Nigeria: les habitants abandonnent l’exploitation du pétrole pour l’or

Afriquinfos
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Abuja (© 2018 Afriquinfos) –Au Nigéria, les habitants de la région ont toujours su qu’un vaste gisement d’or reposait sous les cacaoyers et les massifs de bambou de la jungle tropicale de l’Etat d’Osun, dans le sud-ouest du Nigeria.

Obsédé par la très lucrative exploitation pétrolière, le pays a négligé l’or durant des décennies. Mais le gouvernement cherche aujourd’hui à redynamiser un secteur minier moribond et diversifier ses revenus, plombés par l’effondrement des cours du baril depuis 2014.

Quelques sociétés misent déjà sur ce secteur, avec l’espoir de réitérer l’expérience fructueuse des pays voisins comme le Ghana, le Sénégal et la Sierra Leone.

Par une matinée humide, Segun Lawson, directeur général de Thor Explorations, guide ses visiteurs sur le site où se trouve la mine rachetée par sa société.

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« Personne ne connaît l’exploitation minière au Nigeria », affirme M. Lawson.

Le gouvernement nigérian a creusé la mine dans les années 1980, « mais le pétrole était si abondant qu’ils l’ont tout simplement abandonnée », ajoute-t-il.

« L’or coule sur 210 mètres de profondeur », poursuit le géologue Lawson qui espère démarrer la première production d’or à grande échelle du Nigeria début 2020: « C’est à notre portée. On se trouve dans une petite province aurifère que personne n’a explorée avec la technologie moderne ».

« Nous avons toujours eu l’or mais nous n’avions pas les ressources pour l’exploiter »,

Ce commerce a été éclipsé par la traite négrière, avant d’être relancé à la fin du XIXe siècle, lorsque les Européens ont introduit de nouvelles techniques d’exploitation minière industrielles.

Dans les années 2000, un « super-cycle » des matières premières a entrainé un autre boom, les avancées techniques aidant à découvrir de nouveaux sites et à rendre l’exploitation minière plus productive.

Mais ces nouvelles technologies ont mis du temps à arriver au Nigeria.

Un peu plus bas sur la route menant à la mine, la ville d’Ilesa accueille un petit marché où les mineurs artisanaux vendent des pépites d’or alluvionnaire extraites du sol au terme d’efforts éprouvants.

« Nous avons toujours eu l’or mais nous n’avions pas les ressources pour l’exploiter », affirme Adeyeye Bamidele Adeniji, un chef traditionnel en accueillant les responsables de Thor Explorations dans sa maison d’Ilesa.

Soutient de la Banque Mondiale (BM)

Au Nigeria comme dans toute l’Afrique de l’Ouest, des dizaines de milliers de personnes travaillent dangereusement dans des mines à ciel ouvert, à la recherche d’or, d’étain ou de saphirs.

« Leur nombre et la faiblesse des règlementations encadrant leurs activités alarment de nombreux environnementalistes dans la région », affirme Cassandra Mark-Thiesen, chercheuse à l’Université de Bâle.

« Le recours au travail des enfants, les morts accidentelles chez les mineurs et la contrebande des minerais sont également problématiques ».

Le Nigeria a bâti une industrie pétrolière et gazière sophistiquée au détriment de tout le reste. La plus grande économie de l’Afrique dépend du pétrole pour 70% de ses recettes publiques, malgré d’importantes ressources en fer, en or et autres minerais.

Depuis son arrivée au pouvoir en 2015, le gouvernement du président Muhammadu Buhari tente de s’affranchir de cette dépendance aux hydrocarbures.

L’an dernier, la Banque mondiale a approuvé un crédit de 150 millions de dollars pour soutenir la croissance du secteur minier du Nigeria, qui représente actuellement moins de 1% du produit intérieur brut.

Le secteur minier nigérian est confronté à de gros problèmes, notamment le manque d’infrastructures de base pour le transport des minerais et l’insuffisance de données géologiques.

L’exploitation aurifère est une histoire ancienne en Afrique de l’Ouest. La région, qui accueillait alors les puissants royaumes d’Asante et du Mali, était au Moyen-Age une source majeure de lingots pour la Méditerranée et le monde arabe.

Vignikpo Akpéné