Tchad/Présidentielle 2024: La Mission d’observation de l’OIF fait des recommandations, Masra conteste les résultats

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N’Djamena (© 2024 Afriquinfos)- Au Tchad, le général Mahamat Idriss Déby Itno a été déclaré jeudi 09 mai vainqueur de la présidentielle du 6 mai 2024, trois ans après avoir pris le pouvoir à la tête d’une junte militaire. Il a été réélu avec 61,03% des voix, selon les résultats officiels provisoires de la Commission électorale qu’il a nommée, mais son Premier ministre Succès Masra lui conteste cette victoire.

A la veille de la proclamation des résultats, la Mission électorale de la Francophonie (MEF), a quant à elle publié son rapport issue de l’élection présidentielle du 6 mai 2024. La mission s’est félicitée de la mobilisation, des conditions convenables et apaisées du déroulement de la campagne électorale, sans violence ni heurts majeurs.  Cependant, elle a noté l’absence de révision du fichier électoral, la non-accréditation d’une grande partie des observateurs nationaux, et la circulation de deux versions différentes de la Constitution et du Code électoral. 

Aussi la mission de la Francophonie a, appelé les parties prenantes à tout mettre en œuvre pour privilégier le dialogue et la concertation et à recourir aux voies légales en cas d’éventuelle contestation électorale. 

Elle a également réitéré la disponibilité de l’Organisation internationale de la Francophonie (OIF) à accompagner les parties prenantes tchadiennes dans la mise en œuvre des recommandations qu’elle formulera à l’issue de l’élection présidentielle, en vue du renforcement de la paix et de la démocratie au Tchad, y compris en anticipation des élections législatives.  

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Les élections du 6 mai 2024 ont recueilli un taux de participation officiellement élevé à 75,89%. M. Déby, 40 ans, a recueilli 61,03% des voix, selon les résultats officiels provisoires de la commission électorale qu’il avait nommée, contre 18,53% à M. Masra, 40 ans aussi. Ces décomptes doivent encore être validés par le Conseil constitutionnel, lequel avait également été nommé par le chef de la junte.

Peu après l’annonce, des militaires ont tiré en l’air à l’arme légère à N’Djamena dans le quartier où siège le parti de M. Masra, de joie mais aussi manifestement pour dissuader les gens de se rassembler, ont rapporté des journalistes de l’AFP. C’était l’inverse près du Palais présidentiel, de nombreux partisans de Déby célébraient sa victoire en criant et chantant et klaxonnant dans leurs voitures, recouvertes du drapeau tchadien pour certaines.

Au moins deux adolescents ont été blessés par des balles qui retombaient, a témoigné un journaliste de l’AFP.

Succès Masra en mode revendication

M. Masra avait revendiqué la victoire avant la proclamation des résultats officiels dans un long discours sur Facebook où il accusait par avance le camp Déby d’avoir truqué les résultats pour annoncer la victoire du général. Invoquant la compilation des comptages des bulletins par ses propres partisans, il a appelé les Tchadiens à « ne pas se laisser voler la victoire » et à la « prouver » en « se mobilisant pacifiquement, mais fermement« . « Je suis désormais le président élu de tous les Tchadiens« , a énoncé M. Déby dans un très bref discours télévisé au ton monocorde, promettant de mettre en œuvre ses « engagements« .

Ce scrutin devait marquer la fin d’une transition militaire de trois ans et nombre d’observateurs l’estimaient joué d’avance en faveur du général, proclamé chef le 20 avril 2021 pour remplacer son père Idriss Déby Itno qui venait d’être tué par des rebelles en se rendant au front, après avoir dirigé d’une main de fer, 30 années durant, ce vaste pays sahélien parmi les plus pauvres du monde.

Le plus farouche pourfendeur de « la dynastie Déby » alors, Succès Masra, s’était finalement rallié à la junte et le général l’avait nommé Premier ministre quatre mois avant le scrutin. Le reste de l’opposition, muselée et violemment réprimée, dans le sang parfois, l’avait accusé d’être un « traître » et d’être candidat à la présidentielle pour « donner un vernis démocratique et pluraliste » à un scrutin joué d’avance pour Déby.

Mais l’économiste Masra a surpris tout le monde en rassemblant des foules considérables durant sa campagne, au point de s’enhardir et se dire capable de l’emporter, sinon de pousser M. Déby jusqu’à un second tour le 22 juin. Trois ans après sa prise du pouvoir en dehors de tout processus constitutionnel, le général Déby a donc fait légitimer sa présidence dans les urnes.

Nombre d’observateurs prédisaient qu’il s’agirait d’une formalité, comme pour son père, officiellement élu et réélu confortablement six fois après son coup d’Etat de 1990. Mercredi, le parti Les Transformateurs de M. Masra a dénoncé des « menaces graves » contre son chef et ses partisans ainsi que « des violences et arrestations arbitraires » visant ces derniers depuis le scrutin.

V. A.