Rabat (© 2024 Afriquinfos)- En marge de sa visite d’Etat de trois jours à Rabat, le Président français Emmanuel Macron et le Roi du Maroc Mohammed VI, ont signé ce 28 octobre 2024, plusieurs contrats et accords d’investissement, dont le montant global atteindra « jusqu’à dix milliards d’euros« , a indiqué la Présidence française.
Après un tête-à-tête, Emmanuel Macron et Mohammed VI ont signé une déclaration sur un « partenariat d’exception renforcé » censé concrétiser la réconciliation entre les deux pays. Le cabinet royal a évoqué, dans un communiqué, « le passage vers une nouvelle ère des relations fortes entre le Maroc et la France ».
22 contrats et accords ont ensuite été signés en leur présence sur le transport ferroviaire, l’hydrogène vert (TotalEnergies), l’eau, le secteur portuaire (CMA CGM), l’éducation ou encore la protection civile. Avec ceux qui seront conclus mardi, ces contrats commerciaux, investissements et prêts portent sur un montant global allant « jusqu’à dix milliards d’euros », a annoncé l’Élysée, sans entrer dans le détail.
Les deux dirigeants prévoient notamment que les groupes français Alstom et Egis participent à la réalisation du deuxième tronçon de la ligne de train à grande vitesse Tanger-Marrakech. Alstom va aussi fournir des rames de TGV, mais le montant détaillé de chaque contrat n’a pas été précisé. D’autres accords doivent être signés mardi.
« Nous entendons refonder [notre relation], mais aussi nous projeter dans les décennies qui viennent« , en plaçant « la barre très haut dans de nombreux domaines« , avait esquissé le chef de la diplomatie française Jean-Noël Barrot dans l’hebdomadaire français La Tribune Dimanche.
« Visite historique« , a pour sa part écrit le journal arabophone marocain Assabah. « Des sujets difficiles seront abordés, notamment la question de l’immigration devenue une obsession en France (…) mais cette discussion difficile est surmontable« , renchérit le quotidien Al Ahdath Al Maghribia.
Pas moins de neuf ministres accompagnent Emmanuel Macron, dont ceux de l’Intérieur Bruno Retailleau, très attendu sur les sujets d’immigration, de l’Économie Antoine Armand, de l’Éducation nationale Anne Genetet et de la Culture Rachida Dati, d’origine marocaine.
Les dirigeants des groupes Engie, Alstom, Safran, TotalEnergies, Suez sont aussi du voyage, de même que des représentants d’Airbus, Veolia, Thalès ou du spécialiste du BTP Colas.
Autres financements dans des secteurs innovants
Le monde culturel franco-marocain est également à l’honneur, avec les écrivains Tahar Benjelloun et Leïla Slimani, l’humoriste Djamel Debbouze et l’acteur Gérard Darmon. Les deux dirigeants entendent à cette occasion tirer un trait sur une série de contentieux allant des soupçons d’écoutes téléphoniques du président Macron par le renseignement marocain à la diminution par deux du nombre de visas accordés par la France aux Marocains en 2021-2022 pour pousser Rabat à reprendre ses ressortissants en situation irrégulière.
La priorité donnée par le président français à l’Algérie après sa réélection en 2022 avait aussi jeté un froid, alors que les deux puissances du Maghreb sont en opposition frontale, notamment sur la question du Sahara occidental. Le sort de cette ancienne colonie espagnole, considérée comme un « territoire non autonome » par l’ONU, oppose depuis un demi-siècle le Maroc aux indépendantistes sahraouis du Front Polisario, soutenus par Alger.
Ces multiples secousses ont sans cesse conduit à repousser la visite d’État d’Emmanuel Macron, envisagée initialement pour le début 2020, après une première visite en juin 2017 et une autre en 2018. Emmanuel Macron a finalement opté pour un réchauffement avec le Maroc, où la France compte d’importants intérêts économiques, en exprimant son soutien en juillet à une solution au Sahara occidental « dans le cadre de la souveraineté marocaine« . Une position qu’il devrait réaffirmer haut et fort lors d’une allocution très attendue mardi devant le Parlement, alors que le Maroc considère le Sahara occidental comme un enjeu national majeur.
Des contrats et un dialogue sur l’immigration
Rabat espère désormais que ce réalignement de la position française va se traduire par des investissements sonnants et trébuchants dans ce territoire aux énormes ressources halieutiques, solaires, éoliennes ainsi qu’en phosphates. Airbus Helicopters pourrait ainsi vendre 12 à 18 Caracal aux Forces armées marocaines à l’occasion de la visite, selon des sources concordantes.
Sur le volet immigration, le nouveau ministre français de l’Intérieur, très offensif, veut contraindre le Maroc à reprendre ses ressortissants arrêtés en situation irrégulière. Mais après la crise des visas de 2021-2022, le gouvernement français promet d’avancer dans un esprit de dialogue.
« Il faut tirer les leçons des erreurs du passé » et aborder la question « dans le cadre d’un partenariat global« , insiste le ministre des Affaires étrangères Jean-Noël Barrot. Mohammed VI a accepté l’invitation à se rendre à son tour en visite d’État en France – elle pourrait intervenir dès 2025.
Afriquinfos