Le Tchad a déploré lundi 06 janvier 2025 ‘l’attitude méprisante du Président français’ Emmanuel Macron qui a estimé que les ‘dirigeants africains avaient oublié de dire merci à la France’ dans la lutte contre le terrorisme au Sahel, des propos également condamnés par le Sénégal.
Le Gouvernement tchadien a exprimé sa ‘vive préoccupation suite aux propos tenus récemment par le Président de la République française, Emmanuel Macron, qui reflètent une attitude méprisante à l’égard de l’Afrique et des Africains’, spécifie un communiqué du ministre tchadien des Affaires étrangères Abderaman Koulamallah lu à la télévision d’Etat dans la soirée de ce 06 janvier 2025.
Le Tchad a rompu fin novembre 2024 les accords militaires qui le liaient à l’ancienne puissance coloniale depuis l’indépendance. M. Koulamallah ‘rappelle qu’il n’a aucun problème avec la France mais également que les dirigeants français doivent apprendre à respecter le peuple africain’.
Le Premier ministre sénégalais Ousmane Sonko a quant à lui contesté ce même 06 janvier 2025 que le retrait annoncé des soldats français de son pays aurait donné lieu à des négociations entre Paris et Dakar et s’est inscrit en faux avec virulence contre des propos du Président Emmanuel Macron sur l’engagement militaire français en Afrique. O. Sonko a qualifié sur les réseaux sociaux de ‘totalement erronée l’affirmation selon laquelle le départ annoncé de centaines de soldats français ferait suite à une proposition de la France qui aurait laissé aux pays concernés par une réorganisation de la présence militaire française la primeur d’annoncer de tels retraits’.
La France a eu ‘raison d’intervenir militairement au Sahel contre le terrorisme depuis 2013, mais les dirigeants africains ont oublié de nous dire merci’, avait déclaré ce 06 janvier 2025 le Président Macron, estimant ‘qu’aucun d’entre eux’ ne gèrerait un pays souverain sans cette intervention (de 2013). ‘Ce n’est pas grave, cela viendra avec le temps’, a ironisé le Président français, qui s’exprimait lors de la réunion annuelle des Ambassadeurs de France. Dans son communiqué, Abderaman Koulamallah souligne notamment le ‘rôle déterminant de l’Afrique et du Tchad dans la libération de la France lors des deux guerres mondiales, rôle que la France n’a jamais véritablement reconnu’, ainsi que ‘les sacrifices consentis par les soldats africains’.
‘En 60 ans de présence (…) la contribution française a souvent été limitée à des intérêts stratégiques propres, sans véritable impact durable pour le développement du peuple tchadien’, a encore critiqué Abderaman Koulamallah.
– ‘Véritable indépendance’-
‘Le peuple tchadien aspire à une souveraineté pleine et entière, à une véritable indépendance, et à la construction d’un État fort et autonome’, a ajouté M. Koulamallah. Le Tchad avait annoncé par surprise le 28 novembre 2024 qu’il mettait fin à l’accord militaire entre Paris et N’Djamena, actant la fin de soixante ans de coopération militaire depuis la fin de la colonisation française. Les opérations de retraits de l’Armée française ont débuté en décembre et vont se poursuivre jusqu’à fin janvier 2025. Le Tchad constituait le dernier point d’ancrage de la France au Sahel, avec environ un millier de soldats stationnés, principalement au camp Kossei dans la capitale tchadienne N’Djamena.
Des troupes et des avions de combat français ont été stationnés au Tchad quasiment sans discontinuer depuis l’indépendance en 1960, servant à la formation et l’entraînement des militaires tchadiens. L’ex-puissance coloniale a compté jusqu’à plus de 5.000 militaires au Sahel dans le cadre de l’opération antijihadiste Barkhane, stoppée fin novembre 2022. Entre 2022 et 2023, quatre anciennes colonies françaises, le Niger, le Mali, la Centrafrique et le Burkina Faso, ont enjoint Paris à retirer son Armée de leurs territoires, où elle était historiquement implantée et se sont rapprochées de Moscou.
Le mois dernier, à quelques heures d’intervalle, le Sénégal et le Tchad ont à leur tour annoncé le départ des militaires français de leur sol et officialisé ‘une réorganisation’. En janvier 2025, la Côte d’Ivoire a également annoncé que la base militaire française de Port-Bouet près d’Abidjan serait rétrocédée au pays.
Selon le Président tchadien Mahamat Idriss Déby Itno, au pouvoir depuis avril 2021, ces accords étaient ‘complétement obsolètes face aux réalités politiques et géostratégiques de notre temps’. En mai 2024 se sont achevées à N’Djamena trois années de Transition militaire, avec l’élection contestée de Mahamat Idriss Déby, porté au pouvoir par une junte militaire après la mort de son père Idriss Déby, tué par des rebelles au front en avril 2021.
Menacé par des offensives rebelles, Déby père avait pu compter sur l’appui décisif de l’Armée française pour repousser celles-ci en janvier 2008 puis en 2019.
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