Contestation de l’élection de Tinubu: Le PDP et le Parti travailliste iront devant la Cour Suprême, l’APC serein

Afriquinfos Editeur
6 Min de Lecture
La Commission électorale indépendante nationale enregistre les résultats de la présidentielle au Nigeria sous le regard d'un observateur de l'Union européenne, le 26 février 2023 à Yola.

Une Cour d’appel nigériane a rejeté mercredi 6 septembre toutes les requêtes des partis d’opposition visant à annuler la victoire du Président Bola Ahmed Tinubu lors de l’élection présidentielle contestée de février 2023. Ces partis d’opposition comptent saisir la Cour suprême pour les mêmes requêtes.

Le juge a déclaré que les requêtes de l’opposition « sont par la présente rejetées » et B. Tinubu déclaré vainqueur de l’élection présidentielle. Les cinq juges de la Cour d’appel d’Abuja délibéraient depuis des mois sur une série de poursuites engagées par le principal parti d’opposition, le parti démocratique du peuple (PDP), et le parti travailliste (LP), qui dénoncent fraudes et irrégularités. Le parti travailliste a été débouté de sa requête qui portait sur des accusations de fraudes et d’infractions par les autorités électorales, ainsi que sur des allégations d’inéligibilité de Bola Tinubu.

« Cette requête est déclarée sans fondement« , a indiqué l’un des juges après plus de six heures de lecture détaillée du jugement. Le PDP a également vu sa requête rejetée. La sécurité a été renforcée autour de cette juridiction dans la capitale nigériane, la police et les forces de défense bouclant l’accès au bâtiment avec des barrages routiers le 6 septembre dernier. Aucun tribunal n’a annulé une élection présidentielle depuis le retour du Nigeria à la démocratie après une succession de régimes militaires jusqu’en 1999.

Dans un premier jugement plus tôt mercredi, les cinq juges avaient déjà invalidé la requête d’un petit parti d’opposition (Allied Peoples Movement) qui demandait l’annulation du scrutin. Près de 25 millions de Nigérians ont voté fin février 2023 lors d’un scrutin qui s’est globalement déroulé dans le calme, mais qui a été entaché par des retards dans le décompte des voix et d’importantes défaillances dans le transfert électronique des résultats, conduisant des électeurs et l’opposition à dénoncer des « fraudes massives ».

- Advertisement -

A l’issue du scrutin dans le pays le plus peuplé d’Afrique, le candidat du Congrès des progressistes (APC) et ex-Gouverneur de Lagos, Bola Ahmed Tinubu, 71 ans, a été déclaré vainqueur avec 37% des suffrages. Il a devancé l’ancien vice-président Atiku Abubakar (29%) du PDP, et le candidat travailliste Peter Obi, (25%). L’émergence de cet outsider, favori de la jeunesse, face aux deux principales formations politiques a constitué une première dans l’histoire démocratique du Nigeria.

Par le passé, les élections au Nigeria ont souvent été entachées par des allégations de fraude et des contestations en justice.

– « Pas inquiet » –

Certains électeurs et les partis d’opposition affirment que les défaillances du système lors du téléchargement des résultats ont permis la manipulation des bulletins de vote et des disparités dans les résultats des comptages manuels dans les bureaux de vote. Les observateurs internationaux, notamment ceux de l’Union européenne, ont également relevé des problèmes logistiques majeurs, des électeurs privés de leurs droits et un manque de transparence.

La Commission électorale a, elle, fustigé des accusations « infondées et irresponsables » de l’opposition. Le Gouvernement du Président Tinubu avait affiché sa confiance ces derniers jours. « Parce qu’il a confiance dans le système judiciaire, il croit que le mandat que les Nigérians lui ont librement confié lors de l’élection restera valable« , avait déclaré cette semaine Ajuri Ngelale, porte-parole de la présidence sur Channels TV. « Il n’est pas inquiet, simplement parce qu’il sait qu’il a gagné l’élection« , avait-il ajouté.

Après avoir pris ses fonctions, Bola Tinubu a immédiatement lancé une série de réformes visant à revitaliser l’économie et l’investissement, mais ces initiatives ont entraîné une subite hausse du coût de la vie, suscitant la colère de la population. Le 29 mai, au moment de son investiture, le Président a ainsi supprimé les subventions sur le carburant, ce qui a eu pour effet de quadrupler le prix de l’essence et entraîné une forte hausse des prix des denrées alimentaires. Depuis 2016, le Nigeria subit une sévère crise économique qui s’est aggravée avec la pandémie causée par le coronavirus, puis l’offensive russe en Ukraine.

La monnaie est faible, la dette extérieure énorme et le chômage sévit. Le pays tente aussi de lutter contre des groupes armés pratiquant notamment des kidnappings dans le Nord-Ouest et le centre, de mettre fin à une insurrection islamiste qui opère depuis 14 ans dans le Nord-Est et d’enrayer une agitation séparatiste dans le Sud-Est. Bola Tinubu doit se rendre au sommet du G20 à New Delhi les 9 et 10 septembre, une démarche qui s’inscrit dans l’éventualité d’une candidature du Nigeria pour devenir membre de cette organisation, a annoncé dimanche 3 septembre la présidence.

Des manifestants contestent le résultat de l’élection présidentielle au Nigeria, le 1er mars 2023 à Abuja.