Tunisie: Réactions sur le remaniement ministériel retardé

Afriquinfos Editeur
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Ces réactions de la classe politique tunisienne interviennent au lendemain d'un discours du chef du gouvernement tunisien à travers lequel il a confirmé l'existence de difficultés à trouver un terrain d'entente autour de ce remaniement ministériel.

"En cas de non-approbation par les députés de la Constituante de la proposition du Premier ministre à propos du remaniement ministériel, ça peut conduire à sa démission et à l'aggravation de la crise dans le pays", a prévenu dimanche le président du mouvement "Appel de Tunisie" (opposition) et ex-Premier ministre Béji Caïd Essebsi lors d'un meeting au Palais des Congrès à Tunis.

 "Le processus du remaniement ministériel est arrivé à une impasse d'autant plus qu'il ne pourrait jamais réussir dans l'absence d'un consensus national", a indiqué M. Lazhar Akermi, membre du bureau exécutif de l'Appel de Tunisie. Toujours dans ce sens, le secrétaire général de l'Union populaire républicaine M. Lotfi Mraïhi a estimé que  "le retardement du remaniement ministériel représente un signe d'échec non seulement des ministres mais aussi du chef du gouvernement qui ne dispose pas d'un plan de travail concret".

Certains partis représentés à l'Assemblée constituante tunisienne ont également affiché leur préoccupation quant au retardement de la reconstitution gouvernementale et leur crainte par rapport aux conséquences de la présentation aux députés d'un remaniement proposé par le Premier ministre. "La présentation à l'Assemblée constituante d'une nouvelle composition du gouvernement constitue un vrai embarras", a déclaré l'un des dirigeants du Parti républicain (le mieux représenté à la Constituante parmi les partis de l'opposition) Yassin Brahim, ayant jugé de "décevant" le discours du Premier ministre et sa vision pour la période transitoire.

Deux parmi les trois partis au pouvoir en Tunisie ont réagi suite au report de l'annonce du remaniement gouvernemental et la persistance des divergences de vues en la matière: il s'agit du Congrès pour la République (parti du chef d'Etat) et le Forum démocratique pour le Travail et les Libertés (parti du président de la Constituante). Du côté du Congrès pour la République, il a renouvelé sa demande "inéluctable" qui consiste à effectuer un changement à la tête des deux départements de la Justice et des Affaires étrangères, actuellement dirigés par des ministres appartenant au mouvement islamiste Ennahdha majoritaire au pouvoir.

Quant au Forum démocratique pour le Travail et les Libertés, il a formulé son espoir de voir "la possibilité de parvenir à un consensus sur la nouvelle composition du gouvernement encore évocable", comme l'a rassuré le porte-parole officiel de ce parti. S'agissant du contenu du discours du Premier ministre concernant le remaniement ministériel, un militant du bureau politique du Forum démocratique pour le Travail et les Libertés a affirmé que cinq points défendus par son parti ont été évoqués par le chef du gouvernement à savoir le changement du ministre de la Justice et du chef de la diplomatie, neutralité de l' administration, l'élargissement de la base gouvernementale, une feuille de route urgente et finalement un dialogue national englobant tous les partis politiques du pays. Sur un autre plan, certains partis de l'opposition tunisienne ont même appelé l'actuel Premier ministre à s'écarter du pouvoir à la lumière d'un "désaccord" dans les points de vue et orientations politiques au sein de la Troïka (coalition tripartite au pouvoir).

Il s'agit essentiellement du Front populaire (alliance de gauche) qui a qualifié le remaniement attendu de "décision inutile " d'autant plus que "le pays se plonge dans la dépendance aux conflits internes au sein du mouvement islamiste Ennahdha", a souligné M. Chokri Belaïd, l'un des fondateurs du Front populaire. "Le Premier ministre doit démissionner et on a besoin d'un gouvernement de compétences nationales afin de trouver des solutions urgentes aux problèmes sociaux et économiques du pays". Cette position est semblable à celle de la Pétition populaire (un autre parti opposant représenté à l'Assemblée) qui s'est référenciée à l'échec des concertations engagées par le Premier ministre avec les partis politiques.

Tout récemment en Tunisie, les réactions sur l'utilité, l' efficacité et les effets à court et à moyen termes (à quelques mois des élections prévues cet été 2013) d'un remaniement ministériel ne cessent de prendre de l'ampleur à même de semer, selon l'opposition, un climat de "tension politique" favorable à nourrir une fissure au sein de la coalition tripartite au pouvoir qui a démarré déjà avec l'intention de deux partis de se retirer une fois que le désaccord perdure encore sur certaines questions, principalement la neutralité de certains ministères de souveraineté, la Justice et la diplomatie en l'occurrence.