Abidjan (© 2024 Afriquinfos)- Le Congo est un beau pays, pour sa végétation, son climat, ses étangs, son étendue. Mais ça ne va pas depuis bientôt 3 décennies.
La guerre balafre le pays. De partout et partout, le sang coule. Tel dans un abattoir. On enregistre environ 10 millions de morts. Bientôt. Et dire qu’un seul mort, c’est trop. La guerre du Congo rivalise en horreur avec la guerre du monde de 1939-1945.
Les femmes, c’est horrible. Des centaines de milliers de viols accompagnés de blessures graves. C’est une barbarie qui étouffe le cri du Congo. Mais pourquoi cette guerre? Pour notre soif de technologie.
Ce crime met en exergue le paradoxe d’une (in)humanité qui, en poursuivant la « transition énergétique », alimente la violence. La RDC (République Démocratique du Congo) est un Eldorado minier, un véritable coffre-fort terrestre renfermant les minerais nécessaires aux objets électroniques que nous consommons. Cobalt, coltan, et autres métaux rares sont extraits dans des conditions inhumaines pour alimenter notre désir insatiable d’objets connectés.
Notre plongée dans le portable nous coûte des bains de sang. Hélas. Le cobalt, le minerai recherché par toutes les industries numériques, est extrait à une échelle colossale en RDC. En 2023, la RDC a produit 170.000 tonnes de cobalt, soit près de 75% de la production mondiale.
Ce système fonctionne grâce à l’exploitation de dizaines d’autres minerais, invisibles mais indispensables à la vie moderne. Sans eux, pas de technologie, pas de communication, pas de médecine. Pourtant, le Congo récolte une part infime des profits générés par cette exploitation. Le Président congolais, Félix Tshisekedi, a expliqué que de chaque 1.000 euros dépensé pour un smartphone, seulement 3% vont réellement au Congo.
Les mines, pourtant porteuses de richesse, sont des cimetières modernes. Les conditions de travail sont horribles. Les mineurs, souvent sous-payés, risquent leurs vies tous les jours.
200 mineurs sont morts en un seul matin à cause d’un éboulement. Et pourtant, les corps sont laissés là, les victimes ignorées, comme si leur vie ne valait rien. Et nous, ici, loin de tout cela, nous continuons à regarder nos téléphones. Nous applaudissons les victoires sportives, nous nous indignons des gestes de nos dirigeants, mais notre regard est toujours détourné de l’Humanité souffrante du Congo.
Comme autrefois avec le commerce triangulaire, nous restons aveugles, indifférents à la tragédie qui se joue sur ce sol africain. Pourtant, chaque fois que nous utilisons nos téléphones, une partie du Congo est en nous. Mais hélas, pas que le Congo.
ALEX KIPRE, écrivain, journaliste, éditeur