Bras de fer Huawei-USA : Quels impacts technologiques sur l’Afrique ?

Afriquinfos Editeur
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Bras de fer Huawei-USA

Bras de fer Huawei-USA | Démarré l’année dernière suite à des accusations d’espionnage et de proximité avec le Gouvernement chinois proférées par les Etats-Unis et qui ont débouché sur une mise sur liste noire, le bras de fer entre Huawei et les autorités de Washington est loin d’être terminé. Ce début d’année 2020, en pleine crise de la Covid-19, les accusations de l’Administration Trump sont montées un cran au-dessus, en essayant de restreindre la vente de puces électroniques au géant chinois. Une tentative d’embargo contre laquelle la marque chinoise ne compte pas rester les bras croisés. Ce duel entre les deux puissances mondiales est bien évidemment suivi sur le continent africain où Huawei est solidement installé et continue de s’étendre.

 

Jusque-là, tout va bien pour Huawei malgré les sanctions de l’Administration Trump lui interdisant notamment  de collaborer avec des entreprises américaines. Le géant chinois annonçait en 2019, un chiffre d’affaires à la hausse de 24,4% pour les trois premiers trimestres de l’année. Mais la situation pourrait changer si Washington maintenait ou renforçait ses sanctions, s’inquiète-t-on du côté de Shenzhen. C’est visiblement ce qui s’annonce avec une tentative d’embargo sur la fourniture de puces électroniques à Huawei.

 

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Au-delà des entreprises américaines qui ont déjà interdiction de commercer avec l’entreprise de l’Empire du Milieu, l’Administration Trump entend trouver un moyen pour amener d’autres sociétés internationales à faire de même. Ainsi, les fabricants de puces électroniques devront systématiquement demander une licence provenant du gouvernement américain pour utiliser des technologies américaines. Concrètement, cette mesure empêcherait Huawei de fabriquer ses propres SoC mobile, les Kirin, puisque celles-ci sont fabriquées chez TSMC, sous-traitant utilisant des technologies américaines.

Si Donald Trump venait à signer le décret entérinant cette mesure, cela impliquerait que les fabricants de composants électroniques, où qu’ils soient basés dans le monde, devront recevoir une «Licence du gouvernement américain» avant de pouvoir utiliser du matériel d’origine américaine. Sauf que cette énième sanction pourrait se retourner contre les Etats-Unis et ses entreprises.

Huawei a en effet déjà montré sa capacité à contourner les sanctions américaines, notamment en créant HarmonyOS, son système d’exploitation maison, pour remplacer sur ses appareils, le système Android de Google et pourrait dans le même ordre d’idées, mettre en place sa propre chaîne logistique pour concevoir ses puces. Et à partir de là, ce sont les entreprises américaines qui en pâtiront le plus. Les équipements de fabrication de puces électroniques, extrêmement coûteux et spécialisés, sont en effet produits en majorité par des entreprises américaines à l’heure actuelle, comme KLA Corp, Lam Research ou encore Applied Materials. Mais une telle mesure pourrait inciter leurs clients à chercher d’autres fournisseurs plutôt que de voir leur business réguler par un gouvernement étranger…

 

L’Afrique comme solution de repli ?

 

La stratégie américaine est donc claire ; il s’agit d’assécher les sources d’approvisionnement de la marque au lotus à l’international et ainsi stopper la progression du géant asiatique qui malgré les obstacles continue de gagner des parts de marché, notamment en Afrique. L’Afrique qui, devrait devenir l’un des partenaires privilégiés de Huawei face à l’hostilité américaine qui veut aussi pousser ses alliés européens à se passer du matériel de l’équipementier chinois.

Présent en Afrique depuis 1997, Huawei intervient dans la commercialisation de smartphones, la fourniture d’équipements technologiques, la construction de nombreux réseaux de télécommunications et la formation. Ces dernières années, le géant chinois a contribué au déploiement de solutions technologiques à travers tout le continent, mais aussi au développement de secteurs stratégiques comme l’éducation et la formation des jeunes talents, les transports, la santé, le commerce, et bien d’autres. Ce sont des milliards qui sont investis chaque année et cette manne est en constante évolution.

En 2018, alors que la marque au lotus fêtait ses 20 ans de présence en Afrique, elle réaffirmait son engagement à contribuer à l’essor numérique du continent. «Nous sommes déterminés à faire un bond en avant dans le processus de construction d’une Afrique mieux connectée. Huawei poursuivra sa contribution à la croissance du secteur des télécoms en Afrique et à la libération totale du pouvoir des TIC», déclarait alors son Directeur Général, Eric Xu.

 

Aussi, entre crainte supposée d’espionnage et développement de son réseau télécoms, l’Afrique a visiblement fait son choix ! Une confiance réciproque qui s’est confirmée lors de la signature d’un protocole d’accord entre Huawei et l’Union africaine en mai 2019. En effet, il y a clairement un bénéfice direct pour les Africains sur internet et sur les infrastructures. Un autre aspect aussi est le partage des compétences en ingénierie et en télécommunication.

 

Enfin, dans ce contexte de crise sanitaire, Huawei compte également développer de nouveaux modes de travail. Pour mieux faire face au Covid-19 sur le continent, et ses conséquences, le constructeur chinois veut soutenir la dynamique de croissance du continent. Huawei a ainsi annoncé sa décision d’offrir un « système de vidéoconférence et de télétravail sûr et fiable ». Une mesure qui vise à soutenir l’activité économique et les échanges professionnels. Elle a également pour but de venir en aide aux acteurs institutionnels et médicaux. De quoi faire définitivement pencher la balance du côté de Huawei.

Boniface T.