Mayotte tente de panser ses béantes plaies sociales avec l’appui du pouvoir de Paris

Mamoudzou (© 2022 Afriquinfos)- Après plusieurs jours de violences entre bandes rivales, la situation semble s’être enfin stabilisée à Mayotte. Ce lundi 28 novembre 2022, Danièle Obono, député de La France insoumise-Nupes de Paris, a demandé des « moyens » pour éduquer, accompagner une population très jeune et améliorer sa situation sociale qu’elle voit comme « la source du problème » dans cette région d’outre-mer.

S’exprimant sur RFI, Mme Obono a fait observer que dans ce département français dans l’Océan indien « une proportion importante de la population, qui est très jeune et qui n’a pas accès à l’éducation, qui n’a pas accès à tout un ensemble de droits sociaux« , avait besoin d' »accompagnement« .

Aussi, la femme politique aux origines gabonaises, a rappelé que Mayotte est l’ »un des territoires les plus pauvres de la République« , « Il faut permettre que l’intégrité physique et la sécurité reviennent sur le territoire, mais si on ne va pas à la source du problème, et notamment la situation sociale et économique d’une grande partie de cette jeunesse et de cette population, je crois qu’on n’arrivera pas à mettre un terme à cette situation et à apaiser véritablement le territoire« , a-t-elle développé.

« Mettons les moyens pour accompagner la population, mettons les moyens pour faire en sorte que cette jeunesse ne dérive pas et je pense que ça participera à apaiser la situation« , a-t-elle insisté.

Depuis le 12 novembre, Mayotte est le théâtre de violences entre jeunes de quartiers rivaux provoquées par le meurtre de l’un d’entre eux.  Mayotte compte sur l’arrivée de renforts policiers pour tenter d’endiguer le phénomène, même si le contexte social et économique reste critique.

Mamoudzou, la plus grande ville de l’île de Mayotte, est secouée par des conflits inter-quartiers. Des conflits violents qui s’enlisent à mesure que les victimes augmentent. « C’est tout simplement la guerre. Aujourd’hui à Mayotte, nous vivons dans un climat de tension extrême, un climat insurrectionnel », explique Denis Herman, rédacteur en chef des Nouvelles de Mayotte. « Nous vivons dans un climat de guerre civile« , indique Ambdilwahedou Soumaila, le maire de Mayotte.

La guerre civile, c’est justement ce que craint Estelle Youssouffa, députée de Mayotte. Parlant de « barbarie » ou encore de « terreur« , elle lance un « cri de détresse« .

 « On parle de hordes de centaines de jeunes, la plupart d’entre eux, des Comoriens en situation irrégulière qui ont entre douze et treize ans, sont armés de machettes et qui sèment la mort », a-t-elle affirmé. « On se demande quand est-ce que trop c’est trop? Que vaut la vie de nos enfants qui vont à l’école la peur au ventre depuis des mois?« .

Réaction de Paris très attendue

Cette nouvelle crise, car ce n’est pas la première, après le meurtre d’un jeune de 20 ans, tué à coup de « chombos » (sorte de coupe-coupe utilisé pour le travail des champs, ndlr) par une bande rivale. Sa mort suscite alors l’émoi dans le quartier de Kawéni, d’où il était originaire. Rapidement, l’émotion se transforme en colère et le quartier s’embrase. Il doit être vengé. Estelle Youssouffa décrit cela comme un  » cycle de vendetta« .

 « Bus attaqués« , « mains sectionnées« , de jour comme de nuit, et désormais dans tous les quartiers de Mamoudzou, des bandes de jeunes rivales s’affrontent, dans le sang, sous le regard impuissant et inquiet de la population locale.

Mi-octobre déjà, des maires et élus de Mayotte avaient alerté Paris sur la violence « invivable » et croissante dans le département. Ils exigeaient alors que « l’État assume pleinement sa mission régalienne de sécurité« . Quelques mois plus tôt, en août, le ministre de l’Intérieur et des Outre-Mer, Gérald Darmanin, avait lui promis des renforts de gendarmerie disponibles dès l’été prochain. Il annonçait également revenir à la fin de l’année.

Face à l’escalade, le ministère de l’Intérieur a tout de même annoncé le déploiement d’une « dizaine de policiers » du Raid, l’unité d’élite de la police. Un déploiement qui ne semble pas convaincre.

L’insécurité grandissante sur l’île aux parfums s’ajoute à la vie chère, à la précarité, au chômage et au manque d’eau. Avec 30% d’inactifs en 2021, Mayotte détient par exemple le titre de double championne d’Europe et de France du chômage.

V.A.

 

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