Le Caire fait adopter par des dirigeants arabes un ‘Plan de reconstruction de Gaza’, plan soumis à un Sommet d’urgence de l’OCI ce vendredi

Afriquinfos Editeur
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Dans les ruines de Beit Lahia, dans le nord de la bande de Gaza, le 4 mars 2025.

Les dirigeants arabes ont adopté mardi 04 mars 2025 un plan pour la reconstruction de la bande de Gaza mettant à l’écart le Hamas, présenté comme une alternative au projet de Donald Trump de placer le territoire sous contrôle américain, mais déjà rejeté par Israël.

Dans les ruines de Beit Lahia, dans le nord de la bande de Gaza, le 4 mars 2025.

Réunis au Caire, les dirigeants des pays de la Ligue arabe ont mis en garde contre les tentatives « odieuses » de déplacement de la population de Gaza et appelé à unifier les Palestiniens sous le parapluie de l’OLP (Organisation de libération de la Palestine) dont le mouvement islamiste Hamas ne fait pas partie. Ils ont convenu de créer un Fonds destiné à financer la reconstruction de Gaza, détruite par 15 mois de guerre entre Israël et le Hamas, en appelant à une contribution internationale pour accélérer le processus.

Photo de famille des dirigeants arabes réunis au Caire pour un Sommet sur Gaza, le 4 mars 2025 (Photo distribuée par la Présidence égyptienne).

La bande de Gaza serait administrée durant une période transitoire par un Comité de technocrates palestiniens, avant que l’Autorité palestinienne n’en reprenne le contrôle. Le plan présenté par l’Egypte représente un montant de 53 milliards de dollars sur cinq ans, une estimation équivalente à celle de l’ONU, pour reconstruire la bande de Gaza.

Le Président Abdel Fattah al-Sissi a déclaré qu’il garantirait le maintien des 2,4 millions d’habitants de Gaza sur leur terre, une réponse au projet du Président américain qui prévoit leur expulsion vers l’Egypte et la Jordanie pour faire du territoire la « Riviera du Moyen-Orient ». Il n’a toutefois pas critiqué le plan de Donald Trump, qui avait soulevé un tollé international début février 2025, et affirmé que le Président américain était « capable de parvenir à la paix » dans la région.

Le Président palestinien Mahmoud Abbas (G) rencontre le Président syrien par intérim Ahmad al-Chareh, en marge d’un Sommet arabe au Caire consacré à Gaza, le 4 mars 2025. Photo distribuée par l’Autorité palestinienne.

« Toute tentative odieuse de déplacer le peuple palestinien ou (…) d’annexer une partie des territoires palestiniens occupés plongerait la région dans une nouvelle phase de conflits (…) ce qui constitue une menace claire pour (…) la paix » au Proche-Orient, avertit cependant le communiqué final du Sommet.

– « Démilitarisation totale » –

Cette réunion s’est tenue dans un contexte de blocage sur la suite du cessez-le-feu en place depuis le 19 janvier, entre Israël, qui a réclamé mardi 04 mars la « démilitarisation totale » de Gaza, et le Hamas, qui insiste pour y rester. Le mouvement islamiste s’était emparé du pouvoir dans le territoire en 2007, après en avoir chassé l’Autorité palestinienne, dirigée par Mahmoud Abbas. « L’Etat de Palestine assumera ses responsabilités dans la bande de Gaza », a affirmé devant le Sommet Mahmoud Abbas, âgé de 89 ans.

Manifestation pour réclamer le retour des otages israéliens retenus à Gaza, à Jérusalem le 2 mars 2025.

Le Président palestinien s’est dit prêt à organiser « l’année prochaine » des élections présidentielle et législatives dans les Territoires palestiniens, « à condition que les conditions soient réunies ». Le plan présenté par l’Egypte a déjà été rejeté par Israël, qui a promis d’éliminer le Hamas mais exclut aussi tout rôle futur pour l’Autorité palestinienne, basée en Cisjordanie occupée, dans le territoire. Sur X, la diplomatie israélienne a accusé cette dernière d’avoir démontré « de manière répétée sa corruption, son soutien au terrorisme et son échec à régler la question ». 

Elle a reproché aux pays arabes de « rejeter l’opportunité (que constitue le plan américain, ndlr) sans lui donner une chance équitable et de continuer de proférer des accusations sans fondement contre Israël ». Le Hamas a « salué » de son côté le projet arabe ainsi que la création d’un Comité chargé de gérer le territoire après la guerre.

La première étape de la reconstruction, d’une durée de six mois, doit être consacrée au déblaiement des débris, au déminage et à la fourniture de logements temporaires pour abriter plus de 1,5 million de personnes. Suivront deux phases de reconstruction, la première comprenant des infrastructures essentielles et des logements permanents, la seconde des infrastructures incluant un Port commercial et un aéroport.

Le Caire cherchera à obtenir pour son plan le soutien des nations musulmanes à l’occasion d’un Sommet d’urgence de l’OCI (Organisation de la coopération islamique), vendredi 07 mars à Jeddah (Arabie Saoudite), afin que ce projet « devienne à la fois un plan arabe et un plan islamique », selon le ministre égyptien des Affaires étrangères, Badr Abdelatty. Le Secrétaire Général de l’ONU, Antonio Guterres, lui aussi présent au Caire, a affirmé que son organisation « soutenait fermement » le plan arabe.

Des Palestiniens se recueillent sur la dépouille d’un proche tué à Beit Hanoun, dans le nord de la bande de Gaza, le 4 mars 2025.

– Blocage –

Une première phase de la trêve, d’une durée de 42 jours, a pris fin le 1er mars, après avoir permis le retour de 33 otages retenus à Gaza en échange de la libération par Israël d’environ 1.800 détenus palestiniens. Les deux camps s’opposent à présent sur la suite du processus, avec pour première conséquence le blocage imposé depuis dimanche 02 mars par Israël à l’entrée de l’aide humanitaire dans la bande de Gaza assiégée.

Vue de la bande de Gaza modélisée en 3 dimensions, montrant les quantités de débris au sol, d’après les données de l’Unep au 1er décembre.

Israël souhaite une extension de la première phase de la trêve jusqu’à la mi-avril 2025 tandis que le Hamas insiste sur la mise en oeuvre de la deuxième étape, prévoyant un cessez-le-feu permanent et la libération de tous les otages. Le Gouvernement israélien ne cesse de répéter qu’il se réserve le droit de reprendre les combats à tout moment pour anéantir le Hamas si celui-ci ne dépose pas les armes.

L’attaque du Hamas dans le sud d’Israël (le 07 octobre 2023) a fait 1.218 morts du côté israélien, en majorité des civils, selon un décompte de l’AFP basé sur des données officielles et incluant les otages morts ou tués en captivité. La riposte de l’Armée israélienne a fait au moins 48.405 morts à Gaza, en majorité des civils, d’après les données du ministère de la Santé du Hamas, jugées fiables par l’ONU.

Des camions transportant de l’aide humanitaire attendent du côté égyptien du poste frontière de Rafah avec la bande de Gaza, le 2 mars 2025, après qu’Israël a suspendu l’entrée des fournitures dans l’enclave palestinienne.

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