Baku (© 2024 Afriquinfos)- Les conclusions de la COP 29 à Bakou (du 11 au 22 novembre 2024) ont mis en lumière des besoins de financement climatique ambitieux pour l’Afrique. Il y a été évoqué la nécessité de tripler les financements des pays en développement, visant un objectif de 300 milliards de dollars par an, par rapport à l’ancien objectif de 100 milliards de dollars.
Les pays africains ont également mis en avant des besoins financiers jusqu’à 2,8 billions de dollars pour atteindre leurs CDN (Contributions déterminées au niveau national). Ces discussions laissent entrevoir un potentiel accroissement des financements climatiques à venir, bien qu’il reste à voir les engagements concrets qui en résulteront.
Ainsi, la Conférence des Nations Unies sur les changements climatiques (COP 29) a un nouvel objectif en matière de financement pour aider les pays à protéger leurs populations et leurs économies contre les catastrophes climatiques, et partager les vastes avantages de l’essor des énergies propres.
Outre l’accord de tripler le financement aux pays en développement, par rapport à l’objectif précédent de 100 milliards de dollars par an, à 300 milliards de dollars par an d’ici à 2035, la rencontre de Bakou ambitionne de : s’assurer des efforts de tous les acteurs pour travailler ensemble afin d’augmenter le financement aux pays en développement, à partir de sources publiques et privées, pour atteindre un montant de 1.300 milliards de dollars par an d’ici à 2035.
Connu officiellement sous le nom de nouvel objectif chiffré collectif pour le financement de l’action climatique (NCQG, selon le sigle anglais), il a été adopté après deux semaines de négociations intenses et plusieurs années de travail préparatoire, dans le cadre d’un processus exigeant que toutes les nations se mettent d’accord à l’unanimité sur chaque terme de l’accord.
«Ce nouvel objectif en matière de financement est une assurance pour l’humanité, dans un contexte d’aggravation des effets climatiques qui frappent tous les pays », a déclaré Simon Stiell, Secrétaire exécutif d’ONU Climat. «Mais comme toute assurance, elle ne peut fonctionner que si les primes sont payées intégralement et à temps».
«Il permettra de poursuivre l’essor des énergies propres, aidant tous les pays à profiter des avantages considérables qui y sont associés : plus d’emplois, une croissance plus forte, une énergie plus abordable et plus propre pour tous».
L’important déficit de financement de l’Afrique mis en exergue
Pour sa part, l’Agence internationale de l’énergie prévoit que les investissements mondiaux dans le domaine de l’énergie dépasseront les 2.000 milliards de dollars pour la première fois en 2024.
S’exprimant au nom de Kevin Kariuki, vice-président du Groupe de la Banque africaine de développement, le chef de la division du financement du climat et de l’environnement de la Banque, Gareth Phillips, a souligné l’important déficit de financement de l’Afrique. «Les Perspectives économiques en Afrique prévoient un besoin de financement d’environ 2.700 milliards de dollars d’ici à 2030 soit environ 400 milliards de dollars par an pour lutter efficacement contre le changement climatique », a déclaré M. Phillips.
«Pourtant, l’Afrique n’a reçu que 47 milliards de dollars en 2022, ce qui ne représente que 3,6% du financement climatique mondial. Bien que l’investissement record de 5,8 milliards de dollars de la Banque dans l’adaptation et l’atténuation climatiques l’an dernier marque un progrès, cela reste insuffisant. Nous devons accélérer considérablement nos efforts pour mobiliser les financements climatiques».
La Banque africaine de développement a présenté plusieurs initiatives ambitieuses visant à combler ce déficit, notamment la création de banques vertes, l’élargissement du soutien apporté par l’intermédiaire du Guichet d’action climatique, la création de nouvelles sources de revenus pour les actions d’adaptation à travers le Mécanisme des bénéfices de l’adaptation, le Programme d’accélération de l’adaptation en Afrique, et l’accent accru mis sur les marchés du carbone, les solutions fondées sur la nature et la conservation de la biodiversité.
La directrice générale des Fonds d’investissement climatiques (FIC), Tariye Gbadegesin, a souligné le rôle de catalyseur de l’organisation dans la mise à l’échelle des solutions. «Les FIC aident les banques multilatérales de développement à innover et traiter des domaines complexes et à haut risque. Avec plus de 12 milliards de dollars de financement soutenant près de 400 projets dans plus de 80 pays à revenu faible et intermédiaire, notre travail couvre les énergies renouvelables, les solutions fondées sur la nature et la transition vers l’abandon du charbon. Avec ses vulnérabilités spécifiques et son immense potentiel, l’Afrique est en première ligne face au défi du changement climatique».
La directrice régionale pour l’Afrique du Bureau des Nations unies pour les services d’appui aux projets (UNOPS), Dalila Goncalves, a mis en avant le rôle central des institutions non financières, comme l’UNOPS, pour faciliter l’utilisation efficace du financement climatique, en particulier dans les environnements fragiles et à haut risque.
Le nouvel objectif en matière de financement de la COP 29 s’appuie sur les avancées significatives de l’action climatique mondiale lors de la COP 27, qui a approuvé un Fonds historique pour les pertes et préjudices, et de la COP 28, qui a abouti à un accord mondial visant à opérer une transition rapide et équitable vers une sortie de tous les combustibles fossiles dans les systèmes énergétiques, à tripler les énergies renouvelables et à renforcer la résilience aux changements climatiques.
La COP 29 est également parvenue à un accord sur les marchés du carbone, que plusieurs des précédentes COP n’avaient pas pu finaliser. Ces accords aideront les pays à mettre en œuvre leurs plans d’action climatique plus rapidement et à moindre coût, et à progresser plus vite dans la réduction de moitié des émissions mondiales au cours de cette décennie, comme l’exige la science.
Une COP entachée de limites
Simon Stiell a également reconnu que l’accord conclu à Bakou ne répondait pas aux attentes de toutes les Parties et qu’il restait encore beaucoup à faire l’année prochaine sur plusieurs enjeux cruciaux.
«Aucun pays n’a obtenu tout ce qu’il voulait, et nous quittons Bakou avec une montagne de travail à accomplir», a déclaré Simon Stiell. «Les nombreux autres enjeux sur lesquels nous devons progresser ne font peut-être pas la une des journaux, mais ils sont vitaux pour des milliards de personnes. Ce n’est donc pas le moment de crier victoire, nous devons nous concentrer et redoubler d’efforts sur la route vers Belém».
L’accord de financement conclu lors de la COP 29 intervient alors que des plans d’action climatique nationaux (les contributions déterminées au niveau national ou CDN) plus ambitieux doivent être remis par tous les pays l’année prochaine.
Ces nouveaux plans doivent couvrir tous les gaz à effet de serre et tous les secteurs, afin de maintenir la limite d’un réchauffement de 1,5°C à portée de main. Durant la COP29, deux pays du G20 – le Royaume-Uni et le Brésil – ont clairement indiqué qu’ils prévoyaient d’intensifier l’action climatique dans leurs CDN 3.0, parce que c’est entièrement dans l’intérêt de leurs économies et de leurs populations.
«Nous avons encore un long chemin à parcourir, mais ici, à Bakou, nous avons franchi une nouvelle étape importante», a déclaré Stiell. «L’Accord de Paris des Nations Unies est le canot de sauvetage de l’humanité, il n’y a rien d’autre. Alors ici à Bakou, et tous les pays représentés dans cette salle, nous allons ensemble de l’avant».
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