. Tu as prodigué la joie, tu as fait grandir l’allégresse: ils se réjouissent devant toi, comme on se réjouit de la moisson, comme on exulte au partage du butin… » ( Is 9,1-6).

Alors, en ce jour-là, « l’esprit du Seigneur DIEU est sur moi (Israël ou son messie) parce que le SEIGNEUR m’a consacré par l’onction. Il m’a envoyé annoncer la bonne nouvelle aux humbles, guérir ceux qui ont le cœur brisé, proclamer aux captifs leur délivrance, aux prisonniers leur libération, proclamer une année de bienfaits accordée par le SEIGNEUR, et un jour de vengeance pour notre Dieu, consoler tous ceux qui sont en deuil dans Sion, mettre le diadème sur leur tête au lieu de la cendre, l’huile de joie au lieu du deuil, un habit de fête au lieu d’un esprit abattu… » (Is 61,1-11).

Gardons la foi et luttons car « la foi est une façon de posséder ce que l’on espère, un moyen de connaître des réalités qu’on ne voit pas. Et quand l’Écriture rend témoignage aux anciens, c’est à cause de leur foi. Grâce à la foi, nous comprenons que les mondes ont été formés par une parole de Dieu, et donc ce qui est visible n’a pas son origine dans ce qui apparaît au regard…. » ( Hb 11,1-3).

Quand des hommes forts comme Sédécias, Idi Amin Dada, Samuel Doe, Blaise Comparé, etc. se retrouvent devant leurs fragilités qu’ils repoussaient à cause de la confiance excessive et aveugle en des hommes qui ne peuvent sauver, tirons des leçons de ceux qui font preuve de logique et de bon sens. En quittant le pouvoir au bon moment ou au terme de leurs mandats légaux comme Benoît XVI, Nicéphore Soglo, Ellen Johnson-Sirleaf, George Manneh O. Weah, Nana Akufo-Addo, etc. ils impriment une leçon morale ou de valeur à l’environnement politique africain…

Car, « son amour s’étend d’âge en âge sur ceux qui le craignent. Déployant la force de son bras, il disperse les superbes. Il renverse les puissants de leurs trônes, il élève les humbles. Il comble de biens les affamés, renvoie les riches les mains vides. Il relève Israël, son serviteur, il se souvient de son amour… » (Lc 1, 50-54). Quand les hommes forts deviennent plus faibles que les faibles, ils sont rattrapés par leur illusion, ils sont pitoyables.