Les Burundais ont voté ce 05 juin 2025 pour renouveler le Parlement de leur pays enclavé et pauvre d’Afrique de l’Est, un scrutin entaché d’irrégularités selon des observateurs, mais sans grand suspense car les principales figures d’opposition ont été empêchées de concourir.
« Je suis allé voter pour éviter d’avoir des problèmes car certains responsables vérifient si vous avez voté. Mais je n’espère rien de cette élection car le CNDD-FDD va de toute façon garder le pouvoir, et le pays va continuer de s’enfoncer dans la crise », a témoigné Prosper, 64 ans, un ingénieur civil à la retraite.
En 2024, l’opposant Agathon Rwasa – ancien chef rebelle hutu pendant la guerre civile entre son ethnie et celle des Tutsi, qui avait fait quelque 300.000 morts entre 1993 et 2005 – a été écarté de la tête du CNL (Conseil national pour la liberté). Il a été remplacé par un dissident du CNL, Nestor Girukwishaka, haut cadre d’une entreprise publique réputé proche du parti au pouvoir – ce qu’un responsable du CNL avait alors qualifié de « vol du parti » par le Gouvernement.
L’exécutif a ensuite décidé d’établir de nouvelles règles électorales empêchant A. Rwasa et ses alliés de rejoindre d’autres formations d’opposition ou de se présenter en tant que candidats indépendants. Les trois semaines de campagne électorale pour ces élections législatives mais aussi communales ont été « très difficile », a confié à la veille du scrutin Patrick Nkurunziza, le président de la coalition de petits partis appelée ‘Un Burundi pour tous’, qui a dénoncé des « menaces, harcèlement, et parfois même des agressions » de la part des Imbonerakure, des groupes de jeunes proches des autorités.
Evariste Ndayishimiye a pris les rênes du Burundi en juin 2020 après le décès de son prédécesseur Pierre Nkurunziza (sans lien de parenté avec le candidat précédemment mentionné), qui avait tenu le pays d’une main de fer durant 15 ans. Depuis son accession au pouvoir, il oscille entre signes d’ouverture du régime, qui reste sous l’emprise de puissants généraux, et ferme contrôle du pouvoir, marqué par des atteintes aux droits humains dénoncées par des ONG et l’ONU.

Un analyste interrogé par l’AFP sous couvert d’anonymat a souligné que le Burundi fait face à « une crise socio-économique très profonde qui est marquée par toutes sortes de pénuries, une inflation galopante de plus de 40% par mois, un mécontentement populaire croissant« . Une sévère pénurie de carburant paralyse notamment le Burundi depuis près de trois ans (pays le plus pauvre du monde en terme de PIB par habitant, selon un classement de la Banque mondiale de 2023). 75% de ses 12 millions d’habitants vivent sous le seuil international de pauvreté.
Mais « en l’absence du CNL d’Agathon Rwasa, le CNDD-FDD est sûr de gagner » face à des « candidatures de complaisance », a estimé l’analyste précité. En vertu d’un accord de paix signé en 2000, les sièges au Parlement sont répartis 60-40 entre les deux groupes ethniques, les Hutu et les Tutsi.
© Afriquinfos & Agence France-Presse