L’Ethiopie accuse Trump d' »incitation à la guerre » après ses propos sur le barrage du Nil

Afriquinfos
4 Min de Lecture

L’Ethiopie a accusé samedi Donald Trump d' »incitation à la guerre » après les déclarations du président américain à propos du méga-barrage éthiopien sur le Nil, suggérant que l’Egypte pourrait le détruire. 

Le ministre éthiopien des Affaires étrangères Gedu Andargachew a convoqué l’ambassadeur américain Michael Raynor, demandant à ce dernier de clarifier les propos de M. Trump sur ce sujet épidermique entre l’Ethiopie et ses voisins d’Egypte et du Soudan, situés en aval du barrage.

« L’incitation à la guerre entre l’Ethiopie et l’Egypte par un président américain en exercice ne reflète ni le partenariat de long terme et l’alliance stratégique entre l’Ethiopie et les Etats-Unis, ni n’est acceptable au regard des lois internationales relatives aux relations entre Etats, » a déclaré M. Gedu dans un communiqué, après sa rencontre avec le diplomate.

L’Ethiopie répondait à des commentaires de Donald Trump sur le Grand barrage de la Renaissance (Gerd), qu’elle termine actuellement de construire sur le Nil.

- Advertisement -

« C’est une situation très dangereuse, car l’Egypte ne sera pas en mesure de vivre de cette façon« , a déclaré vendredi à des journalistes M. Trump, en marge d’une cérémonie dédiée à l’accord de normalisation des relations diplomatiques entre Israël et le Soudan.

« Ils (les Egyptiens) finiront par faire sauter le barrage. Je le dis haut et fort: ils feront sauter ce barrage. Ils doivent faire quelque chose« , a dit le président américain.

Plus tôt samedi, le bureau du Premier ministre Abiy Ahmed avait publié un communiqué défendant le barrage, appelé à devenir le plus grand d’Afrique, soulignant que l’Ethiopie était investie dans les négociations menées sous la médiation de l’Union africaine, qui faisaient « des progrès significatifs« .

« Néanmoins, les menaces belliqueuses ponctuelles visant à faire que l’Ethiopie succombe à des conditions abusives foisonnent toujours. Ces menaces et affronts à la souveraineté éthiopienne sont mal avisés, improductifs, et en claire violation des lois internationales« , dit ce communiqué publié en anglais.

« L’Ethiopie ne cédera à aucune agression d’aucune sorte« , ajoute-t-il.

Dans sa version en amharique, le communiqué utilisait un langage plus musclé.

« Il y a deux faits que le monde a pu constater. Le premier c’est personne n’a jamais vécu en paix après avoir provoqué l’Ethiopie. Le deuxième c’est que si les Ethiopiens s’unissent pour une cause, c’est inévitable, ils vont triompher« , dit ce texte.

« Irresponsable »

L’Egypte, dépendante des eaux du Nil pour environ 97% de son irrigation et de son eau potable, considère le barrage comme une menace « existentielle« .

De son côté, l’Ethiopie le voit comme un jalon essentiel de son électrification et de son développement.

La tentative de Washington de faire office de médiateur dans ce dossier a échoué cette année après que l’Ethiopie a accusé M. Trump, proche du président égyptien Abdel Fattah al-Sissi, de favoriser l’Egypte.

Les Etats-Unis ont annoncé début septembre la suspension d’une partie de leur aide financière à l’Ethiopie après que cette dernière a décidé unilatéralement de remplir le barrage malgré « l’absence de progrès » dans les négociations avec l’Egypte et le Soudan.

Pour de nombreux officiels éthiopiens, Donald Trump est aveuglé par sa relation avec le président égyptien.

« Désolé de le dire mais cet homme n’a aucune idée de ce dont il parle. L’Ethiopie et les Ethiopiens ne seront jamais menacés par une déclaration aussi irresponsable« , a dit samedi sur Twitter l’ancien premier ministre Hailemariam Desalegn.

Josep Borrell, le chef de la diplomatie de l’Union européenne, a de son côté déclaré dans un communiqué qu’un accord était « à portée de main sur le barrage« .

« Maintenant, c’est le moment d’agir, pas d’accroître les tensions« , a-t-il ajouté.