N’Djaména (© 2024 Afriquinfos)- Le chef de la diplomatie française Jean-Noël est, depuis ce 27 novembre, en Afrique noire. Sur le plan de vol du chef de la diplomatie française, pour sa première visite en Afrique subsaharienne depuis sa prise de fonction, figurent le Tchad et ensuite l’Éthiopie.
Au Tchad, Barrot devra notamment se rendre à Adré, ville frontalière avec le Soudan ayant accueilli plusieurs milliers de réfugiés depuis le déclenchement des hostilités entre l’armée soudanaise et les Forces de soutien rapide, le 15 avril 2023.
Barrot devra s’assurer que les engagements de 2 milliards d’euros, annoncés à l’occasion de la conférence de Paris en avril dernier sont bien suivis d’effets
A Addis-Abeba, capitale de l’Ethiopie, le chef de la diplomatie française envisage de s’entretenir avec le président de la Commission de l’Union africaine, Moussa Faki Mahamat, au sujet des crises qui secouent le continent africain.
« Au cœur de nos discussions, la résolution des crises, le traitement des grands enjeux mondiaux, tels que la santé, le climat ou encore le renforcement des institutions multilatérales« , a détaillé Barrot. Que ce soit au Tchad ou en Ethiopie, l’on lit clairement que la France essaie de se montrer proche des préoccupations africaines et qu’elle entend même se présenter comme le défenseur de la cause africaine. Et la question que l’on peut, bien évidemment, se poser, est la suivante : parviendra-t-elle encore à recoller les morceaux après le clash avec certains Etats du continent ?
L’on pourrait en douter et pour cause. D’abord, le développement du sentiment anti-français sur le continent, a atteint des sommets jusque-là inégalés. Il faut le dire, il ne fait plus bon être Français en Afrique et encore moins militaire français et cela, particulièrement dans les pays du Sahel où les populations sont acquises à l’idée que les groupes terroristes qui sèment la mort et la désolation dans la région, bénéficient de la complicité de la France.
Ensuite, la seconde raison qui fait douter d’un nouveau rapprochement entre l’Afrique et la France, est l’apparition sur le continent, de nouveaux concurrents stratégiques qui ne s’encombrent pas de conditionnalités comme le font les puissances occidentales. C’est le cas de la Russie, de la Chine, de la Turquie ou de l’Iran. Face à ces concurrents qui ont le vent en poupe, rien n’est gagné d’avance pour la France qui traine le lourd passé colonial et le poids d’une histoire esclavagiste. Mais peut-elle pour autant assister les bras croisés à l’effondrement de son empire colonial où elle a encore de puissants intérêts économiques et géostratégiques ?
La réponse est, à coup sûr, non. Mais pour avancer dans la défense de ses intérêts, le pays d’Emmanuel Macron doit changer de fusil d’épaule. Et c’est manifestement à cet exercice qu’elle s’essaie. Elle veut regagner le coeur des Africains en se faisant passer pour leur porte-voix mais aussi en réduisant son empreinte militaire permanente sur le continent. Il reste à savoir si cela suffira. Car, comme le dit le proverbe, « chat échaudé craint l’eau froide ».
Les commémorations du 80ème anniversaire des événements de Thiaroye
Le nouveau chef de la diplomatie française se rendra également au Sénégal, un pays qu’il qualifie comme « l’un de nos proches partenaires sur le continent africain », le diplomate français représentera la France, le 1er décembre, dans les commémoration du 80ème anniversaire des événements de Thiaroye. Ce jour-là, en 1944, plusieurs dizaines de tirailleurs sénégalais avaient été tués par l’armée coloniale française.
« Ce sera un moment de mémoire et, pour notre pays, un moment d’introspection« , a-t-il indiqué.
« Les nouvelles modalités de la présence militaire française en Afrique prévoient une réduction significative pour ne conserver qu’un détachement de liaison permanent et dans le même temps d’adapter l’offre de coopération militaire aux besoins exprimés« .
Le 1er décembre 1944, au camp militaire de Thiaroye, près de Dakar, des troupes coloniales et des gendarmes français avaient tiré sur ordre d’officiers de l’armée française sur des tirailleurs africains rapatriés après s’être battus sous le drapeau français, qui réclamaient leurs arriérés de solde.
Les autorités françaises de l’époque avaient admis la mort d’au moins 35 personnes. Mais plusieurs historiens avancent un nombre de victimes bien plus élevé, jusqu’à plusieurs centaines. En juin, Paris avait reconnu six tirailleurs « morts pour la France » à titre posthume, une décision mémorielle inédite dans ce dossier douloureux entre la France et ses anciennes colonies. Le Sénégal de son côté mis en place cet été un comité pour « aller plus loin dans la manifestation de la liberté ».
Jean-Noël Barrot terminera sa tournée au Caire pour y représenter la France à une conférence internationale de soutien humanitaire à Gaza.
Afriquinfos