Paris (© 2024 Afriquinfos)- Quelques jours après son récent coming-out affichant son homosexualité, qui a ébranlé le Cameroun, pays qui criminalise cette pratique, la fille du Président camerounais revient sur les raisons qui l’ont poussée à faire cette sortie choc.
«J’espère que mon histoire pourra changer la loi », a déclaré avec une conviction palpable la fille du dirigeant camerounais. Pour elle, la visibilité et le soutien des personnes influentes peuvent jouer un rôle crucial dans l’évolution des mentalités et des législations. «Il est temps que le Cameroun et d’autres pays africains reconnaissent les droits humains fondamentaux de tous leurs citoyens, indépendamment de leur orientation sexuelle».
Les défis auxquels elle fait face ne sont pas seulement légaux, mais aussi profondément culturels. Son choix de carrière dans le rap, un genre souvent perçu comme machiste et hétéro-normatif, est déjà en soi un acte de défi. «Il y a plein de gens dans la même situation que moi qui souffrent à cause de ce qu’ils sont», dit la fille du Chef de l’État du Cameroun. «Si je peux leur donner de l’espoir, les aider à se sentir moins seuls, si je peux envoyer de l’amour, j’en suis ravie », s’est-elle exprimé dans une interview accordée à un media français (Le Parisien) ce 9 juillet 2024.
Brenda Biya, 26 ans, dit avoir reçu beaucoup de messages de soutien, mais aussi des réactions très négatives et homophobes, après la révélation de son orientation sexuelle. Son «premier crush pour une fille» remonte à ses 16 ans, «mais j’ai eu du mal à l’accepter», se souvient-elle: «J’étais dans le déni. Je connais les traditions de mon pays et pour moi, c’était inenvisageable».
Première année universitaire, première relation avec une femme. « Je l’ai dit à mes amis camerounais. Avec ma famille, en revanche, on n’en a jamais parlé, assure-t-elle. J’ai toujours eu du mal à rester dans le cadre […] Je suis un peu le mouton noir de ma famille». Sur son histoire avec la Brésilienne de 25 ans, Layyons, un mannequin, elle affirme: « Ça fait huit mois qu’on est ensemble. Je l’ai déjà amenée trois fois au Cameroun, mais sans jamais vraiment dire qui elle était pour moi».
Brenda Biya déclare au Parisien que c’est son frère qui l’a appelée en premier après ce coming-out, en colère, devant ce dévoilement sur les réseaux sociaux sans prévenir sa famille.
«Cela n’engage en rien le Cameroun et le chef de l’État»
L’intéressée estime que ses proches auraient ignoré la conversation, «tourné autour du pot» si elle était venue vers eux. «Dans ma famille, il y a beaucoup de choses dont on ne parle pas». Dans un deuxième temps, ses parents, le Président camerounais et la Première Dame, Chantal Biya, l’appellent: «Ils voulaient que je supprime la publication. Mais […] j’avais déjà sauté le pas. […] Depuis, c’est silence radio», a-t-elle confié au journal « Le Parisien ».
Au Cameroun, pays où Brenda Biya ne réside plus, les rapports sexuels entre personnes de même sexe sont punis de peines allant jusqu’à cinq ans de prison. «Cette loi existait avant que mon père soit au pouvoir. Je la trouve injuste et j’ai l’espoir que mon histoire la fasse changer, lance-t-elle. Les mentalités sont en train d’évoluer au Cameroun, notamment chez la jeune génération. C’est peut-être trop tôt pour qu’elle disparaisse complètement, mais elle pourrait être moins stricte. On pourrait d’abord supprimer la peine de prison».
Comment entrevoit-elle la suite? «Je peux perdre beaucoup: froisser les liens avec ma famille, ne plus avoir le droit d’aller dans mon pays, être mise en prison… Mon souhait le plus cher serait d’avoir une conversation directe et ouverte avec mes parents où on mettrait tout à plat. Mais d’abord, je les laisse digérer».
Commentaire à Yaoundé d’une source gouvernementale chez le confrère RFI: «Cela relève de la vie privée d’une personne majeure résidant hors du pays et n’engage en rien le Cameroun et le Chef de l’État». Brenda Biya, 26 ans, est la fille du Chef de l’État camerounais et de Chantal Biya. Elle a un frère, Paul Biya Junior, et un demi-frère, Franck Biya, issu du premier mariage du Président camerounais avec feue Jeanne-Irène Biya, décédée en 1992.
Sur Instagram, le 30 juin 2024, la fille du Chef de l’État camerounais a posté une photo d’elle embrassant sa compagne, accompagnée d’une déclaration d’amour. Brenda Biya explique au ‘Parisien’ avoir voulu envoyer un «message fort». Le Cameroun reste un pays où l’opinion publique est majoritairement conservatrice sur les questions de genre et de sexualité. Paul Biya et son Gouvernement n’ont montré aucun signe de vouloir modifier les lois anti-LGBTQ+ en place. Cependant, la pression internationale et les appels croissants à la justice et à l’égalité pourraient éventuellement conduire à des réformes. «Mon père a dirigé le Cameroun pendant des décennies. J’espère qu’il pourra voir l’importance de l’évolution sociale avant de quitter le pouvoir», ajoute Brenda.
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