Alger (© 2025 Afriquinfos)- le continent africain scrute l’escalade entre Washington, Téhéran et Tel-Aviv avec une inquiétude grandissante. Après une première vague de réactions à l’issue des frappes orchestrées par Israël le 13 juin, des pays africains ont une nouvelle fois réagi face aux frappes conjointes menées par les États-Unis et Israël contre l’Iran ce 22 juin.
À Alger, le ministère des Affaires étrangères a dénoncé une ‘’grave escalade’’ et rappelé l’exigence du respect du droit international. Dans son communiqué, l’Algérie ‘’appelle la communauté internationale à assumer ses responsabilités pour faire cesser immédiatement cette dangereuse spirale de violence’’. Une position qui s’inscrit dans la continuité de la diplomatie algérienne, traditionnellement alignée sur les principes de souveraineté nationale et de non-ingérence.
Tunis a condamné une ‘’violation flagrante’’ de la souveraineté iranienne. Fidèles à leur tradition diplomatique, les deux capitales s’en tiennent à une lecture légaliste du conflit, évitant cependant soigneusement de heurter les grandes puissances.
À Rabat, en revanche, les autorités observent un silence stratégique. Lié à Israël par les Accords d’Abraham, le Maroc ménage ses alliés occidentaux, tout en surveillant une opinion publique de plus en plus chauffée à blanc. Ce week-end, des centaines de manifestants ont défilé, drapeaux palestiniens en main, brûlant des effigies de Netanyahou et fustigeant ’’l’impérialisme occidental’’.
La diplomatie égyptienne a appelé à ‘’éviter toute escalade’’ et à ‘’préserver la stabilité régionale’’. En creux, c’est la crainte d’un embrasement aux frontières du Sinaï qui domine.
Abuja a convié à ‘’la retenue de toutes les parties’’ et plaide pour un retour à la table des négociations. Son communiqué, publié vendredi soir, insiste sur le fait que ‘’la paix dans le Golfe persique est aussi notre sécurité énergétique’’.
A Accra, la tension se traduit dans les décisions économiques. Face à la flambée des prix du pétrole, le gouvernement a suspendu une taxe sur les carburants. ‘’L’heure n’est pas à alourdir le fardeau des Ghanéens’’, confirme un ministre.
Toujours en Afrique de l’Ouest, la Mauritanie, de son côté, a condamné ‘’fermement’’ les frappes israélo-américaines, les qualifiant de ‘’violation de la souveraineté iranienne et de l’ordre international’’.
L’une des réactions les plus scrutées était celle de l’Afrique du Sud. Fidèle à son non-alignement, Pretoria a exprimé sa «profonde inquiétude» et a demandé une réunion d’urgence du Conseil de Sécurité de l’ONU. Mais la diplomatie sud-africaine reste isolée.
La BAD, l’UA, le Sahel et l’Afrique du Sud
La Banque africaine de développement (BAD), quant à elle, appelle à la prudence. ‘’Une escalade durable au Moyen-Orient pourrait compromettre la reprise en Afrique’’, a alerté l’institution. L’Union Africaine, a exhorté le 21 juin à ‘’une désescalade urgente’’, aucun sommet extraordinaire n’a encore été convoqué. Une prudence critiquée.
La présidence sud-africaine a exprimé dimanche ‘’une profonde inquiétude’’ quant à l’implication des États-Unis dans le conflit entre Israël et l’Iran, après les frappes aériennes américaines contre trois installations nucléaires iraniennes.
Selon un communiqué officiel, la ‘’plus sincère espérance’’ de l’Afrique du Sud est que le président américain Donald Trump utilise son influence et celle de son gouvernement pour ‘’amener les parties à privilégier la voie du dialogue pour résoudre leurs différends’’. Pretoria a exhorté les trois pays à « laisser à l’ONU l’opportunité et l’espace nécessaires pour conduire une résolution pacifique » des enjeux en question, notamment l’inspection et la vérification des activités d’enrichissement d’uranium et des capacités nucléaires globales de l’Iran.
Au Sahel, la crise s’inscrit dans une lecture double, à la fois souverainiste et sécuritaire. À Niamey, Le Courrier du Sahel relaie les mots d’un conseiller du général Tiani, qui dénonce ‘’une escalade impérialiste aux conséquences globales’’.
À Ouagadougou, le quotidien Sidwaya prévient : ‘’La guerre au Moyen-Orient pourrait avoir des répercussions sur le panier de la ménagère burkinabè, via une hausse du baril et des importations stratégiques’’.
Les États-Unis ont lancé des frappes contre des sites nucléaires iraniens, dont celui de Fordo, en utilisant des bombes antibunker et des missiles de croisière. Le Président Donald Trump a annoncé dimanche soir que les forces américaines avaient mené des frappes aériennes ‘’très réussies’’ contre trois sites nucléaires iraniens, alors que les craintes d’un conflit généralisé dans la région s’intensifient.
Les États-Unis ont visé les installations nucléaires iraniennes en larguant six bombes anti-bunker sur le site de Fordo avec des bombardiers furtifs B-2, ainsi que des dizaines de missiles de croisière lancés depuis des sous-marins contre les sites de Natanz et Ispahan.
Vers un cessez-le-feu ?
Dans la nuit, Donald Trump a annoncé la conclusion d’un cessez-le-feu entre l’Iran et Israël, censé mettre un terme à ‘’la guerre de douze jours’’. Selon le président américain, l’Iran observera la trêve à partir de minuit (heure de Washington), suivi d’Israël douze heures plus tard, pour aboutir, au bout d’un cycle de vingt-quatre heures, à la ‘’fin de la guerre’’. ‘’Que Dieu bénisse Israël, que Dieu bénisse l’Iran, que Dieu bénisse les États-Unis et que Dieu bénisse le monde’’, a-t-il conclu, solennel. Ni Téhéran ni Tel-Aviv n’ont, pour l’instant, confirmé l’accord. Mais cette annonce inattendue offre un début de désescalade — fragile, mais significatif.
À la suite de ces frappes, l’Iran a appelé le Conseil de sécurité de l’ONU à tenir une réunion d’urgence pour condamner cette agression et demander des comptes aux auteurs de violations du droit international.
Les hostilités ont éclaté le 13 juin après qu’Israël a mené des frappes aériennes contre plusieurs sites militaires et nucléaires en Iran, poussant Téhéran à riposter par des tirs de missiles. Les autorités israéliennes affirment qu’au moins 25 personnes avaient été tuées et des centaines blessées lors des frappes iraniennes.
En Iran, 430 personnes ont été tuées et plus de 3 500 blessées dans les frappes israéliennes, selon le ministère iranien de la Santé.
V.A.