Kenya: Le bras de fer judiciaire entre Gachagua et Ruto rentre dans le vif ce 23 octobre

Afriquinfos Editeur
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Conférence de presse du Président kenyan William Ruto le 11 juillet 2024 à Nairobi.

La Haute Cour kényane a commencé mardi 22 octobre à examiner un recours du Vice-président déchu Rigathi Gachagua contre sa destitution inédite la semaine dernière, dans un feuilleton politique à rebondissements qui captive le pays.

Peu après l’ouverture des débats, en présence de M. Gachagua, la procédure judiciaire a été contestée par ses avocats, ainsi que par le Chef de l’Etat William Ruto. L’audience a ensuite été ajournée et reprendra ce mercredi 23 octobre à 15H00 (12H00 GMT).

Rigathi Gachagua, alors Vice-président, lors d’une conférence de presse, le 7 octobre 2024 à Nairobi, au Kenya.

L’équipe du principal intéressé a remis en question la composition du panel de trois juges chargé de l’affaire, arguant qu’il n’avait pas été constitué par la présidente de la Haute cour, Martha Koome, mais par son adjoint. Dans une saisine distincte, le Président William Ruto a estimé que la Haute cour n’avait pas la compétence pour se pencher sur l’affaire, qui relève selon le Chef de l’Etat de la Cour suprême.

Le Sénat a estimé la semaine dernière que M. Gachagua était coupable de « violation grave » de la Constitution, de menaces envers les juges et de pratiques politiques de division ethnique. Rigathi Gachagua, 59 ans, est devenu le premier Vice-président écarté du pouvoir dans le cadre d’une telle procédure, prévue par la Constitution de 2010, point culminant de plusieurs mois de conflit ouvert avec William Ruto. Quelques heures après le vote historique de la Chambre haute, le Chef de l’Etat a nommé le ministre de l’Intérieur Kithure Kindiki, un avocat de 52 ans devenu poids lourd politique, à la Vice-présidence.

Mais la Haute Cour, saisie par les avocats de M. Gachagua jugeant sa destitution anticonstitutionnelle et précipitée, a suspendu ce remplacement, citant des « questions constitutionnelles monumentales ». Le Vice-président était tombé malade et avait été hospitalisé à peine une heure avant de témoigner devant le Sénat la semaine dernière.

– « Vicieux » –

M. Ruto avait choisi M. Gachagua comme colistier pour la présidentielle de 2022, malgré sa réputation déjà sulfureuse, marquée par plusieurs accusations de corruption. Doté d’un solide réseau d’influence notamment dans la région stratégique du mont Kenya, cet ancien homme d’affaires de l’ethnie kikuyu – majoritaire dans le pays – a joué un rôle crucial dans la victoire de M. Ruto face à son rival Raila Odinga (50,49% contre 48,85%). Mais les relations entre les deux hommes à la tête de l’Etat se sont détériorées, notamment depuis le mouvement de contestation anti-gouvernementale qui a secoué le pays en juin et juillet 2024.

Les détracteurs de M. Gachagua l’accusent de ne pas avoir soutenu le Chef de l’Etat face aux manifestations qui demandaient sa démission. Dimanche 20 octobre, William Ruto a appelé à défendre ‘les valeurs nationales et les principes de gouvernance au quotidien‘, sans faire directement référence à M. Gachagua.

Après avoir quitté un hôpital de la capitale Nairobi, où il était soigné pour de fortes douleurs thoraciques, le Vice-président déchu a le même jour qualifié William Ruto d’homme ‘vicieux et cruel, disant craindre pour sa vie et celle de sa famille‘. La Direction des enquêtes criminelles lui a demandé lundi 21 octobre 2024 de faire une déclaration à la Police sur ces ‘graves allégations de tentatives d’assassinat‘.

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