Sans conteste, à travers ce succès électoral que son entourage attribue à la « grandeur du peuple malien capable du meilleur », le cinquième dirigeant du Mali indépendant s'et forgé une réelle légitimité démocratique pour son mandat de cinq ans censé débuter avec l'investiture prévue par la Constitution quinze jours après la validation de son élection par la Cour constitutionnelle.
Plus d'une heure après la proclamation des « résultats provisoires complets » (sic) du second tour du scrutin présidentielle tenu dimanche, par le ministre de l'Administration territoire, le tout nouveau général de brigade Moussa Sinko Coulibaly, ce n'était pas non plus une ambiance d'euphorie au quartier général de campagne de l'ex-Premier ministre sis Quartier du fleuve dans la capitale. Même sa résidence à Sebereninkoro, sécurisée par les forces de l'ordre et de sécurité depuis la campagne électorale, un privilège accordé à tous les candidats à l’élection, n'affluait pas de monde. Pour autant, des visites de personnalités de haut rang se faisaient observer. Par exemple, des délégations diplomatiques s'y succédaient, mais à une fréquence limitée. «C'est le Mali qui gagne », martèlent ses affidés qui font part de consignes de retenue données par le celui qu'ils décrivent comme le présidentiel « providentiel » du peuple malien préoccupés par le retour à la paix et la restauration de l'Etat bafouée après l'occupation du Nord du pays par des groupes rebelles et islamistes affiliés à des organisations terroristes spécialisées dans le narcotrafic. Annoncée dans un premier temps pour mercredi, la première communication publique d'IBK est désormais différée à une date indéterminée. « Le président ne parlera pas, même demain, même après-demain », a fait savoir à Xinhua Sambi Touré, le responsable de la communication de la campagne de Ladji Barama, autre surnom du leader du Rassemblement pour le Mali (RPM).
« C'est extraordinaire, l'élection d'IBK est une validation du coup d'Etat militaire de 2012 ! Soumaïla Cissé n'a pas compris qu'il courait vers un vote-sanction pour n'avoir su prendre ses distance de l'héritage d'ATT (entendez Amadou Toumani Touré, le président renversé par le putsch du 22 mars 2012 du capitaine Amadou Sanogo, fraîchement parachuté général de cors d'armée, NDLR) », note un observateur de la scène malienne. Mais la victoire éclatante d'Ibrahim Boubacar Keïta (saluée par beaucoup de dirigeants étrangers) lors du vote de dimanche qui aura enregistré une participation de 45,78% contre 48,98% au premier tour le 28 juillet sur 6,8 millions d'électeurs inscrits, n'est pas synonyme d'un chèque en blanc à lui remis par ses concitoyens, lesquels se montrent impatients pour la « refondation » de leur pays. Il s'agit d'un grand dessein qui résume les immenses défis auxquels le nouveau dirigeant devra faire face et suppose la relance de l'économie nationale, censée enclencher le développement social à la base par la production d'une croissance inclusive à travers laquelle les Maliens du Nord comme au Sud, espèrent une amélioration de leurs conditions vie, pour l'heure éprouvantes à cause d'un état de pauvreté et de misère généralisé.
Grand producteur de phosphates et d'or, le Mali, où d'importants indices de pétrole et d'uranium sont par ailleurs annoncés, est cependant classé parmi les deniers rangs dans l'indice de développement humain des Nations Unies. Ses 16,2 millions d'habitants, qui vivent essentiellement d'activités agropastorales, se répartissent sur une vaste superficie de 1.241. 238 km carrés, en partie désertique. Plombée par la crise caractérisée par la guerre dans le Nord, la croissance économique a touché le creux en 2012 par une récession établie à un taux de — 1,2%, alors que les projections initiales étaient de 5,6%. Pour 2013, les autorités tablent néanmoins sur une reprise à 4,8% prévue d'être portée à 6,3% en 2014, sous l'effet combiné de l'orientation favorable de la production aurifère, du regain d'activité dans le secteur du BTP et le renforcement de l'offre d'énergie électrique. Incertaine au départ, ainsi que l'a reconnu le ministre de l'Administration territoriale lors de la proclamation jeudi des résultats provisoires officiels du second tour, la réussite de la tenue de l'élection présidentielle a créé un climat de confiance.
L'Accord de Ouagadougou signé le 18 juin 2013 avec les rébellions du Nord fixe un délai de 60 jours au nouveau président pour lancer, une fois gouvernement en place, un dialogue inclusif en vue d'aboutir à une paix globale et définitive.
Reste à présent à la tenue des élections législatives et municipales qui, aux yeux de la communauté internationale, sont destinées à marquer le parachèvement du processus de rétablissement de l'autorité de l'Etat et de l'intégrité territoriale.