Niamey (© 2024 Afriquinfos)- Accusé depuis 2023 d’avoir avalisé ou soutenu Abdourahamane Tiani dans le cadre du coup d’Etat du 26 juillet 2023, l’ancien Chef de l’État nigérien, Mahamadou Issoufou, a tenu à répondre à cette polémique. Par ailleurs, il dit s’opposer toujours à une quelconque intervention militaire extérieure dans le pays le plus vaste d’Afrique occidentale pour le rétablissement de l’ordre constitutionnel.
‘’Je condamne le coup d’Etat intervenu au Niger, le 26 Juillet 2023. Je suis contre toute violence, notamment contre toute intervention extérieure de nature à déstabiliser le pays, et donc à aggraver sa situation’’, a affirmé l’ex-dirigeant en réponse à une interpellation de la Fondation Mo Ibrahim sur le sujet.
Dans un courrier daté du 26 juillet 2024, soit une année jour pour jour après le putsch, la Fondation Mo Ibrahim avait demandé à Mahamadou Issoufou de clarifier sa position sur le dernier putsch en date intervenu dans son pays.
Dans sa réponse transmise également dans un courrier, M. Issoufou a dit demeurer engagé à contribuer à un Niger stable, en paix et prospère. ‘’Je continuerai à contribuer à toute solution de nature à réconcilier tous les Nigériens, y compris à travers la libération des prisonniers politiques’’, s’est-il défendu. Tout en précisant que l’instabilité que vit son pays lui rappelle ‘’le mythe de Sisyphe’’.
D’après l’ancien Chef d’Etat, outre le Président Bazoum et son épouse, d’autres camarades sont en prison depuis maintenant douze (12) mois. ‘’C’est en particulier le cas de mon fils, Sani Issoufou Mahamadou, ancien Ministre du Pétrole, incarcéré dans une prison à 200km de la capitale, Niamey’’, a-t-il relevé.
Le Prix Mo Ibrahim étant une belle initiative en vue de promouvoir la démocrate, l’Etat de droit et la redevabilité, sur le continent, «c’est justement sur la base de ces principes et valeurs que j’ai condamné, dans des termes appropriés et adaptés à la situation, les évènements du 26 Juillet 2023. Cette condamnation était traduite dans le tweet suivant, en date du 30 Juillet 2023 : ‘Depuis le 25 juillet dernier, notre pays est entré dans une phase difficile de son histoire. Face à cette situation grave qui le secoue, je me suis employé par diverses voies, à trouver une sortie de crise négociée permettant notamment de libérer le Président Mohamed Bazoum et de le restaurer dans ses fonctions. Tant qu’il y a un espoir d’y parvenir, je poursuivrai sur cette voie», a fait remarquer Mahamadou Issoufou.
Cette voie, explique l’ex-dirigeant, a été, malheureusement compromise du fait de la décision de la CEDEAO d’intervenir militairement au Niger. ‘’Convaincu de ce que tout ce qui est excessif est vain, je m’étais opposé à cette intervention, comme je l’ai fait, en mon temps, contre l’intervention militaire en Libye, qui a eu les conséquences désastreuses que j’avais décrites au Sommet du G7 tenu en mai 2011, à Deauville, en France: somalisation de la Libye et déstabilisation du Sahel’’, a rappelé celui qui a gouverné le Niger entre 2011 et 2021.
‘’C’est armé de ces principes et de ces valeurs que j’ai réalisées, en avril 2021, la première alternance démocratique de l’histoire de notre pays. C’est armé de ces principes et de ces valeurs que je condamne tout changement anticonstitutionnel et toute violence, notamment toute prise de pouvoir par la force, y compris celle intervenue le 26 Juillet 2023’’, a réitéré le prédécesseur de Mohammed Bazoum.
C’est le lieu de faire noter, à ceux qui ne le savent pas, que ‘’j’ai eu la chance de déjouer, au moins, quatre tentatives de coup d’Etat, pendant mes deux mandats, entre 2011 et 2021: en août 2011, soit cinq mois après ma prestation de serment, en décembre 2015, en décembre 2019 et en mars 2021, à deux jours de l’investiture du Président Bazoum’’, a par ailleurs révélé l’ex-Président dans son courrier.
D’après Mamadou Issoufou, cette répétition des coups d’Etat a certainement une cause structurelle à laquelle il faut trouver une solution structurelle. ‘’Aussi, chaque Nigérien doit-il puiser, dans son expérience politique, toutes les ressources nécessaires pour y contribuer de manière pacifique. Tous les Nigériens doivent se ressaisir, tirer les leçons du passé, mettre fin aux querelles et divisions stériles, éviter l’éternel recommencement, se pardonner, se réconcilier, se rassembler, stabiliser, ensemble, le pays de manière durable’’, invite-t-il. Tout en affirmant qu’il s’agit là d’une des conditions sine qua non à l’émergence du Niger.
Lauréat du Prix Mo Ibrahim 2020 de la gouvernance, Mahamadou Issoufou avait condamné le putsch du 26 juillet 2023 ayant renversé son successeur Mohamed Bazoum mais seulement du bout des lèvres, regrette-t-on parmi ses critiques. Une ambiguïté qui aura alimenté toutes sortes de théories sur l’implication directe ou non de l’ancien Chef d’Etat dans le renversement de son dauphin.
Vignikpo Akpéné