ONU: Le premier ambassadeur afro-américain évoque le charisme du premier Noir à recevoir le prix Nobel de la paix

Afriquinfos Editeur
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New York (© 2021 Afriquinfos)- Premier ambassadeur afro-américain auprès des Nations Unies, Andrew Young a gagné sa place dans l’histoire. Cependant, il reconnaît qu’un autre pionnier afro-américain, Ralph Bunche, a été son inspiration. Décédé il y a 50 ans, Ralph Bunche a été le premier Noir à recevoir le prix Nobel de la paix, et a joué un rôle majeur dans les premiers pas de l’ONU.

En juillet 2020, Andrew Young a raconté ses souvenirs de M. Bunche, et a expliqué pourquoi son influence continue de se faire sentir, à l’ONU et dans la lutte plus large contre le racisme.

« Ralph Bunche était l’un des héros de mon enfance. Je le considérais comme mon père, car il avait déjà fait tout ce que j’essayais de faire, 40 ans plus tôt ! », a confessé Andrew Young.

Ralph a quitté l’université Howard en 1939 pour faire le tour de l’Afrique et développer les renseignements militaires sur le continent, dans le cadre de l’effort de guerre américain. Il s’est rendu en bateau au Maroc, en Tunisie et en Égypte, puis a traversé le canal de Suez jusqu’au Kenya et à l’Afrique du Sud, et il était la seule personne de l’armée américaine à connaître réellement le continent, en termes de renseignements militaires. Une grande partie des doctrines des Nations Unies sur la décolonisation, le maintien de la paix, l’immigration, les réfugiés sont le fruit de ses travaux.

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Un citoyen américain qui marche pour la liberté

À l’époque des droits civiques, et même s’il était un haut fonctionnaire des Nations Unies et qu’il n’était pas directement impliqué dans les actions de Martin Luther King, il n’a pas hésité à conseiller et à encourager ce dernier.

Il est même venu marcher avec le Dr King à Selma, montrant qu’en plus d’être un universitaire de renommée internationale, il gardait un lien direct avec la communauté noire et les dirigeants des droits civiques : il n’est pas venu en tant que fonctionnaire des Nations Unies, il voulait être là simplement en tant que citoyen américain, marchant pour la liberté dans son pays.

« Lorsque j’ai rencontré M. Bunche aux Nations Unies (en 1967), alors qu’il accompagnait Martin Luther King, il m’a dit qu’il ne voulait pas critiquer le Dr King pour sa position sur le Vietnam, avec laquelle il était d’accord, mais qu’il détestait voir le Dr King engagé à la fois dans le mouvement pour les droits civiques et dans le mouvement pour la paix, car cela le laissait trop exposé », s’est aussi souvenu le diplomate Young.

Le Dr King répondit qu’il ne veut pas être impliqué, mais qu’il n’a pas le choix : «Je ne veux pas être impliqué dans cette affaire, mais je ne peux pas la fuir. Je ne peux pas isoler ma conscience». Cette réunion a eu lieu un an jour pour jour avant l’assassinat du Dr King. C’est presque comme si M. Bunche prédisait que la variété des rôles joués par le Dr King n’était pas judicieuse, et qu’il lui conseillait de ralentir un peu.

Maître médiateur

Ralph Bunche a toujours été très rationnel et logique, et il a résisté à toutes sortes de politiques émotionnelles et de colère qui pouvaient exister entre les races, ou entre les mondes développés et moins développés.

Il était un maître médiateur, avec un esprit froid, logique et analytique, qu’il appliquait à des sujets volatils et émotionnels. Il ne croyait pas au secret, mais il pensait que la diplomatie dépendait d’un certain niveau de confiance privée : il y a un jeu d’arrière-cour constamment en cours à l’ONU.

Les réalisations de Ralph Bunche sont difficiles à surestimer. À une époque d’inégalités raciales prononcées aux États-Unis, il est devenu le premier Afro-Américain à obtenir un doctorat d’une université américaine en 1930. Il a travaillé sur la Charte des Nations Unies et la Déclaration universelle des droits de l’Homme.

Bunche est ensuite devenu Secrétaire général adjoint de l’ONU, il a été médiateur pour l’armistice de 1949 entre Israël et les pays arabes voisins, ce qui lui a valu le prix Nobel de la paix en 1950.

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