Le Caire (© 2024 Afriquinfos)- Décédé chez lui en Géorgie, ce dimanche 29 décembre, à l’âge de 100 ans, Jimmy Carter, prix Nobel de la paix, restera dans les mémoires (notamment en Egypte) comme un médiateur-clé des conflits internationaux et un défenseur inaliénable des droits de l’Homme. Son plus grand succès en tant que président demeure la signature des accords de paix de Camp David en 1978 réconciliant l’Égypte et Israël.
A l’annonce de son décès, le président égyptien Abdel Fattah al-Sissi a rendu hommage à l’artisan des accords de Camp David de 1978, prélude au premier traité entre Israël et un pays arabe.
« Son rôle important dans la réalisation de l’accord de paix entre l’Egypte et Israël restera gravé dans les annales de l’histoire et son œuvre humanitaire incarne un principe élevé d’amour, de paix et de fraternité« , a écrit le chef de l’Etat égyptien dans un message sur le réseau social X.
L’état de guerre entre l’Egypte et Israël remonte à la guerre israélo-arabe de 1948-1949. En septembre 1978, le président Jimmy Carter parvient à réunir à Camp David le président égyptien Anouar Al Sadate et le premier ministre israélien Menahem Begin. Le 17 septembre deux accords sont conclus. Le traité de paix entre les deux pays sera signé le 26 mars 1979.
Ces accords historiques ont permis à l’Égypte de devenir le premier pays arabe à reconnaître officiellement l’État d’Israël, en échange de la restitution du Sinaï. Des relations diplomatiques sont formellement établies le 21 février 1980 après le traité de paix. L’Égypte dispose d’une ambassade à Tel Aviv et un consulat à Eilat tandis qu’Israël dispose d’une ambassade au Caire et d’un consulat à Alexandrie.
Le président israélien Isaac Herzog a dans cette même veine rendu hommage à l’ancien président américain Jimmy Carter, mettant en avant son rôle crucial dans la médiation des accords de paix de 1978 entre Israël et l’Égypte « Ces dernières années, j’ai eu le plaisir de l’appeler et de le remercier pour ses efforts historiques visant à réunir deux grands dirigeants, Begin et Sadate, et à forger une paix entre Israël et l’Égypte qui reste un pilier de stabilité dans tout le Moyen-Orient et l’Afrique du Nord », a déclaré le président israélien.
Le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahou a également publié un bref message de condoléances « Nous nous souviendrons toujours du rôle du président Carter dans l’établissement du premier traité de paix israélo-arabe », a-t-il écrit sur X.
Le « meilleur ex-président des États-Unis », selon Time Magazine, n’aura cessé d’œuvrer pour la paix. Il a notamment été l’artisan des accords de Camp David en 1978 entre Israël et l’Égypte.
Le jeune Carter avait initialement emprunté le même chemin que son aïeul. En 1953, engagé à cette époque dans la Navy, il avait décidé, à la mort de son père, de tout abandonner pour reprendre l’affaire familiale d’arachides. « Ma plus grande ambition, quand j’étais enfant était d’être utile à la ferme et de plaire à mon père », raconte l’aîné des quatre enfants dans un de ses livres, « An Hour Before Daylight ».
Sa carrière politique débute en 1962, dans l’État de Géorgie. Jimmy Carter se présente à ce poste sous l’étiquette démocrate. Après deux mandats successifs de sénateur, il se tourne vers le poste de gouverneur de l’État mais échoue une première fois en 1966. Il réussira quatre ans plus tard en s’appuyant sur le vote de la classe moyenne, à tendance ségrégationniste. Pourtant, le discours d’investiture du nouveau gouverneur de cet État sudiste ne manque pas de détonner lorsqu’il déclare que « l’époque de la discrimination raciale est bel et bien révolue« .
Rapidement, Carter aspire à la présidence des États-Unis. En 1974, il annonce sa candidature. Dans un premier temps, le candidat démocrate méconnu ne semble pas faire le poids face à des concurrents avertis. Mais les Américains, déçus par une classe politique qui se discrédite avec le scandale du Watergate et s’embourbe dans la guerre du Vietnam, voient dans ce candidat éloigné de Washington un espoir de changement. D’autant que son intelligence, son discours centriste et son éloquence séduisent. Il est nommé candidat lors de la Convention nationale en 1976.
Le 39e président des États-Unis d’Amérique
Carter, qui se présente comme un réformiste étranger aux scandales politiques de Washington, bénéficie durant la campagne d’une large avance sur le républicain Gerald Ford. Mais quelques bourdes, comme sa promesse d’amnistier les déserteurs de la guerre du Vietnam ou encore son interview accordée au magazine Playboy, lui font perdre des points dans les sondages. Carter sort, malgré tout, vainqueur d’une courte tête (50% contre 48%) lors des élections du 2 novembre 1976.
Le 39e président des États-Unis d’Amérique, qui prête serment le 20 janvier 1977 sous le nom de Jimmy Carter, apporte à la Maison Blanche son style simple et austère. Lors de son discours inaugural, il annonce que désormais, les lumières autour des monuments de Washington ne resteront pas allumées en permanence, que le yacht présidentiel sera vendu et appelle les Américains à baisser leur thermostat chez eux.
Durant son mandat, il tente de résoudre le manque de ressources en créant le ministère de l’Énergie et libère les prix du pétrole domestique pour stimuler la production. Il réforme la fonction publique afin d’améliorer l’efficacité du gouvernement et nomme un nombre record de femmes, d’Afro-Américains et d’Hispaniques à des postes gouvernementaux. Mais le président se heurte à plusieurs reprises au Congrès concernant des projets de réforme et n’a également plus la cote auprès des Américains.
Le président se tourne alors vers la politique étrangère, où il s’implique sans relâche. Il impose sa propre marque basée sur la défense des droits de l’Homme dans le monde. Il compte de nombreux succès à son actif, notamment la ratification des traités sur le Canal de Panama en septembre 1977 qui met le canal sous contrôle panaméen ; l’établissement de relations diplomatiques avec la République populaire de Chine en décembre 1978 ; et la négociation du traité sur la limitation des armes nucléaires SALT II (Strategic Arms Limitation Talks) avec l’URSS en juin 1979.
Mais sa plus grande victoire reste incontestablement les accords de paix de Camp David en septembre 1978. Après plusieurs jours de négociations secrètes entre Israël et l’Égypte, le président égyptien Anouar el-Sadate et le Premier ministre israélien Menahem Begin signent, sous l’égide de Jimmy Carter, le premier traité de paix entre Israël et un pays arabe.
Prix Nobel de la paix et « meilleur ex-président des États-Unis »
Le président égyptien Anouar el-Sadate, le président américain Jimmy Carter et le Premier ministre israélien Menahem Begin se sont enfin serré la main après la signature du traité de paix historique entre Israël et l’Égypte au Moyen-Orient, le 26 mars 1979, sur la pelouse nord de la Maison Blanche, à Washington D.C., aux États-Unis.
Critiqué par ses adversaires politiques comme un chef d’Etat naïf, faible et incompétent, Jimmy Carter a su prendre sa revanche en combattant les injustices du monde qu’il avait cru pouvoir changer en gouvernant le pays le plus puissant du monde. Le démocrate a été un homme de conviction, déterminé à suivre son chemin et se montrant indifférent aux critiques. Il connaissait la dure réalité du Sud profond.
En octobre de la même année, il reçoit le prix Nobel de la paix pour sa lutte en faveur de la démocratie et des droits de l’Homme à travers le monde. Il est le troisième président à recevoir ce prix, après Théodore Roosevelt en 1906 et Woodrow Wilson en 1919, mais il est le seul à l’avoir reçu après son mandat de président. Ses efforts pour la paix lui ont, d’ailleurs, valu en 1989 d’être nommé le « meilleur ex-président des États-Unis » par le Time Magazine.
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